Acta fabula
ISSN 2115-8037

2018
Février 2018 (volume 19, numéro 2)
titre article
Arnaud Verret

Au‑delà des –ismes : pour un naturalisme réactualisé

Céline Grenaud‑Tostain, Olivier Lumbroso (éds), Naturalisme. Vous avez dit naturalismes ?, Paris : Presses Sorbonne Nouvelle, 2016, 220 p., EAN 9782878546897.

1Aboutissement d’un colloque intitulé « Héritages naturalistes » (Paris, 11‑13 juin 2015), le présent ouvrage reprend, sous forme de recueil d’articles, la plupart des communications qui ont alors été proposées. Composé de deux‑cent‑vingt pages, il se divise en trois parties principales précédées d’un avant‑propos et d’un prologue et suivies, en fin de volume, d’un index et d’une notice sur les auteurs. Chaque partie débute par un résumé qui permet d’entrevoir avec clarté le lien existant entre les différents exposés.

2La problématique qui sous-tend le livre est explicitée dès les premières pages rédigées par les deux éditeurs, Céline Grenaud‑Tostain et Olivier Lumbroso. Elle est à la fois simple et ambitieuse : quel est l’héritage du naturalisme et en quoi ce legs permet‑il de le revisiter pour en avoir une connaissance plus juste ? Un constat, double et paradoxal, motive cette interrogation : on ne cesse en effet de vouloir faire sortir les grands auteurs du naturalisme — dans lequel ils se sont pourtant reconnus — pour montrer qu’ils le dépassent, en même temps qu’on ne cesse de chercher d’autres représentants de ce moment de la littérature pour redécouvrir ceux que l’on surnomme les « petits » ou identifier ceux que l’on baptise les « néo‑naturalistes ». D’un côté le besoin se fait ressentir d’échapper à un estampillage réducteur, de l’autre de se raccrocher à des dénominations rassurantes.

3Dès lors, en examinant « l’intérêt de la notion de “naturalisme” en tant que concept classificateur, appliqué non pas à un écrivain particulier, mais à un groupe d’écrivains, de langue et de culture différentes » (p. 7), il s’agit de questionner l’idée même d’étiquette véhiculée par le suffixe –isme et la vision stéréotypée qui en découle le plus souvent pour en dégagertoute la souplesse et la variété. L’objectif est ainsi de remettre un double modèle en cause : celui d’un courant littéraire à la définition figée et, dans le cas du naturalisme, celui écrasant de l’œuvre de Zola.

Du naturalisme à des naturalismes : héritages, topoï & richesses insoupçonnées

4Pour répondre à cette problématique, plusieurs pistes d’étude sont envisagées. La première constitue le prologue de l’ouvrage. Sous‑titrée « Naturalisme ou naturalismes ? Les dictionnaires à l’épreuve de l’héritage patrimonial » (p. 17‑53), elle porte l’intérêt sur le genre du dictionnaire, œuvre de synthèse « méta‑naturaliste » par excellence (p. 9) qui n’en présente pas moins des risques majeurs dans la transmission des connaissances. S’il est composé rapidement et sans scrupule, le dictionnaire fabrique en effet des canons littéraires là où il y a à lire des œuvres avec leur singularité, et ces canons se figent et se transmettentsous forme de représentations immuables. Si, en revanche, il est écrit avec exigence, il est un moyen privilégié de prouver la variété d’un courant littéraire, des œuvres et des acteurs qui en égrènent la chronologie jusqu’à sa réception et sa compréhension ultérieures.

