
Auteur du Voyage du Condottière, André Suarès se devait d’être édité aux Editions du Condottière. Quel meilleur saint patron que cet homme à la curiosité universelle, épris de toute beauté ?
Admirée par les plus grands esprits de son temps, d’André Gide à Paul Claudel, de Stefan Zweig à James Joyce, d’André Malraux à Roger Nimier, mais aussi de Claude Debussy à Pablo Picasso, la figure de ce très grand écrivain ne cesse de grandir à la mesure de son vœu le plus cher : être simultanément sur tous les points du temps, ceux d’hier - de l’Antiquité à son époque -, et ceux à venir dont nous participons.
Inédites en livre, ces pages qui portent aussi bien sur la guerre que la politique, la poésie que la morale, les paysages bretons que les fonds sous-marins, mais aussi sur Antigone que saint François, Shakespeare que Rimbaud, dormaient dans des journaux et des revues. Stéphane Barsacq les a retrouvées et préfacées.
On surprend, dans sa nouveauté radicale, le style et la vision de l’écrivain, ses vues, ses prémonitions, ses dons divinatoires.
Comme le fameux Cangrande della Scala loué par Dante ou le Colleone, dont la statue est visible à Venise, le Condottière de Suarès reprend sa marche et ses conquêtes - l’œil ouvert sur l’horizon.
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Né en 1972, Stéphane Barsacq est écrivain. Il a notamment écrit sur Arthur Rimbaud, Emil Cioran et Yves Bonnefoy. Depuis une dizaine d'années, il a remis à jour nombre d'inédits d'André Suarès.
André Suarès (1868-1948) est issu d’une famille de négociants juifs installés à Marseille. Il compte des ancêtres à Alep, à Gênes, à Marseille et peut-être en Bretagne. Enfant prodige, il remporte le premier prix au Concours général à l’âge de 15 ans. Reçu brillamment à l’Ecole normale supérieure, il devient ami avec Romain Rolland, à l’ombre du « cloître de la rue d’Ulm », et avec Paul Claudel. Dreyfusard militant, ennemi de Barrès, plus tard de l’Action française, il rencontre Ernest Renan, écrit à Léon Tolstoï, est proche de Georges Clémenceau, puis de Charles Péguy, l’un de ses premiers éditeurs aux Cahiers de la Quinzaine. En 1895, il entreprend son premier pèlerinage à pied en Italie dont il rapporte les visions qui formeront le Voyage du Condottiere (1910-1932). Soutenu dans son travail littéraire par l’équipe de la NRF, il intègre la revue en 1912. Gide écrira à ce sujet en 1944 : « Valéry, Claudel, Suarès et moi, tous quatre piliers de La Nouvelle Revue française ; tous quatre peu férus de « succès », ayant en grande horreur battage et réclame et chacun soucieux de ne devoir qu’à sa propre valeur les lauriers. » Admiré en France - Debussy, Bourdelle, Picasso -, mais aussi à l’étranger - Miguel de Unamuno, James Joyce ou Stefan Zweig, l’un de ses traducteurs -, il s’impose comme une référence pour les écrivains de la génération de Malraux.