J.-P. Aygon, Ut scaena, sic uita. Mise en scène et dévoilement dans les œuvres philosophiques et dramatiques de Sénèque
Jean-Pierre Aygon, Ut scaena, sic uita. Mise en scène et dévoilement dans les œuvres philosophiques et dramatiques de Sénèque, Paris, De Boccard, coll. «Chorégie», 2016, 376 p.
- ISBN 978-2-7018-0425-5
- Support Livre broché
- Format 15,5 x 24,5
- Num. dans la collection 3
En tant que philosophe, Sénèque s’est beaucoup intéressé au monde du théâtre, se préoccupant avant tout de la réception des spectacles, souhaitant de la part du public une écoute vigilante et active, dotée d’une dimension éthique. Très hostile à la pantomime, indulgent à l’égard du mime ou de la comédie, il mentionne toujours la tragédie avec respect.
Animé par un idéal de lucidité, il émaille ses traités et dialogues d’images empruntées à la scaena, conçoit et dramatise, dans le cadre de la pensée stoïcienne, une « mise en scène du moi ». Plaçant sous les yeux du lecteur des figures apotropaïques ou séduisantes, il décrit ou démasque avec finesse les mouvements de l’âme, que l’on observe en soi, ou chez les autres, dont les visages et les attitudes doivent être scrutés avec acuité.
Ce point de vue fournit une clef interprétative pour ses tragédies, à condition de prendre au sérieux leur nature véritablement théâtrale, et d’avoir à l’esprit les images d’une mise en scène engendrées par le texte : la gestuelle et les silences, entre autres, fournissent des indices décisifs, quoique parfois ténus pour un lecteur moderne.
Ces images donnent à voir et à penser, en accentuant l’ironie théâtrale et en révélant combien la dissimulation, l’ambiguïté et l’aveuglement sont les traits dominants de la plupart des protagonistes. Sénèque soulève le masque des faux-semblants, analyse avec minutie et subtilité les mécanismes passionnels – conscients et inconscients – à l’origine de la violence et des crimes les plus horribles, faisant appel avec brio à toutes les ressources de la rhétorique, de la poétique et du langage théâtral.
Grand dramaturge, il préserve la complexité de ses personnages, en accord profond avec le stoïcisme mais sans didactisme moralisateur, à l’instar d’un Shakespeare – qui s’est d’ailleurs considérablement inspiré de lui.
Sommaire
Introduction
Première partie : Le théâtre et les spectacles dans Les œuvres philosophiques de Sénèque
Chapitre premier : jugements sur le théâtre et les autres formes de spectacle
1. Critique du théâtre et des spectacles comme distractions pour les ignorants (stulti)
2. Références neutres : relative légitimité des distractions en général
3. Intérêt de Sénèque pour le théâtre stricto sensu
4. Conclusion
Chapitre II : les images empruntées au théâtre
1. Questions préliminaires
2. Les images théâtrales chez les philosophes avant Sénèque
3. Sénèque dénonce diverses formes de tromperie
4. La bonne (vs la mauvaise) façon de jouer son rôle dans le théâtre de la vie
5. L’art de lire les visages
6. Conclusion
Chapitre III : théâtralité de l’écriture de sénèque
1. Dialogisme, polyphonie et théâtralité
2. Mises en scène de véritables personnages de théâtre
3. Exemples dramatisés
4. Conclusion
Chapitre IV : les mises en scène du moi : le théâtre de la conscience
1. Sénèque se met en scène lui-même
2. Mise en scène d’une relation privilégiée entre Sénèque et ses interlocuteurs
3. Formes et fonctionnement du théâtre de la conscience
4. Bilan : théâtralité et authenticité du moi
Conclusion de la première partie
Seconde partie : Les tragédies de Sénèque : un théâtre à grand spectacle où les âmes se dévoilent
Chapitre V : des tragédies pour le pulpitum : effets scéniques
1. Des tragédies pour la scène ou la recitatio ?
2. Représentations à grand spectacle et thaumasia
3. Association d’effets visuels et sonores dans les tragédies de Sénèque
4. Conclusion
Chapitre VI : agitur res in scaenis : l’action se déroule sur la scène
Méthode et tableau synoptique
1. Faits supposés se produire sur scène (type 1)
2. Faits qui se déroulent hors de la scène (type 2)
3. Récits dont les événements sont rapprochés de la scène (type 2 bis)
4. Faits représentés sur la scène puis décrits par un personnage-relais (type 1 bis)
5. Conclusion
Chapitre VII : renversement tragique de la grandeur épique
1. Typologie formelle
2. Fonctions des narrations épiques dans l’économie des tragédies
3. Conclusion
Chapitre VIII : un théâtre du dévoilement des âmes
1. Jeux de masques dans les tragédies
2. Retournements soudains de personnages passionnés
3. Ambiguïté des personnages
4. Mise en scène d’un cas emblématique de division du moi : Médée
5. Conclusion
Conclusion
Annexe
Textes et traductions
I. Œuvres en prose
II. Tragédies
Bibliographie
Indices