5Après une première communication de Henri Mitterand qui se présente comme « quelques sommaires impressions de lecteur » (p. 20) et souligne la complémentarité des dictionnaires sur le naturalisme (« Au risque du dictionnaire »), trois communications en fournissent l’illustration1. Dans « Le dictionnaire du naturalisme », René‑Pierre Colin présente d’abord l’ouvrage qu’il a mené seul2, où le plaisir de la liste, de la collection personnelle le dispute à la plus grande science et la rigueur intellectuelle. Son travail, d’une subjectivité totale avouée, aborde sans tabou tous les sujets du naturalisme et, avec un plaisir non dissimulé, fait la part belle à ses auteurs oubliés, ses acteurs méconnus comme à ses figures les plus célèbres si bien que son dictionnaire ne se consulte pas, loue H. Mitterand, mais se lit (p. 20). La conception et la méthode empruntées par Colette Becker et Pierre‑Jean Dufief est tout autre (« Pourquoi un Dictionnaire des naturalismes ? »). Pour composer leur Dictionnaire des naturalismes3, ils se sont en effet entourés de soixante‑sept chercheurs du monde entier et, même s’ils ne prétendent pas à l’exhaustivité, le résultat de leur travail, en plus de quatre‑cent‑cinquante notices, y confine néanmoins. Partant du principe que de leur vivant déjà, les représentants du naturalisme élargissaient ce mot au‑delà de la seule littérature, ils ont voulu montrer que la diversité du naturalisme se prolongeait a fortiori dans la postérité et complexifiait plus encore la définition qu’on en pouvait donner. « Il faut, écrivent‑ils, ne pas le réduire à Zola, et à un Zola faux » (p. 34). D’où le pluriel de leur titre : on ne peut parler de naturalisme au singulier puisque celui‑ci est avant tout une volonté de bousculer les codes littéraires, une vision du monde propre à un écrivain et non une théorie se résumant à une définition commune. Ce constat est d’autant plus vrai si l’on intègre les contextes étrangers au point de parler d’un naturalisme‑monde (p. 38) comme le prouve le projet de Kosei Ogura qui porte cependant uniquement sur Zola (« Un Guide Zola en japonais »)4. Son guide, qui à défaut d’un véritable dictionnaire se veut un ouvrage modeste et limité pour présenter ce seul auteur à un public qui ne le connaît pratiquement pas, analyse tour à tour le synopsis de ses principales œuvres, ses thèmes littéraires et esthétiques de prédilection, les notices biographiques des acteurs de sa vie avant de se concentrer sur l’histoire de sa réception au Japon.

6La première partie, « Les héritages : filiations et désaffiliations », est ensuite consacrée aux mécanismes de filiation, reconnue ou inavouée, chez des auteurs qui se retrouvent dans un héritage naturaliste ou non. Parce qu’il est l’objet de sélections, de silences ou de personnalisations, le processus est plus subtil qu’il n’y paraît, souvent surprenant et permet d’« envisager le naturalisme à travers le prisme de la différence » (p. 56). Ainsi Renaud Oulié interroge‑t‑il l’évolution littéraire d’un dissident dans « Léon Hennique est‑il un dissident du naturalisme ? » pour montrer que le patrimoine naturaliste est paradoxalement plus présent dans la deuxième partie de la carrière de cet auteur où il semblait pourtant s’être détourné du modèle zolien. Béatrice Laville, dans « Les naturistes, des héritiers ? » analyse la convergence entre l’écriture des Évangiles et la réflexion d’auteurs comme Saint‑Georges de Bouhélier ou Maurice Le Blond dans leur hymne à la vie dont l’homme est la vivante allégorie au risque de réduire le lecture du maître de Médan à une vision bucolique, loin de toute modernité. Marie‑Ange Fougère complète ce tableau de l’héritage zolien dans « Une postérité naturaliste inavouable : le roman psychologique » où, dépassant l’opposition stéréotypée entre le roman psychologique et un Zola réduit à l’étude physiologique des êtres, elle examine, à travers les exemples de Boylesve et Estaunié, la manière dont des auteurs a priori diamétralement opposés, savent en toute discrétion admirer et reprendre, consciemment ou non, une part de la méthode ou des thèmes littéraires qui leur convenaient : l’un se veut observateur mais non expérimentateur, historien et poète, concevant le roman non comme une plate reproduction du réel mais comme un cadre magique où celui‑ci se reflète en un raccourci saisissant, rappelant par là la théorie de l’écran exprimée par le jeune Zola ; l’autre présente des types de personnages, des motifs, des trames narratives qui, contre toute attente, s’approchent de ceux du maître de Médan.

