Actualité
Appels à contributions
Entrelacs, n°371,

Entrelacs, n°371, "Alejandro Jodorowsky, d’un art à l’autre"

Publié le par Université de Lausanne (Source : Hervey)

Alejandro Jodorowsky est l’auteur d’une œuvre abondante et protéiforme qui conjugue diverses pratiques créatorielles. Originaire du Chili, il débute par le théâtre de marionnettes qui le mène en France où il travaille la pantomime avec le Mime Marceau. Son goût pour le spectacle vivant s’affirme et se concrétise lors de la création avec Fernando Arrabal et Roland Topor du collectif « Panique », largement influencé par l'héritage surréaliste.

Dans cette période qui dure une dizaine d'années (1962-1974), il met en scène de nombreuses pièces de théâtre entre Paris et Mexico. Cette expérience théâtrale est primordiale pour son œuvre postérieure puisqu'elle se fait ressentir dans les films des années 1970, réalisés au Mexique (El Topo, La Montaña Sagrada, etc.) et qui lui procurent la notoriété qu'on lui connaît. À partir des années 80, tout en produisant une abondante collection de bandes dessinées qui fait rapidement de lui un auteur incontournable, et après quelques échecs cinématographiques, Jodorowsky se tourne vers la littérature où il constitue là encore une œuvre riche faite de romans, de recueils de poésie et de nouvelles, dans lesquels l'auteur ne cesse de transformer « sa mémoire familiale en légende héroïque[1]. » Spécialiste du tarot, féru d’ésotérisme, passionné par les arts et les cultures asiatiques, sud-américaines ou arabes, Jodorowsky continue aujourd’hui de développer une œuvre variée, revenant depuis quelques années au cinéma (La Danza de la Realidad en 2013, Poesia sin fin en 2016), à la magie et à la bande dessinée qu'il n'a jamais quittée, notamment en reprenant la série L’Incal.

« Sur-le-champ, je jurai que j'irais toujours jusqu'au bout de mes forces, jusqu'à la dernière goutte de mon énergie et que je n'abandonnerais jamais une œuvre commencée avant de l'avoir terminée[2] ! » Nul doute que la promesse du jeune narrateur de la courte nouvelle écrite en 1980 ne soit tenue par Jodorowsky qui semble chercher toujours de nouvelles voies d'expression.

En dépit de ces activités foisonnantes, Jodorowsky semble essentiellement reconnu en tant que cinéaste et scénariste de bandes dessinées culte depuis ses deux films El Topo (1971) et La Montaña Sagrada (1973) ainsi que la série L'Incal avec le dessinateur Moebius. En cause, peut-être, la diffusion partielle de son œuvre, en particulier de ses textes dont beaucoup n’ont pas été traduits. De plus, peu d’études s’émancipent du cloisonnement des pratiques et se focalisent davantage sur un aspect de l’œuvre, en l’occurrence le cinéma ou la bande-dessinée. Pourtant, bien que ces films et bandes dessinées occupent une place importante dans sa vie artistique, ils ne représentent quantitativement qu’une fraction d'un ensemble pléthorique dont nous essaierons de discerner les fils conducteurs. À l'instar de la partie émergée d'un iceberg, ces œuvres seraient la partie visible d'un tout largement immergé qui, comme aime à le dire l'artiste qui utilise lui-même la comparaison[3], constituerait l'identité plus secrète d'un corpus multiple et varié.

Jamais cloisonnée dans un genre ou par un support restrictif, l’œuvre de Jodorowsky interroge constamment les relations entre les arts. Que ce soit par l'intermédiaire de symboles culturels souvent ésotériques, de matières expressives ou stylistiques, ou encore de pratiques créatorielles, les productions artistiques de Jodorowsky participent d’un système dont la cohérence peut se dissimuler derrière une disparité de façade. Difficile par exemple d'appréhender les films sans prendre en compte l'esthétique du dessin développée dans les nombreux albums ou encore la scénographie théâtrale « panique »[4]. Ce numéro de la revue Entrelacs consacré à l’artiste voudrait précisément lever ce voile qui flotte sur l'ensemble du corpus jodorowskien en explorant les processus de circulation artistique pour mettre au jour les relations d’intermédialité, les jeux d’hybridation et d’influences esthétiques qui traversent l’œuvre plurielle de Jodorowsky – ou comment divers « actes » artistiques, selon un terme propre à l’auteur, se rencontrent, se confrontent, dialoguent au sein de chaque œuvre, interrogeant sans cesse les possibles de l’art.

