Édition
Nouvelle parution
George Orwell, Le Quai de Wigan

George Orwell, Le Quai de Wigan

Publié le par Marc Escola

Préface : Jean-Laurent Cassely

Traduction (Anglais) : Clotilde Meyer, Isabelle D. Taudière

« Il y a une réalité qu’il faut regarder en face : renoncer aux distinctions de classes revient à renoncer à une part de soi-même. Prenons mon cas particulier : je suis représentatif de la classe moyenne, et rien ne m’est plus facile que de proclamer mon désir d’abattre les barrières de classes. Or, presque tout ce que je pense et fais découle de ces distinctions sociales. Toutes mes valeurs – mes conceptions du bien, du mal, de l’agréable et du désagréable, du comique et du sérieux, du laid ou du beau – sont des valeurs de la classe moyenne. Mes goûts littéraires, culinaires et vestimentaires, mon sens de l’honneur, mes manières de table, mes tournures de phrase, mon accent et jusqu’à ma gestuelle propre, sont le produit d’une éducation particulière, d’un segment spécifique à mi-chemin de l’échelle sociale. Une fois que j’ai pris conscience de cela, je comprends qu’il ne sert à rien de taper amicalement dans le dos d’un prolétaire et de lui assurer qu’il vaut autant que moi. Si je veux établir avec lui un vrai contact, je dois déployer un effort auquel je ne suis certainement pas préparé. Car pour m’extraire du schéma d’oppression de classes, je dois faire abstraction non seulement de mon propre sentiment de supériorité, mais aussi de la plupart de mes autres penchants et préjugés. Je dois opérer une telle transformation sur moi-même qu’au bout du compte, j’en serais à peine reconnaissable. »

Écrit en 1937, Le Quai de Wigan symbolise pour le critique Simon Leys la « transmutation du journalisme en art ». Reportage sur un lieu réel au nom imaginaire (Wigan n’existe pas), il consacre les efforts d’Orwell pour décrire et comprendre la société de son temps, mais aussi l’exigence morale d’un journalisme engagé.

Feuilleter l'ouvrage…

On peut lire sur en-attendant-nadeau.fr un article sur cet ouvrage :

"Le chemin de Damas de George Orwell", par Marc Porée (en ligne le 3 août 2022)

Le quai de Wigan (1937) reparait dans une nouvelle traduction que signent Clotilde Meyer et Isabelle Taudière. Dans sa première partie, Orwell met le cap sur le nord de l’Angleterre, à la rencontre des mineurs de Wigan et de Sheffield. Partageant leur existence, il dénonce des conditions de travail et de logement d’une indignité totale. Dans la deuxième partie, le futur auteur de La ferme des animaux et de 1984 fustige le bolchevisme et son machinisme débridé. Mais sans renoncer d’un pouce aux idéaux du socialisme, et en se disant convaincu que celui-ci incarne la seule parade à l’omniprésente menace fasciste. Cela donne lieu à un livre tenant à la fois de l’enquête de terrain, rigoureuse et implacable, et de l’agit-prop. Pas plus l’une que l’autre n’ont pris une ride. C’en est même diablement instructif pour notre temps présent.