Questions de société

"Quand les universités se transforment en annexe de la préfecture" (Bastamag, 20/10/10)

Publié le par Bérenger Boulay (Source : Poolp)

Quand les universités se transforment en annexe de la préfecture

Par Ludo Simbille, Bastamag, 20 octobre 2010

Les étudiants étrangers souhaitant venir étudier en France ont intérêt àavoir lu Kafka. Pour ceux qui n'ont pas eu la chance d'être nés au seinde l'Union européenne, un véritable parcours du combattant se prépare.Le Réseau universités sans frontières (RUSF) dénonce les discriminationsqui se multiplient, et la tendance à transformer les enseignants en « instruments de préfectures pour livrer des personnes à la clandestinité ou à l'expulsion. »

« Je suis aussi venue étudier en France parce qu'ils font denombreuses choses pour rendre la vie des étudiants étrangers plus facile », se réjouit Marusha, de Croatie, sur le site Campus Francequi fournit des informations pratiques à tout étranger souhaitant userson jean sur les bancs des universités françaises. Procéduresd'inscription, d'obtention de visa, démarches pour trouver un logement,un travail, tout y est expliqué. On y apprend notamment qu'avec plus de260.000 étudiants étrangers par an, le 3ème pays d'accueil offre une « qualité de vie certaine » empreinte d'un « dynamisme culturel envié », « au carrefour de l'Europe ».
Pourtant, loin du folklore à l'auberge espagnole des programmesd'échange Erasmus, le séjour estudiantin en France se transforme parfoisen calvaire administratif, souvent pour défaut de papiers. C'est ce quedénonce dans plusieurs universités françaises le « RUSF » (Réseau universités sans frontières).Composé d'étudiants, d'enseignants et de personnels administratifs, leRUSF est créé en 2006 sur le modèle de son grand frère, le Réseau éducation sans frontières. « Êtreétudiant sans-papiers, c'est d'abord encourir le risque de se voirrefuser une inscription dans un établissement d'enseignement supérieurmalgré une inscription pédagogique en raison du défaut de visas longséjour », s'indigne le réseau dans son texte pionnier.

Ton bac tu repasseras

Prince, Béninois de 25 ans, en sait quelque chose. Et demeure sceptique sur la volonté de la France de « rendre la vie des étudiants étrangers plus facile ».Un diplôme de biologie en poche, il arrive en novembre 2006 à Nancypour entamer une formation en Génie Civil. Il dispose bien d'un visaétudiant. Sauf qu'au moment de s'inscrire, les choses ont changé sansque Prince en soit informé. Titulaire d'un diplôme étranger, il doitdésormais récupérer son numéro d'étudiant auprès de l'ambassade deFrance. Trop tard. Inscription refusée. Grâce au soutien d'un proviseur,Prince trouve alors une solution de choix : repasser son baccalauréat àl'école de la République pour avoir un diplôme français. « J'ai du refaire la première et la terminale. C'était ennuyeux mais je n'avais pas vraiment le choix »,commente l'intéressé. Il s'inscrit ensuite à Dijon en BTS Techniquescommerciales, option matériaux du bâtiment car, dit-il, c'est plusfacile que de s'inscrire à l'université.

De problèmes familiaux, tu ne connaîtras point

Suite au décès de son père resté au pays, Prince se retrouve sanssource de financement. Chose inacceptable pour la préfecture qui exigeune garantie de ressources d'au moins 450€ par mois, soit près de 5.000 €par an, pour délivrer le titre de séjour. Frappé d'une obligation dequitter le territoire français (OQTF), Prince devient sans-papiers. Cequi lui vaut un séjour en centre de rétention du Mesnil-Amelot dont ilsortira pour vice de procédure : la police assurait l'avoir arrêté dansun parc alors qu'il s'était présenté de lui-même après convocation...

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