 

AXES

À travers des études de cas, des retours historiques ou des études comparées, il s'agira donc d'interroger la façon dont les œuvres d’Alejandro Jodorowsky pensent et travaillent les relations entre les formes artistiques. Plusieurs axes pourront être explorés :

une étude des dialogues qui peuvent se tisser au cœur des œuvres entre diverses formes artistiques. Que ce soit par l'intermédiaire d’éléments narratifs ou esthétiques (récurrences, déplacements ou évolutions de thèmes, de motifs, de formes, de types de personnages, etc.), on essaiera de comprendre comment différentes pratiques et réflexions artistiques peuvent cohabiter au sein d'une même œuvre ;  

  • la recherche d'influences artistiques qui traversent une ou plusieurs œuvres de Jodorowsky, ainsi que la façon dont ces influences sont intégrées et utilisées pour les desseins de l’œuvre ;
  • la mise en contexte d'un moment particulier de la vie de l'artiste, qui permettrait d'éclairer les enjeux et les déterminations d’une ou plusieurs œuvres ou d'une période artistique ;
  • l'utilisation et la transformation de symboles et de signes culturels au sein d'une ou de plusieurs productions artistiques, permettant de comprendre les diverses influences culturelles de Jodorowsky.

 

PROPOSITIONS

Le comité scientifique étudiera les propositions d’article qui seront envoyées par courriel à yoann.hervey@univ-montp3.fr, fabien.meynier@univ-montp3.fr et celine.saturnino@univ-montp3.fr avant le 16 décembre 2018. Chaque proposition devra comporter un titre, un résumé d’environ 500 mots et une courte bio-bibliographie de l’auteur.

Le texte définitif sera à envoyer au plus tard le 3 mai 2019. Il devra comporter entre 30.000 et 40.000 signes espaces compris. Les normes d’édition sont précisées ici : https://journals.openedition.org/entrelacs/371

Rédacteurs en chef : Yoann Hervey, Fabien Meynier, Céline Saturnino

Comité scientifique :

  • Pierre Arbus, maître de conférences en études cinématographiques (ENSAV)
  • Claire Chatelet, maître de conférences en études cinématographiques (Université Paul-Valéry Montpellier 3)
  • Yoann Hervey, doctorant en études cinématographiques (UPV)
  •  Fabien Meynier, doctorant en études cinématographiques (UPV)
  • Céline Saturnino, docteure en études cinématographiques (UPV)
  • Julie Savelli, maître de conférences en études cinématographiques (UPV)
  • Thierry Serdane maître de conférences en Arts Plastiques (UPV)
  • Eric Villagordo, maître de conférences en Arts Plastiques (UPV)

.............................................

[1]Alejandro Jodorowsky, L'Arbre du dieu pendu, trad. fr. Mara Hernandez et René Solis, Paris, Métailié, 1996, p. 10.

[2]Alejandro Jodorowsky, « L'Attaque », in Les Araignées sans mémoire [1980], trad. fr. Gérard de Cortanze, Albin Michel, « Espaces libres », 2010, p. 243.

[3]Alejandro Jodorowsky, conférence du 26 février 2008, http://ecoledutarot.com/lettrejodorowsky.php?id=109&ret=4, dernière consultation le 16/05/2017.

[4]Michel Larouche, Alexandro Jodorowsky cinéaste panique, Paris, Les Presses de l'université de Montreal – Albatros, 1985, p. 55-84.