Questions de société

"Réforme de la formation des enseignants: réagir ensemble!", par un collectif d'enseignants de Paris 4.

Publié le par Marc Escola

REFORME DE LA FORMATION DES ENSEIGNANTS
DU PREMIER ET DU SECOND DEGRE :
IL EST URGENT DE REAGIR ENSEMBLE !


Actuellement, l'ensemble des universités est touché par un mouvement massif de protestations et de grèves. A Paris, la plupart des cours n'ont pas repris pour le second semestre. Depuis quelques jours, le mouvement se radicalise, et un grand nombre d'universités font l'objet de blocages. A Dauphine, à la Sorbonne, à Nanterre, Saint-Denis ou Villetaneuse, la plupart des enseignements sont au point mort, depuis parfois six semaines. Les manifestations des enseignants, des personnels administratifs et des étudiants se multiplient, soutenues par un très large éventail de syndicats et d'organisations de tous bords.

A qui la faute ? A la seule réforme du statut des enseignants-chercheurs et à la défense prétendument corporatiste de purs intérêts catégoriels ? Assurément, non. Depuis des mois, l'ensemble de la communauté universitaire réclame surtout le retrait des projets actuels de réforme de la formation et du recrutement des personnels enseignants de l'Education nationale. A ce jour, sur ce sujet, en dépit d'une série de démarches entamées depuis plus de six mois auprès des Ministères concernés, Valérie Pécresse et Xavier Darcos refusent toute discussion. Cette réforme dite de « mastérisation des concours » propose notamment :

1)    de supprimer l'année de formation en alternance qui suit l'obtention du concours : le nouvel enseignant aura donc un service complet devant des élèves dès la première année ;
2)    de réduire la part des différentes disciplines dans la formation des enseignants (dans le projet actuel, un futur professeur de langues ne serait jamais évalué, par exemple, sur sa pratique orale de la langue) ;
3)    d'instaurer à la place d'une épreuve disciplinaire, pour tous les CAPES de toutes les disciplines, une épreuve de « connaissance du monde éducatif » (le futur professeur apprendra désormais moins de mathématiques, moins de français, moins d'histoire, moins de langues, mais saura ce qu'est le règlement intérieur d'un collège et d'un lycée ou les arcanes du Ministère de l'Education nationale) ;
4)    d'organiser désormais les concours dans le cadre de la deuxième année du Master ; cette année-là, le futur candidat devra donc dans le même temps mener d'une part des recherches universitaires dès le mois d'octobre et rédiger un mémoire à soutenir au mois de juin, d'autre part préparer l'écrit et l'oral du concours qui se tiendra en janvier pour l'écrit et en juin pour l'oral, ce qui implique nécessairement :


-    que seront bradés et le concours et le mémoire, contrairement à l'objectif affiché d'élévation du niveau de formation par la mastérisation ;
-    que seront pénalisés les étudiants qui n'ont pas les moyens financiers de poursuivre de telles études, allongées d'un an avant l'accès possible à un salaire ;
-    qu'il y aura inévitablement bon nombre de « reçus-collés », titulaires d'un Master mais non du concours, qui serviront de main-d'oeuvre à l'Education nationale sur des postes de non-titulaires. La chute vertigineuse des postes mis au concours ces dernières années pourra suivre son cours, compensée par l'augmentation du nombre d'enseignants moins bien payés et au statut précaire.


Demain les collèges et les lycées deviendront en conséquence des lieux dans lesquels des enseignants réalisant les mêmes missions de formation seront pour certains des fonctionnaires d'Etat et pour d'autres, vraisemblablement de plus en plus nombreux, des vacataires payés à la tâche, incertains de leur avenir et ne bénéficiant plus de la disponibilité intellectuelle nécessaire pour permettre aux élèves d'apprendre dans la sérénité. L'atmosphère de travail dans les collèges et lycées s'en ressentira au détriment des élèves mais aussi de tous les personnels des établissements scolaires.

Cette politique est une régression pour la formation intellectuelle des enseignants et une agression sociale. Les enseignants du secondaire comme les parents d'élèves, qui ne sauraient rester indifférents devant cette politique qui concerne l'ensemble de la communauté nationale, sont appelés à participer massivement aux manifestations organisées au cours du mois de mars contre ces projets destructeurs.

Un premier mouvement de manifestation « de la maternelle à l'université » aura lieu ce mercredi 11 mars. A Paris, la manifestation partira à 14h30 de la place de la République. Des manifestations sont prévues le 11 mars dans toutes les villes universitaires.