7La deuxième partie, « Métamorphoses et résonnances naturalistes en contextes », élargit le concept de « naturalisme‑monde » en ce qu’elle se focalise sur la réception du naturalisme à l’étranger et l’adoption de ses thèmes les plus chers. Mais au‑delà de réels faisceaux de convergence, aucun modèle de transmission ne prédomine là encore et à la singularité de chaque auteur s’ajoute celle de chaque aire géographique. En guise d’exemples, Aurélie Barjonet soumet, dans son article « Dans les pas de Jules Huret : l’enquête de Curt Grottewitz sur l’avenir de la littérature allemande (1892) », la particularité de la littérature germanique où le naturalisme n’est accepté que pour être mieux dépassé et remplacé par la figure du Dichter en se fiant davantage aux individus qu’aux écoles.Zaki Coussa, dans « L’émergence du naturalisme dans le monde arabe », pointe l’apparition tardive d’un naturalisme littéraire dans le monde arabe et l’importance du truchement de la traduction – du français directement ou via l’anglais – dans la connaissance des grandes œuvres. Kosei Ogura et Béatrice Desgranges approfondissent, quant à eux, le contexte asiatique en citant tour à tour le Japon et la Chine dans « L’héritage du naturalisme au Japon » et « Mo Yan, un naturaliste chinois ? ».

8La troisième et dernière partie, sans doute plus ambitieuse encore, élargit définitivement le sujet. Intitulée « Interactions et tensions : l’héritage critique du naturalisme au xxie siècle », elle questionne les intuitions, les visions du naturalisme sur l’évolution de la société. Dans sa méthode documentaire poussée à l’excès, le naturalisme ne fut pas qu’un mimétisme du xixe siècle mais aussi une sorte de préfiguration de l’avenir. Là résidait sa modernité et, autre façon de transmettre un héritage, nombre de ses thèmes ont survécu à son corpus. Pour preuve, Chantal Pierre et Sophie Guermès analysent dans le champ littéraire, d’une part la banalisation contre Zola de l’impératif d’empathie d’un écrivain vis‑à‑vis de ses personnages et sa généralisation dans la critique jusqu’à nos jours (« Un héritage naturaliste ? La querelle de l’empathie »), d’autre part la survivance du naturalisme dans la littérature contemporaine par le biais de la crise du roman que sa méthode a introduite avec Le Roman expérimental(« Ouvrir le champ des possibles naturalistes »). Dans le champ économique, Véronique Cnockaert rappelle l’écho existant entre les mécanismes de la consommation tels que décrits par Zola et les travaux des sociologues contemporains (« “L’économie du bonheur” dans Au Bonheur des dames »). Comme une exception confirmant la règle, Marion Glaumaud‑Carbonnier termine ce tableau en montrant que paradoxalement le naturalisme, surtout français, a manqué d’intuition face au sujet pourtant moderne du divorce auquel non seulement il n’a pas consacré de roman, mais dont il a même offert une vision conservatrice en se cantonnant à l’adultère là où il aurait pu prendre le contre‑pied de l’Église et défendre un autre modèle littéraire et social (« Le divorce, en dehors naturaliste »).Enfin, un article de Corinne Saminadayar‑Perrin, placé en fin de volume comme une conclusion à l’ensemble du travail présenté, aborde la diversité de l’œuvre de Zola sous l’angle du cycle historique (« Les Rougon-Macquart : une poétique cyclique de l’histoire ? »).

La facture de l’ouvrage : enjeux & limites de la démonstration

9Les points positifs de l’ouvrage sont certains, dans la forme comme dans le fond. Les articles proposés apparaissent d’abord, dans leur grande majorité, d’une lecture dense sans être compliquée : la présentation de l’œuvre de Mo Yan par Béatrice Desgranges en est sans doute l’exemple le plus éloquent en ce qu’en un domaine inhabituel à nombre de lecteurs – la langue et la littérature chinoises –, il fait montre à la fois d’une érudition incontestable et d’une vertu délassante appréciable dans un ouvrage de ce type5. L’article nous plonge dans les complexités de la traduction pour nous faire comprendre toute la difficulté à rendre compte du texte zolien et de ses subtilités dans une langue dont les mécanismes sont diamétralement opposés à la nôtre. Et il le fait avec des exemples probants, aussi récréatifs qu’instructifs.

