Colloques en ligne

Yves Citton (Univ. Stendhal - Grenoble 3)

Pour une approche noo-politique des fictions des Lumières

Présentation de l’axe de recherche « Féerie, fiction, expérimentation » de l’Équipe LIRE, Université Stendhal — Grenoble 3

11) Conformément à ce qu’avaient indiqué les organisateurs, je ne suis pas en mesure de présenter des résultats satisfaisants de recherches passées, mais simplement un axe de recherches à venir encore en gestation, qui porte pour le moment le titre (provisoire) de « Féerie, fiction, expérimentation ».

22) Il s’agit d’un axe de recherche qui commence à se mettre en place dans notre équipe de Grenoble, avec mes collègues Jean-François Perrin, Catherine Langle, Christophe Cave et Martial Poirson, ainsi qu’au sein de l’équipe de rédaction de la revue Féeries, consacrée au conte merveilleux et dirigée par Jean-François Perrin, revue dont le deuxième numéro sur « Le Conte oriental » vient de sortir et dont le troisième « Politique du conte » est en préparation. Si cette recherche s’inscrit dans une tradition et une équipe grenobloise, la problématique que j’esquisserai ici est toutefois celle qui m’intéresse plus particulièrement – et elle n’engage nullement la responsabilité de mes collègues.

33) Mon propos d’aujourd’hui sera très/trop théorique et très/trop général : je ne vais pas parler de poétique, mais essayer de poser quelques axes d’un cadre anthropologique et politique au sein duquel des questions de poétique pourraient, je l’espère, prendre un sens nouveau. J’espère ne pas sembler trop hors de propos à l’égard des questions plus précises de poétique posées dans ce colloque, mais ici aussi, j’utiliserai comme bouclier l’annonce faite par les organisateurs, qui nous invitaient à ne pas nous « nous en tenir au seul récit et à son “discours”, mais à considérer aussi ses propriétés et les intentions des romanciers », ce qui « oblige à prendre en compte les rapports dialogiques des fictions à leurs contextes et la dimension historique et pragmatique des singularités narratives repérées » (je souligne). C’est de ces propriétés, et de leur dimension historique et pragmatique que j’aimerais parler aujourd’hui.

44) Plus nous parlons et réfléchissons sur ces questions à Grenoble, plus nous sommes convaincus que le livre de Jean-Paul Sermain, Métafictions, est appelé à jouer un rôle central dans la manière dont ces questions sont aujourd’hui à poser. Puisque l’auteur est présent ici, je vais en profiter pour orienter mon propos vers des points de convergence et de divergence avec les thèses de Métafictions.

5J’entre enfin en matière, qui portera d’abord sur la notion d’expérimentation, puis sur une confrontation entre la notion sermanienne de « métafiction » et la notion lyotardienne de « métarécit », avec pour arrière-fond la catégorie de « noo-politique » proposée récemment par le sociologue Maurizio Lazzarato.

6Notre projet se propose d’abord de recadrer quelque peu l’approche de la notion d’expérimentation littéraire. À mi-chemin et à égale distance entre le modèle (hétéronomique) de l’expérimentation scientifique et le jeu de la combinatoire poéticienne (endogamique) des formes littéraires, il s’agira de repérer comment un certain nombre de récits produits à l’époque des Lumières impulsent des mouvements d’innovation qui sont à la fois autonomes en ce qu’ils reposent sur le libre jeu de la fiction littéraire et qui ont toutefois des virtualités exogamiques en ce qu’ils font déboucher l’invention littéraire sur un dépassement des modes de pensée alors recevables (dans le domaine scientifique comme dans « la façon commune de penser » ce qu’est un être humain, une société, la « réalité » naturelle, etc.).

