Revue
Nouvelle parution
Pleine Marge n° 46

Pleine Marge n° 46

Publié le par Julia Peslier (Source : Effie Rentzou)

Pleine Marge, n° 46, décembre 2007

Cahiers de poésie, d'arts plastiques & de critique

Surréalisme & autres modernités

Le numéro 46 de la revue Pleine Marge (décembre 2007) présente des textes et des images qui thématisent des façons différentes un regard oblique. Ce regard gomme la limite entre état « normal » et état « autre », prend la forme d'une vision qui déstabilise les certitudes de la mimésis, ou bien canalise un point de vue minoritaire. L'enjeu entre « état normal » et « état autre » est étonnamment illustré par un texte d'Unica Zürn, jamais traduit en français, « Blanc avec point rouge », présenté et traduit par Ruth Henry. « Ecrit dans une grande angoisse, le 24 février 1959 » comme les derniers mots de ce texte le disent, « Blanc avec point rouge » est une radiographie poignante des débuts de la schizophrénie de Zürn. Un équilibre fragile entre les deux états est opéré à travers son écriture elliptique, tendre et cruelle à la fois, qui a comme effet de dénoncer tout sens de normalité et en révéler l'altérité. Le texte critique de Benjamin Andréo, « Théorie spectrale de l'exception poétique : Antonin Artaud et le devenir-fantôme », est une autre facette de ce gommage entre normalité et altérité absolue. La figure du fantôme est prise comme marque d'exception, comme désir de résister toute normalisation et toute signification fixe, qui prête sa forme évanescente à l'écriture d'Artaud. Enfin, deux textes en forme de contes, « La lumière des taupes » de Maurice Fickelson et « Modalités de l'amour » d'Axel Hémery, viennent s'ajouter à l'exploration de ce seuil entre état normal et état autre.

Un regard qui déstabilise les normes de la mimésis picturale peut se trouver dans les trois unités qui composent le matériel visuel du numéro. Un très beau dossier sur le peintre roumain Jules Perahim, présenté par Petr Král, Marina Vanci-Perahim, Francis Hofstein, Sebastian Reichmann et Dan Stanciu sous le titre « Un parcours » enferme dans ses trente-cinq pages plusieurs illustrations et des textes critiques et poétiques, qui tous ensemble révèlent l'évolution de ce peintre plus onirique sans doute que surréaliste. Le commentaire de Catherine Garcia sur trois tableaux de Remedios Varo problématise la mimésis traditionnelle en faveur d'un « mimétisme » qui désigne aussi l'enjeu de la création au féminin. D'autre part, le texte de Mireille Calle-Gruber discute les autoportraits de Claude Cahun comme des « allo-portraits », des représentations de cet étrange étranger que devient le sujet photographié et photographiant.

Du côté de l'autre, mais cette fois-ci un autre culturel et langagier, est dédié le très intéressant dossier sur la poésie cadienne et créole de Louisiane, présenté par Adélaïde Russo. L'ouragan Katrina et la colère qui en résulta, la nature louisianaise, des mots et des phrases en anglais dispersés dans le français dialectique, un coma imaginaire duquel on se réveille par les mots magiques « Say, are you a writer ? », composent un discours minoritaire qui décentre aussi bien la langue française que la culture américaine.

Sommaire 


Unica Zürn, Blanc avec point rouge, présenté et traduit par Ruth Henry, avec la collaboration de Catherine Brousse et de Pierre Brullé

Maurice Fickelson, La lumière des taupes

Catherine Garcia, Remedios Varo : hybridations et métamorphoses

Mireille Calle-Gruber, Créer « à la proue de soi-même », l'oeuvre photographique de Claude Cahun.

Axel Hémery, Modalités de l'amour

Benjamin Andréo, Théorie spectrale de l'exception poétique : Antonin Artaud et le devenir-fantôme

Adélaïde Russo présente les poètes cadiens et créoles Zachary Richard, Deborah Clifton, Jean Arceneaux, Earlene Broussard, Kirby Jambon.

Jules Perahim, Un parcours présenté par Petr Král, Marina Vanci, Francis Hofstein, Sebastian Reichmann et Dan Stanciu