Actualité
Appels à contributions
Statut et représentations de la victime civile des conflits. Approche interdisciplinaire

Statut et représentations de la victime civile des conflits. Approche interdisciplinaire

Publié le par Ivanne Rialland (Source : ariele.thauvin-chapot)

Statut et représentations de la victime civile des conflits

Approche interdisciplinaire

Colloque international  Limoges, 30 septembre - 1er octobre 2011

Institut de recherche SHS de l'Université de Limoges et Centre de la Mémoire d'Oradour/Glane

Plus encore que dans le feu du conflit, où le sort dramatique des victimes civiles peut émouvoir, scandaliser et pousser à l'action – que ce soit à l'échelle individuelle ou étatique –, c'est dans la phase d'après-conflit que l'appréciation du statut de la victime et de la manière dont elle se pense et dont elle est perçue prend tout son sens pour gérer le présent et le futur, en réinsérant la victime dans la vie sociale et en définissant un rôle qui, de bouc émissaire, peut faire d'elle un symbole de réconciliation – ou d'impossible pardon. C'est ce qu'illustre de manière exemplaire la mise en exergue des « paroles de victimes » par le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie qui, revendiquant « la justice pour les victimes », permet la consultation en ligne de films exprimant la force de la parole et du silence.

Selon une approche interdisciplinaire croisant – plus particulièrement, mais non exclusivement – les regards historique (de l'Antiquité à nos jours), juridique et littéraire, le colloque « Statut et représentations de la victime civile des conflits dans les sociétés anciennes et contemporaines : Approche interdisciplinaire » ambitionne d'analyser ce qui est constitutif de la victime : sa douleur, sa plainte (autrement dit : sa parole), le regard que les autres portent sur elle et son rôle dans la société, pendant et, surtout, après que les armes se sont tues. Comment la victime se construit-elle ou est-elle construite ? Selon quels critères ? Quel est son rôle dans la société et quelle place accorde-t-on à son témoignage, au moment du procès – s'il y en a – et plus tard, à des fins de commémoration ou d'exhortation ?

S'insérant dans le programme de l'Institut de recherche « Sciences de l'Homme et de la Société » de l'Université de Limoges consacré à la « Gestion du conflit et de l'après-conflit : Dire, témoigner, transmettre », cette rencontre internationale et interdisciplinaire portera plus particulièrement sur l'écriture des conflits (récit subjectif ou objectif, récits judiciaires dans les jugements internationaux), la nature et la valeur du témoignage, voire son instrumentalisation, le statut (juridique et social) de la victime et son rôle dans la gestion de l'après-conflit. On prendra en considération exclusivement les victimes civiles des conflits.

L'espace qu'ouvre l'écriture est essentiel pour dire, transmettre et interroger l'expérience du conflit. Dans les « zones de conflits », le déséquilibre des sociétés et des vies humaines confronte l'individu à l'irrémédiable et fascine l'homme. Il y est mis en présence du spectre angoissant de la rupture de sa propre vie, mais également de la fin du monde ou, du moins, de son monde, celui dans lequel s'enracinait son existence. Comment, alors « tenir en échec les puissances environnantes du monde hostile » ? pour citer Henri Michaud. L'écriture apparaît comme une voie… nommer, décrire, analyser, commenter, argumenter, réinventer… Il conviendra par exemple de préciser dans quelle mesure la production littéraire peut, aussi, être citée au « tribunal de l'Histoire », au même titre (?) que les récits « authentiques ». En littérature, comment la parole émerge-t-elle du conflit, fracturée par sa violence pour ne plus laisser au survivant que le silence, le ressassement ou la rage pour exprimer l'indicible du traumatisme vécu ? L'écrivain ou le dramaturge tente de mettre en spectacle un monde vidé de sa substance, où les êtres sont en sursis d'eux-mêmes ; pour cela en même temps que la raison du monde, ils interrogent le langage, les mots, recréant, inventant une langue, un genre, qui permettent d'exprimer le non sens – ce vertige du monde –, en même temps qu'ils tentent de construire un espace pour exister. 

« Devoir de mémoire », ressassement d'une incompréhension, prise de position éthique ou politique ?Les écritures du conflit posent, in absentia, un système de valeurs (sociales, politiques ou éthiques) qui ont sous-tendu la réflexion occidentale du XXe siècle et que les nombreux "conflits" de la deuxième moitié et du début du XXIe siècle interrogent.

Ce faisceau de questionnements pourra débuter par une approche des termes « conflit » et « victime », pour en préciser les différentes acceptions, tant dans les domaines juridique, historique qu'individuel.

. Instrumentalisation, domination,commémoration, mémoire reconstruite, les écrits questionnent l'histoire officielle. Comme le dit un personnage de Solo d'un revenant de l'écrivain togolais Kossi Efoui, « on n'entend pas toutes les voix en même temps dans la même histoire ».

 Ce colloque se propose de mêler des voix provenant de champs différents pour mieux appréhender l'acception de « conflit » et de « victimes » et les différentes histoires qu'il ou elles raconte(nt). Les propositions venant de toutes les disciplines relevant des « Sciences de l'Homme et de la Société » sont les bienvenues !

Le colloque sera inauguré, le soir du jeudi 29 septembre, par une conférence publique de Carla Del Ponte, ancien Procureur des Tribunaux Pénaux Internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda.

Les propositions de communications, sous la forme d'une présentation d'environ 1500 à 3000 signes, sont à adresser par courrier électronique à mathilde.jacquet@unilim.fr avant le 25 mai 2011.