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Arpenteurs et passeurs (Bordeaux)

Arpenteurs et passeurs (Bordeaux)

Publié le par Marc Escola (Source : Oriane Helbert)

Arpenteurs et passeurs

 

Nous proposons deux journées d’étude et de recherche-action, dans le cadre du programme Quelque part dans l'inachevé qui se tiendra du 3 octobre au 27 novembre 2016.

 

Contexte

Quelque part dans l’inachevé est un dispositif hybride entre résidence d’artiste, exposition et manifestation scientifique que nous avons créé en octobre 2015. Au sein de ce dispositif vivant, l’espace d’exposition est transformé en lieu d’activités afin de rendre visible le processus de création, d’interroger la nature de la recherche artistique tant au niveau plastique que théorique et de partager le travail doctoral. Nous avons choisi de développer ce projet en trois temps, le premier a eu lieu du 5 au 9 octobre 2015 (voir le blog https://quelquepartdanslinacheve.wordpress.com), puis le second entre le 3 octobre et le 27 novembre 2016, enfin, le dernier se tiendra dans le courant de l’année 2017.

Pour ce deuxième volet, nous proposons d'ouvrir ce dispositif à deux journées d'étude consacrées à la recherche artistique à travers deux figures emblématiques : l'arpenteur et le passeur. Deux lieux seront investis : la maison témoin de la Cité Frugès-Le Corbusier de Pessac, ainsi que la salle d'exposition de la Maison Des Arts à l'Université Bordeaux Montaigne. Nous offrons ce temps de rencontre, d'échanges et d'expérimentation in situ, afin de mettre en partage les questionnements de chacun.

Passeurs

Le passeur est  celui qui conduit un bac, un bateau pour passer l’eau, mais le  passeur est aussi celui qui permet à des clandestins de franchir une frontière. Il s’agit bien dans les deux cas de frayer le chemin, d’accompagner une tierce personne, de conduire la traversée d’un bord à un autre, de permettre le passage d’un lieu à un autre… Le passeur permet et conduit des franchissements d’espaces et de temps. Mais on pourrait ajouter qu'il est aussi celui qui fait passer d’un état à un autre : le passeur est celui qui accompagne les métamorphoses. Au cœur du jeu des passeurs et des passages, se trouve ainsi la magnifique et problématique question de la transmission, des transmissions de l’art.

Le terme de passeur en art peut recouvrir différentes formes et peut être sujet à pas mal de malentendus - c’est ce qui fait que l’art est un écosystème en mouvement, en transition et les passeurs sont souvent les agents des transformations, des transmissions et de l’élargissement de l’art à quelque chose de plus étrange que lui… Ce sont des moments où l'autre, où l'étranger est avant tout un messager, un passeur de nouvelles pratiques…

Mais comment prend-on conscience que l’on est passeur ? Que passe-t-on ? Comment le passe-t-on ? Que se passe-t-il quand on passe ? Quels sont les espaces de passations et de transmissions ?

Dans le cadre de cette journée d'étude, il s’agira de créer des « seuils », d’aménager des interstices pour explorer les conjonctions et les disjonctions liées à ces questions de passeurs et de passages, faisant ainsi écho aux propos de Paul Ardenne, Pascal Beausse et Laurent Goumarre dans leur ouvrage commun L’art comme expérience : « Les artistes sont aujourd’hui des passeurs. En recyclant des images, réelles ou fictionnelles, ce qu’ils proposent, ce ne sont plus des œuvres, ni même des objets d’art, mais des processus, des propositions de situation à expérimenter en commun. »

 

Arpenteurs

L’arpenteur est un mesureur de terre, il se distingue du flâneur, du promeneur ou du piéton qui vaque selon son envie, selon une destination connue ou une obligation. L’arpenteur, lui, marche le regard fixé et l’attention tout entière dirigée vers son déplacement et vers le sol qu’il sonde pas à pas. Chaque pas renouvelle son attention, chaque pas et chaque parcelle de terre parcourue réserve son lot de découvertes et ajoute un peu plus à la connaissance de cette terre.

« Sortant de sa chambre pour un parcours familier ou une plongée vers l’inconnu, l’arpenteur opère une approche lente des êtres et des choses qui viennent à lui. Outre quelques boucles qui cernent de près le lieu habité, son terrain privilégié est l’écart, dans lequel il nomme la zone, la banlieue, la périphérie, le terrain vague, la friche, les espaces habités qu’il transverse. Il marche ouvert à la surprise et au dérangement qui remuent la pensée du dehors[1] ».

À ce titre, l’arpenteur peut offrir l’image de l’artiste et du chercheur partant à la découverte de ce qui échappe au regard ; et ses activités celle du relevé de petits morceaux de notre sol, de notre dehors. L’artiste en arpenteur est celui qui est attentif à chaque frémissement de notre environnement et qui nous fournit des perspectives particulières sur le monde que nous habitons grâce à sa manière de le transverser.

Alors, quelles activités, perspectives ou type d’attention ces artistes mettent-ils en œuvre, qui sont-ils ? Quelles méthodes, langages engagent-ils ? Quels sont les outils de l’artiste en arpenteur ?

Les activités de recherche et de création ne sont-elles pas en elles-mêmes des formes d’arpentage de la pensée ?

Le déplacement ininterrompu des perspectives est-il porteur de connaissance, jusqu’à quel point, quelles en sont les limites ?

Quels sont les enjeux de la découverte, de la connaissance ou de la re-connaissance des particularités inaperçues, silencieuses de notre monde ?

Quels sont les enjeux plastiques, poétiques et esthétiques de la pensée de la figure de l’arpenteur ? Etc.

 

Méthode

La méthode de création-recherche sera au centre de ces journées d’étude, puisque nous aborderons notre sujet en pratique et en théorie, la façon dont elle se déroulera, ses objets,  les modes opératoires de sa mise en œuvre, ses brouillons, ses hésitations — ce qui se joue généralement dans l’ombre. Tout au long de ces deux journées d'étude, un protocole de prise de note sera mis en place, afin de restituer à la fin de chaque journée, ce quelque-chose qui s'élaborera en commun.

 

Invitation

A l’image de la multiplicité des perspectives et de la porosité entre recherche et création, les propositions de contribution sont ouvertes aux différentes disciplines artistiques ou en lien avec l’art : danse, cinéma, théâtre, musique, arts plastiques, lettres, histoire de l’art, philosophie, esthétique, etc., et à tous les formats de présentation, prenant et croisant les approches scientifiques (communication, conférence, exposé, etc.), empiriques (récit d'expérience, improvisation, etc.) ou artistiques (performance, poésie, installation, etc.).

Nous souhaitons particulièrement que ce dispositif soit vivant, il sera donc basé sur l’échange, la rencontre et le partage d'expériences à l’Université et à la Cité Frugès-Le Corbusier.

Nous invitons les étudiants, doctorants, chercheurs, artistes à envoyer leurs propositions (une page maximum) ainsi qu’une courte biographie avant le 20 mai 2016 aux adresses suivantes :

Céline Domengie (CLARE, doctorante en arts plastiques, artiste)

celinedomengie@hotmail.com

Oriane Helbert (CLARE, doctorante en arts plastiques, plasticienne)

oriane.helbert@etu.u-bordeaux-montaigne.fr

 

[1] Jean-François Pirson, La danse de l’arpenteur, La Lettre Volée, 2014, p.19.