Essai
Nouvelle parution
Cécilia W. Francis, Gabrielle Roy, autobiographe. Subjectivité, passions et discours

Cécilia W. Francis, Gabrielle Roy, autobiographe. Subjectivité, passions et discours

Publié le par Julien Desrochers

Ouvrage en attente de rédacteur pour compte-rendu dans la revue Acta Fabula ( ajout février 2007)

FRANCIS, Cécilia W., Gabrielle Roy, autobiographe. Subjectivité, passions et discours, Sainte-Foy, Presses de l'Université Laval (coll. "Intercultures"), 2006, 450 p.

 

ISBN : 2-7637-8330-9

 

« Passion de vie, passion de récit », voilà les enjeux essentiels sous-tendant la délicate restitution littéraire du soi à laquelle se livre Gabrielle Roy dans sa célèbre autobiographie posthume. Consacrée à l’analyse de la dimension passionnelle du récit de vie, dernière œuvre qu’a laissée la romancière québécoise, francophone nord-américaine, l’étude de Cécilia W. Francis révèle combien l’évocation poétique de cette pulsion du vivant s’investit d’une profonde ambivalence.


Inscrit dans le prolongement des travaux consacrés à la sémiotique des passions, inaugurée par Algirdas J. Greimas, cet ouvrage constitue un apport singulier au domaine de la discursivité royenne. Il fait converger l’autobiographe et le théoricien autour d’une question fondamentale: l’impérieuse irruption de la vie, du corps, des souvenirs, des émotions et des passions, surgie au terme d’une entreprise de création que l’on croyait pouvoir maîtriser. La valeur de l’investigation proposée réside dans les interrogations qu’elle soulève. Comment un effet de sens extrêmement diffus, la tonalité intimiste, se transmet-il par le langage ? Pourquoi cette œuvre littéraire, si lisse de facture, est-elle traversée de tension, habitée de tourments qui souvent n’atteignent que le seuil du dicible ? Et comment expliquer que cette modulation entropique demeure intrinsèquement rattachée à la transcendance par la joie, à la propension du sujet à se tourner vers le monde et autrui ?

L’analyste remonte le fil des noeuds de tensivité qui imprègnent cette démarche intimiste remarquable et offre un nouvel éclairage sur l’inhérente cyclothymie royenne, à la racine du tiraillement affectif opposant la « détresse » à l’« enchantement ». Ce faisant, elle élabore une approche méthodologique inédite pour l’examen de la prose autobiographique et de la subjectivité en littérature.

 

Cécilia Wiktorowicz Francis est professeure agrégée au Département de langues romanes de l’Université Saint-Thomas (Frédéricton, Canada). Ses travaux de recherche portent sur les littératures québécoise et francophone, la sémiotique européenne et les théories interculturelles de l’énonciation.

 

Table des matières :

 

Remerciements

Sigles employés pour désigner les ouvrages cités de Gabrielle Roy

Avant-propos

Introduction
La dimension pathémique chez Gabrielle Roy
Les passions et l'autobiographie
Les passions et leur héritage culturel
La sémiotique des passions
L'écriture intimiste. Vecteur du sensible chez Gabrielle Roy
Lire Gabrielle Roy aujourd'hui
Un canevas analytique

CHAPITRE I
Le statut discursif du passionnel dans l'autobiographie
Autour du sujet : du poststructuralisme à la sémiotique des passions
Sujet et geste autobiographique : « conquérir l'unicité du soi »
Phénoménologie et préconditions de la signification
Présence phorique et mise en discours du sensible
Énonciation et pathémisation discursive
Morphologies du passionnel : la modalisation et l'aspectualisation
Les modulations du devenir tensif
La praxis énonciative. Vers une taxinomie sociale des passions
Le sujet potentiel de la passion

CHAPITRE II
Configuration modale et écriture autobiographique
Le macro-dispositif de la culpabilité

Vers les traces discursives de la culpabilité
La configuration de la culpabilité
Le schéma pathémique de la culpabilité
L'éveil affectif : le mérite
Naître à la redevance. La passion au nom du collectif
Contestation et désir. Émergence d'une passion autonome
Circularité et substitution : la valeur paradigmatique de l'autobiographie
La sensibilisation du sujet coupable
Remords et réparation : le sujet disposé
« Tout ce qui est écrit est fausseté ». En amont de la véridiction
De la fausseté au secret
Du théâtre à l'écrit. Le plaidoyer de Portia
De l'attachement filial à l'épreuve de l'amour romantique
Temporalité et valeur tensive du déplacement
La pathémisation. Vers une transformation identitaire
Le roman familial : s'acquitter du devoir manqué
De la fausseté à la vérité : le règne du merveilleux
Franchir le seuil des Perfect
La modalité aléthique recatégorisée
L'herbier : figure concentrante de la donation
La pathémisation royenne : stabilité tensive et retournement
L'émotion. Le langage du corps
De la séduction amoureuse à la séduction du littéraire
L'envers de la passion politique
Vers une potentialisation identitaire
La moralisation ou l'autoportrait posé
La véridiction du discours autobiographique
Le schéma énonciatif du fonctionnement passionnel

CHAPITRE III
Figurativisation, perception et passion
Vers la justesse : forme de vie de l'autobiographie royenne

Figurativisation et passion
Énonciation, perception et schématisation
Expérience perceptive figurale
Vers une schématisation figurale de l'autobiographie
Un bonheur entravé
Le figuratif et la dimension esthétique
Forme de vie et esthésis
« L'enivrante matinée de Tchekhov »
Perception et représentation plastique
Interaction et représentation théâtrale
Du théâtre à l'écriture : le rôle de l'observateur délégué
Perception, esthésis et discours autobiographique
Vers une gestalt originaire
La perception visuelle. Le paradigme du regard
Le regard réfléchi
Le regard capturé
Paris. Espace visuel et tactilité : l'émergence du moi créateur
Une forme de vie inventée
Londres : de la capture visuelle à la capture acoustique
Montréal : l'actualisation de la justesse
La Provence. De la capture à la libération
La valeur métaénonciative de la garrigue provençale
Retour sur la schématisation figurale de l'autobiographie royenne

CHAPITRE IV
Énonciation autobiographique
Autour de la nostalgie : de la confession à l'autoportrait

Vers la nostalgie royenne
L'observateur : discours, passion et point de vue
Énonciation, espace tensif et typification du passionnel
La communication énonciative
Le point de vue comme axe de persuasion énonciative
De la nostalgie à la confession et à l'autoportrait
Vers le discours confessionnel royen
Du sujet autobiographique au sujet confessionnel
L'apitoiement en tant que vecteur de culpabilité
En deçà de l'image admirative de soi
Du /paraître/ à l'/être/ : l'émergence du sujet confessionnel
La schématisation tensive du discours confessionnel
Le difficile portrait de soi
La relation père-fille : d'une affection silencieuse à la révélation
La relation sororale. Au bout de la mémoire affective
Clémence, « cette peine inépuisable »
La présence de l'Autre dans la proximité de la mort
Vers les sources de la nostalgie Le temps qui m'a manqué
Fluidité affective/fluidité mémorielle
Du deuil au souvenir et au don maternel
Schéma et moment d'unité discursive
Le contexte culturel de la culpabilité
La valeur idiolectale de la passion royenne

Conclusion
Les passions et leurs enjeux structurels
La ré-énonciation culturelle des protoformes tensives