7Pour le dire de façon moins abstraite, il semble qu’on ait jusqu’à présent surtout identifié la notion d’expérimentation à travers quatre figures :

8(a) celle de l’expérimentateur scientifique proprement dit, qui met en place un dispositif matériel dont il recueille, publie et théorise les données empiriques ;

9(b) celle du philosophe analyste qui réfléchit sur les données que lui fournit l’expérimentateur, les critique ou les systématise, voire en critique les modes de production ou de collection (comme le fait Diderot dans la Lettre sur les aveugles) ;

10(c) celle du philosophe fictionnant qui décrit une expérience de pensée irréalisable dans la pratique, mais porteuse d’une consistance référentielle propre, substituable à l’observation empirique comme attestation de réalité (tels que l’illustreraient Condillac ou Bonnet imaginant une statue, Rousseau décrivant le développement de son Emile, ou encore Rousseau faisant le tableau de la nature humaine à travers « l’anthropologie narrative » que Martin Rueff dégage de l’ensemble de son oeuvre) ;

11(d) celle du littérateur métafictionnant qui joue avec les formes narratives et les codes génériques pour varier et moduler à l’infini la construction de ses récits, mais qui, contrairement au philosophe ou au scientifique, ne prétend pas déboucher sur une vérité nouvelle – son éventuel « message » consistant essentiellement en une mise à distance critique de toute prétention à la vérité. Telle me semble être la thèse générale sous-jacente au livre de Jean-Paul Sermain (qu’il inscrit lui-même dans la lignée des travaux de René Démoris) : les métafictions participent d’une politique du soupçon qui cultive une hygiène intellectuelle se méfiant de tout discours qui ferait le geste de se fonder sur une réalité référentielle garante de vérité.

12Notre recherche visera à ajouter à cette galerie un cinquième portrait, celui que je propose d’appeler l’« expérimentateur noo-politique ». Il se définira par le fait de solliciter les propriétés de ce que Thomas Pavel appelle les mondes saillants, à savoir le fait que les univers fictionnels peuvent répondre à des lois différentes de celles qui régissent le monde naturel (et inclure des chimères comme un cheval ailé, une licorne, une sirène ou, dans la France du XVIIIe siècle, une démocratie, un athée vertueux ou l’égalité des sexes). Comme l’expérimentateur scientifique, l’expérimentateur noo-politique créera des dispositifs, des assemblages de propriétés et de dimensions, mais avec cette différence cruciale que la réalité observable ne fournit (encore) aucune donnée attestable de tels dispositifs. Comme le philosophe fictionnant, il mènera son expérience d’écriture sous la direction d’une consistance immanente au monde fictionnel, mais celle-ci ne fera plus référence aux lois connues du monde donné, mais à des lois inouïes d’un monde imaginable. Comme le littérateur métafictionnant, il se laissera emporter par le jeu des formes fictionnelles et narratives, mais on voudra voir en lui davantage qu’un jongleur de catégories narratologiques introduisant un soupçon généralisé sur toute prétention à la vérité : l’expérimentation (proprement) littéraire participera chez lui d’une entreprise de production d’une nouvelle vérité référentielle, du frayage d’un nouveau monde possible forçant les limites du monde actuellement donné.

13Il s’agira toutefois d’une vérité paradoxalement référentielle, puisqu’elle ne pourra se référer à aucune réalité existante, attestable dans le monde connu de l’époque, mais visera une réalité virtuelle, une réalité possible, qu’il s’agit de faire advenir, une réalité de laquelle on donne une image encore fictive dans l’espoir que cette image fictive permettra de lui donner une existence matérielle. Pour cet expérimentateur noo-politique, l’expérimentation par la fiction littéraire sera un moyen non seulement de se démarquer des codes de représentation en vigueur, comme le montre bien Métafictions, mais aussi, voire surtout, de constituer des agencements transformateurs de la réalité : comme pourrait l’illustrer l’exemple de romancières comme Françoise de Grafigny ou Isabelle de Charrière, la fiction littéraire permet à toute une revendication proto-féministe d’accéder à un dicible qui constitue une voie d’accès au domaine du réalisable. L’expérimentation narrative pourra ainsi déboucher sur une expérimentation pragmatique (analysable en termes d’effets sur le lecteur) et sur un horizon d’expérimentation politique (analysable en termes d’effets sociaux).