10Plus généralement, chaque article possède cette valeur vivifiante nécessaire à un tel volume parce qu’il met en lumière des écrivains, des traducteurs, des éditeurs, des critiques souvent peu connus tant le naturalisme français occulte les autres avec en son sein, bien sûr, la figure de Zola. Ce dernier est au final assez absent des quelques deux‑cents pages proposées ici et les auteurs, visant avant tout la problématique de la transmission, ont réussi le pari de traiter du naturalisme non seulement en avançant d’autres noms, mais même en faisant la part belle à la singularité de leur sujet sans se cantonner à de grandes lignes communes dans lesquelles il était pourtant facile de tomber. Ainsi A. Barjonet aborde‑t‑elle un sujet typiquement allemand mais qui permet de bien saisir le devenir du naturalisme de l’autre côté du Rhin : la figure du Dichter que ne connaît pas la littérature française. Ainsi même les articles traitant du champ littéraire français se portent sur un auteur assez méconnu du groupe de Médan, Hennique, ou d’autres oubliés comme Estaunié et Boylesve.

11À les comparer tous, les sujets des seize communications sont donc variés mais, regroupés en des ensembles équilibrés, ils gardent une cohérence, une honnêteté6 et une efficacité évidentes quant à la problématique générale qu’ils permettent tous d’illustrer à leur façon. Dans ce cadre, la dynamique du volume est bien réelle et sa progression permet de prendre la mesure de l’ambition scientifique qui en est à l’origine : débutant, fort logiquement, avec des définitions et des classifications, l’ensemble des articles analyse le contexte littéraire français qu’il élargit ensuite à une échelle mondiale pour sortir in fine de la seule littérature et s’étendre aux grands sujets de société. Cette démarche équilibrée se retrouve même à l’intérieur des parties, celle consacrée au domaine étranger commençant par exemple par l’Allemagne pour finir par le Proche puis l’Extrême‑Orient. La méthode retenue pour répondre à la problématique apparaît alors comme la plus efficace : des exposés courts et très différents, mais toujours éclairants et complémentaires les uns des autres, parfois attendus, parfois surprenants7, pour prouver la diversité d’un courant littéraire et en définir ses différentes acceptions.

12Partant, la lecture de l’ouvrage peut aisément être fragmentée, faire l’objet de sélections, d’approfondissements, de connexions et s’adresser, au‑delà des spécialistes du naturalisme, à toute personne qui aimerait réfléchir sur la portée d’un courant artistique quel qu’il soit. Par exemple, l’article de Chantal Pierre revient sur la réception critique du naturalisme et, au‑delà, de tout texte ou film qui se veut un document humain. Il montre qu’aujourd’hui comme hier, on préfère moins interroger les sujets choisis que le regard porté par l’auteur sur ces sujets. Déjà du vivant de Zola, on attaquait l’homme avant l’œuvre et l’on décrétait celle‑ci déviante parce que celui‑là l’était tout autant. Le tort des naturalistes était de ne pas montrer d’empathie envers leurs personnages et ce seul critère est devenu déterminant dans la postérité critique pour juger bien des œuvres. En cela, l’enseignement de l’article déborde largement la seule histoire littéraire du xixe siècle pour s’appliquer à l’art en général. Il en va de même de celui de M. Glaumaud‑Carbonnier qui, dépassant le sujet précis du divorce, interroge en fait la survivance d’un topos littéraire, celui du naturalisme toujours à la pointe des mutations sociales, et peut ainsi se lire autant comme une réflexion sur un raté du naturalisme comme sur la littérature de façon globale.