14Le caractère « paradoxalement référentiel » que je viens de souligner dans le travail de mon littérateur noo-politique recoupe bien entendu la catégorie du « projet » dont Jean-François Lyotard faisait le caractère définitoire de la modernité. On se souvient peut-être que Lyotard définissait l’époque « moderne » parle fait de fonder la légitimité des institutions et des pratiques sociales non plus dans un mythe, faisant référence à « un acte original fondateur », mais dans un projet, soit dans « un futur à faire advenir, c’est-à-dire dans une Idée à réaliser » (idée de liberté, de « lumière », de socialisme, etc.). On se souvient aussi qu’il proposait d’appeler métarécits ces schèmes légitimateurs auxquels souscrivait la modernité, et qu’il définissait l’ethos postmoderne comme une « incrédulité à l’égard des métarécits ».

15En dépit des évidentes résonances de surface, un rapprochement entre les métafictions de Jean-Paul Sermain et les métarécits de Lyotard est bien entendu problématique et discutable : contrairement aux « métafictions » sermaniennes, les « métarécits » lyotardiens ne sont pas des textes, mais des schèmes de pensée ; l’un des deux fait de la théorie littéraire, l’autre de la spéculation philsophico-politique ; etc. Cette confrontation permet toutefois de repérer un problème historique sur le statut pragmatique et anthropologique du récit au sein du mouvement des Lumières. Métafictions tend à peindre les fictions produites au dix-huitième siècle comme des opérateurs de suspicion généralisée, comme des vecteurs d’incrédulité face à toutes les fables dont peut se nourrir la vie sociale. Lyotard nous peint au contraire les Lumières (et à travers elles toute la « modernité ») comme une époque de crédulité renouvelée, qui ne dénonce les fables superstitieuses des mythes (tournés vers une référence passée) que pour mieux s’aveugler dans ces fables nouvelles qui prennent les formes du discours scientifique, de la dialectique philosophique et du programme politique (tournés vers un projet de monde à faire advenir).

16Je ne doute pas une seconde du fait que Jean-Paul Sermain ait une connaissance plus riche et plus précise de la production intellectuelle du dix-huitième siècle que n’en avait Jean-François Lyotard... Il ne s’agit bien entendu pas de décider qui des deux a raison, mais d’essayer de penser le décalage apparent entre leurs approches, qui me semblent également légitimes et éclairantes. On pourrait en tirer une série de questions du genre : les fictions narratives produites entre 1670 et 1800 inscrivaient-elles déjà la critique « postmoderne » des Lumières au coeur de la période que l’on identifie avec la naissance de la modernité ? ou alors : est-ce notre propre positionnement postmoderne qui nous pousse à interpréter les fictions du XVIIIe siècle comme participant d’une politique du soupçon ? ou encore : contrairement aux simplifications dans lesquelles sont tombés certains émules de Lyotard, ne faut-il pas complexifier et raffiner le « métarécit des Lumières » pour réinscrire en son coeur la dimension auto-critique métafictionnelle dégagée par les analyses de Jean-Paul Sermain ?

17Je laisse ces questions de côté pour en arriver à ce qui m’intéresse vraiment dans une telle confrontation. Le problème pratique pour nous tous se résume en fait à une question simple : comment continuer à travailler sur « la littérature d’imagination » des Lumières après avoir lu Métafictions, qui apporte d’un coup sur ce corpus une intelligibilité aussi lumineuse que décourageante pour ceux dont c’est le gagne-pain que de continuer à l’étudier ? Or je crois avoir (peut-être) trouvé quelque chose qui pourrait encore rester à faire...

18Métafictions pense remarquablement bien la solidarité entre fiction et soupçon, mais ce faisant il ne me paraît décrire qu’une seule des deux faces de la dynamique anthropologique dont participent les récits des Lumières. Il reste donc peut-être du travail à faire pour penser (différemment) les modalités nouvelles d’adhésion par lesquelles passent les métarécits de la modernité. Et c’est par là que nous pouvons revenir, par une voie détournée, à la problématique de l’expérimentation.

19Comme l’a souligné Jean-François Perrin dans nos discussions grenobloises, une expérience, ça peut commencer par se faire tout seul dans son laboratoire ou dans sa tête, mais ça n’a de statut effectif que par le fait de se publier : qu’il s’agisse de Pascal invitant des notables au Puits de Dôme pour les convaincre de la validité de ses théories barométriques, de Charcot mettant en scène des hystériques dans des conférence publiques ou des procédures de publication et de validations propres aux pratiques scientifiques actuelles, l’expérimentateur rencontre toujours sur son chemin un moment où il doit trouver des modalités d’action sur les cerveaux de ses contemporains. L’expérimentation n’a de valeur sociale qu’à partir du moment où elle devient montrable et où cette monstration suscite chez les spectateurs/lecteurs un mouvement d’adhésion. C’est à ce prix qu’elle contribue à produire des possibles inédits. Elle participe dès lors d’un double mouvement, qui comporte certes un pan de critique du donné (de ses limites et de ses fables), mais qui dégage également un autre pan de positivité projective ou, pour le dire autrement, de création d’être : un être appelé à advenir à l’existence à travers son évocation virtuelle (par l’entremise de la chimère fictionnelle). Pour reprendre nos exemples : la diffusion des expériences barométriques porte en elle la possibilité d’une crédulité future envers les prévisions météorologiques ; la théorisation et la mise en scène des hystériques portent en elles la croyance en un traitement possible de leur « maladie ». Que les prévisions météo soient, trois siècles et demi après Pascal, encore souvent trompeuses, ou que l’hystérie soit vue comme le symptôme d’une idéologie misogyne (plutôt que comme une catégorie nosographique satisfaisante) ne change rien à l’affaire : la publication de l’expérimentation agit sur les cerveaux en produisant des effets d’adhésion, des croyances et des crédulités nouvelles qui donnent forme à l’avenir.

20Au sein de ce que foucaldisme contemporain a baptisé « biopouvoir » ou «biopolitique», le sociologue Maurizio Lazzarato a récemment proposé d’appeler noo-politique « les nouvelles relations de pouvoir qui prennent comme objet la mémoire et son conatus (l’attention) ». A travers « l’essor des dispositifs technologiques d’action à distance » de cerveaux à cerveaux (essor qui a commencé depuis longtemps avec la diffusion croissante des livres, puis des journaux, puis avec le développement des « réseaux hertziens, audiovisuels, télématiques et [la] constitution de l’opinion publique, de la perception et de l’intelligence collective »), la noo-politique opère « la modulation des flux de désirs et de croyances, et des forces (la mémoire et l’attention) qui les font circuler dans la coopération des cerveaux ».

21Concevoir le producteur de fictions comme un expérimentateur noo-politique nous invite donc à penser son travail comme une forme de modulation des flux de désirs et de croyances qui circulent dans une société et infléchissent son devenir. Or malgré le jargon parfaitement anachronique à travers lequel je cadre mon propos, les écrivains des Lumières avaient une conscience très vive et de cette dimension noo-politique de leur travail et des mécanismes d’adhésion qu’elle implique.

22Je conclurai cette esquisse à travers un retour (enfin) à des textes littéraires et à travers une comparaison dont je sais qu’elle ne fait nullement justice à la complexité et à la subtilité du propos développé par Jean-Paul Sermain, mais que j’utilise néanmoins ici pour aller vite, en guise presque de caricature.

23En lisant Métafictions, il m’a semblé qu’au-delà des années visées par la périodisation de l’ouvrage (1670-1730), un auteur qui illustrerait emblématiquement les multiples niveaux du soupçon analysés par le livre serait Fougeret de Monbron. Il pourrait représenter un métafictionneur idéal en ceci qu’il parviendrait à tout dissoudre dans la critique d’une fable généralisée qui auto-détruirait jusqu’aux assises idéologiques de sa propre position. Dans ses contes pseudo-orientaux, dans ses récits pseudo-érotiques, il parle à partir de la position bien définie par son Cosmopolite qui se permet de tout critiquer, de dénoncer les fausses apparences de tout, parce qu’il est prêt à avouer « ne tenir à rien ». Les discours qui sortent de sa plume participent tous d’un « paradoxe », d’une « polémique » et d’une « ironie » absolument universelles (pour reprendre les termes-clés de la métafictionalité sermanienne).