13À côté de ces points positifs, quelques réserves demeurent néanmoins. Ponctuellement, la communication sur Hennique aurait gagné à être approfondie pour expliciter véritablement l’héritage naturaliste de cet auteur. Le dernier article, consacré à la poétique cyclique de l’histoire dans Les Rougon‑Macquart, s’il est excellent, entretient, quant à lui, un lien ténu avec ceux qui le précèdent, et il faut prendre de la distance pour en discerner toute la cohérence avec l’ensemble du volume : sans doute sa place en conclusion est‑elle une invitation à le faire pour voir qu’il permet de prouver définitivement la souplesse et la profondeur sous l’angle historique d’un Zola trop souvent réduit à des clichés. Par ailleurs, d’autres sujets auraient pu faire l’objet d’un article à part entière tant ils auraient été aussi surprenants qu’évocateurs : ainsi, aux côtés des exemples chinois et japonais, n’aurait‑on pu imaginer une étude originale du film coréen Thirst dont le synopsis est, contre toute attente, une reprise avouée de Thérèse Raquin mêlée d’une inspiration puisant au gothique et à la science‑fiction8 ? De manière plus générale, on peut surtout regretter que le concept d’héritage n’ait pas été pris en son autre sens : ce dont le naturalisme a hérité, ce qu’il a reçu et non transmis. Cette acception aurait permis de prouver un peu plus encore sa diversité, cette fois‑ci en amont de son histoire, et aurait conforté la thèse du volume en montrant que le naturalisme est pluriel dès son apparition et non uniquement par ce que la postérité en a fait. Suivant la même méthode adoptée, un ou deux articles auraient suffi et auraient naturellement pris place au début de la partie consacrée aux filiations et désaffiliations. Pour achever de montrer la variété de son œuvre, il aurait été loisible par exemple d’étudier le legs hugolien ou encore l’héritage de la littérature paradoxographique qu’on trouve sous la plume de Zola. Entre l’un bien connu et l’autre plus ignoré, la cohérence du volume en aurait été totale et la démonstration s’en serait trouvée parfaite.

14Malgré ces quelques réserves, l’ouvrage est néanmoins abouti et son objectif amplement atteint. Sa lecture permet de montrer que le naturalisme n’est définitivement pas ce à quoi on veut trop souvent le restreindre — des thèmes, des lieux, des types de personnages récurrents et confinant au misérabilisme ou à la pornographie – sans en voir la diversité, la complexité et la modernité. Il s’agit au contraire de se défaire pour de bon des images caricaturales pour approfondir notre perception du mot. Déjà du temps de Zola on l’appliquait à la peinture, au théâtre, à la musique, à l’architecture ou à la politique, et cette variété d’emploi indiquait des prétentions et une profondeur que beaucoup ne voulurent jamais voir. Elle se prolongea a fortiori dans la postérité et nuança plus encore la définition qu’on en pouvait donner.

15Car le présent ouvrage montre que l’héritage d’un mouvement littéraire, si ancien soit‑il, peut bel et bien se répercuter jusqu’à nos jours et qu’il est une chose complexe en même temps qu’un réel facteur de richesse. Il met en valeur la diversité de transmission du naturalisme – temporelle, géographique, générique — pour déboucher sur la démonstration qu’il n’existe pas un naturalisme, encore moins un naturalisme zolien, mais des naturalismes. Ce dernier n’a pas cessé d’exister à l’aube du xxe siècle : au contraire, il est resté comme méthode et s’est propagé à des époques, s’est démultiplié dans des pays où on ne l’attendait pas en trouvant un second souffle plus discret mais tout aussi puissant. Il n’a alors peut‑être jamais été aussi fécond que dans son héritage où il a été jusqu’à nourrir des contre‑modèles qui s’y réfèrent implicitement.


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16Aussi est‑il assuré de manière générale que les étiquettes sont la plupart du temps artificielles et réductrices. Derrière tout suffixe en –isme, loin d’être figé et borné à un chapitre de manuel scolaire, un courant littéraire est au contraire malléable, fructueux et c’est sa transmission précisément qui le prouve parce qu’il tombe alors dans le champ commun où chacun se l’approprie et le fait sien, prenant ce qu’il veut, laissant ce qu’il ne veut pas et y ajoutant chaque fois son génie propre. C’est bien là ce que montre le volume dans une vision profondément optimiste mais juste, une bouffée d’air salvatrice de la littérature.