24Or il me semble que si l’on met les écrits de Fougeret de Monbron en parallèle avec un roman comme Jacques le fataliste, on voit se dégager les éléments d’un contraste qui peut commencer à faire sentir le travail propre de l’expérimentateur noo-politique. Apparemment, l’anti-roman de Diderot représente l’illustration la plus évidente des procédures réflexives de la métafiction (dans son sens fort sermanien et dans son acception plus vague de récit sur le récit). Je passe sur cette démonstration trop évidente. Ce qui m’intéresse, c’est qu’on peut faire une lecture de Jacques le fataliste qui voie en lui bien plus qu’une dénonciation des illusions du genre romanesque, des absurdités des hiérarchies sociales et des apories de la métaphysique. Je n’ai pas le temps de le démontrer ici, mais j’en profite pour faire de la publicité pour mon prochain livre qui essaiera d’apporter des pièces à ce dossier : la fiction d’un Jacques fataliste est un moyen pour Diderot de faire une expérience noo-politique. Les multiples niveaux d’écriture mis en scène par le texte à travers ces agencements toujours collectifs que sont le narrateur, Jacques, Mme de la Pommeraye, l’abbé Hudson, etc. constituent le moyen le plus direct – non seulement de critiquer le donné (« la réalité »), le donnant (les modes de narration et de représentation) ainsi que leurs fables respectives – mais aussi de projeter quelques-unes des implications pratiques d’une ontologie fataliste (on dirait aujourd’hui : spinoziste), ontologie à laquelle Diderot essaie de promouvoir l’adhésion.

25Par delà le cas particulier de Jacques, c’est dans toute son oeuvre, et non seulement à travers l’Encyclopédie, que Diderot s’attache à « changer la façon commune de penser » : c’est chacun de ses textes qui est conçu comme une machine de capture de l’opinion, comme une « modulation des flux de désirs et de croyances et des forces (la mémoire et l’attention) qui les font circuler dans la coopération des cerveaux ». Aussi ironiques et paradoxaux que puissent être et Jacques et le narrateur qui nous parle de Jacques, l’expérimentation littéraire dont ils participent est inséparable d’un projet positif, qui vise à frayer la possibilité de faire advenir dans le réel ces chimères qu’étaient alors (et que sont peut-être voués à demeurer) un athée vertueux et une démocratie. En jouant ici encore sur les échos de surface, on pourrait dire que l’ironie de la métafiction anti-romanesque de Jacques a comme face positive et constructiviste le personnage de l’Ironiste (athée, ou du moins agnostique, et démocrate) dans lequel le philosophe Richard Rorty propose que nous nous reconnaissions aujourd’hui.

26Je résume et conclus rapidement en trois points :

271) S’il reste quelque chose à dire après la publication de Métafictions, je suggère d’aller le chercher du côté de la face d’adhésion qui constitue l’envers constructiviste du soupçon critique développé par le roman post-quichottien envers toute fable.

282) Cela nous invite à relire les romans et fictions d’Ancien Régime à partir d’un questionnement noo-politique qui aborde la poétique narrative du point de vue des «modulation des flux de désirs et de croyances et des forces (la mémoire et l’attention) qui les font circuler dans la coopération des cerveaux ».

293) La fiction littéraire apparaît dans ce cadre comme une forme particulière d’expérimentation dans le travail social de frayage des possibles. La « féerie » littéraire est ainsi à concevoir entre la « fée » du fata (les virtualités quasi-magiques de « ce qui a été dit »), et le mode du « faire » propre à la poiésis (qui d’un coup de baguette signifiante peut transformer le réel en y ouvrant des perspectives inédites). Comme le suggère justement l’appel à contribution de ce colloque, c’est bien à la jointure entre poétique et pragmatique qu’il me semble utile de travailler dans les années qui viennent.