Agenda
Événements & colloques
Marché(s) de l'art en province (1870-1914)

Marché(s) de l'art en province (1870-1914)

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Comité d'organisation)

MarchÉ(s) de l’art en province (1870-1914)

Programme

 

31 janvier – 1er février 2008

 

centre franÇois georges pariset / musÉe des beaux-arts de bordeaux

 

 

 

ComitÉ organisateur

Laurent Houssais (docteur en histoire de l’art contemporain, ATER à l’université Michel de Montaigne Bordeaux III)

Marion Lagrange (maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’université Michel de Montaigne Bordeaux III)

 

ComitÉ scientifique

Chantal Georgel (conservateur en Chef, musée d’Orsay)

Laurent Houssais (docteur en histoire de l’art contemporain, ATER à l’université Michel de Montaigne Bordeaux III)

Marion Lagrange (maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’université Michel de Montaigne Bordeaux III)

 

 


 

PROMOUVOIR : ACTEURS ET RÉSEAUX

Présidente de séance : Raymonde MOULIN

Sociologue, directrice de recherche honoraire au Centre national de la recherche scientifique

 

 

 

Anne-Doris MEYER

Chargée de mission aux Musées de la Ville de Strasbourg

 

Art et politique : la Société des amis des arts de Strasbourg de 1870 à 1914

 

Fondée en 1832, la Société des amis des arts de Strasbourg rassemble à sa création une centaine d’artistes et d’amateurs d’art. De 1836 à 1867, elle est liée à l’Association rhénane pour l’encouragement des beaux-arts et organise avec cette dernière des expositions transfrontalières. En 1867, alors que la politique d’unification de l’Allemagne, sous l’égide de la Prusse, se précise, l’association alsacienne rompt volontairement ces anciens liens de culture pour se tourner vers la France et développer dès lors une double orientation : la promotion du régionalisme artistique, mais aussi la diffusion de l’art français. Les contacts avec Paris, notamment, se renforcent. Pendant l’annexion, la Société est un temps concurrencée par un Kunstverein créé en 1883 par des immigrés allemands résidant à Strasbourg, Kunstverein qui a la faveur de la nouvelle autorité. Délibérément francophile, la Société des amis des arts poursuit néanmoins ses objectifs et propose, en plus de l’organisation d’expositions consacrées aux artistes régionaux vivants, de nombreuses expositions rétrospectives.

Il s’agit ici d’analyser les interactions des activités de la Société des amis des arts de Strasbourg avec le marché de l’art local durant la période 1870-1914, et ce à partir de l’important fonds déposé aux Archives municipales de la Ville. De nouvelles orientations apparaissent en effet après l’annexion : renforcement des liens avec Paris et les sociétés lorraines voisines, publication en français des comptes rendus des activités de la Société, volonté marquée de diffuser l’art français et de souligner les liens entre celui-ci et les artistes locaux. Les œuvres acquises par la Société et distribuées lors des tombolas annuelles, de même que les œuvres données par la Société au musée, s’étudient alors sous un double aspect, à la fois artistique et politique.

 

Les travaux d’Anne-Doris Meyer intéressent l’histoire des collections, tant privées que publiques. Sa thèse de doctorat d’histoire de l’art porte sur « Le musée personnel. Parcours de l’objet d’art en France au XIXe siècle. Recherches en muséographie et muséologie » (sous la dir. de Roland Recht, université Marc Bloch Strasbourg II, soutenue en 2001). On lui doit des études sur « Les donations Le Véel, du musée d’artiste au musée de collectionneur », dans Armand Le Véel, de cape et d’épée (Cherbourg-Octeville, musée d’Art Thomas-Henry, 2005), et sur la muséographie du musée de l’Œuvre Notre-Dame de Strasbourg (Revue d’Alsace, 2007). Anne Doris Meyer travaille à la conception d’une exposition consacrée à l’histoire des musées de Strasbourg de 1919 à 1960, qui doit avoir lieu à la fin de l’année 2008.

 

 

Alain BONNET

Maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’université de Nantes

 

La Société des amis des arts de Nantes (1890-1920) : l’action d’une association sur le marché de l’art local

 

La Société des amis des arts de Nantes a été fondée en avril 1890. Son but était de contribuer au rayonnement de l’art, local et national, grâce à l’organisation d’expositions annuelles. Les peintres officiels (Delaunay, Gérôme, Moreau de Tours…) exposèrent à Nantes, mais aussi les impressionnistes (Pissarro, Raffaëlli…), les néo-impressionnistes (Signac, Van Rysselberghe…), les Nabis (Denis, Bonnard…), les Fauves (Marquet, Ottmann…). La Société des amis des arts a également joué un rôle important dans les acquisitions du Musée des beaux-arts en pesant sur les choix de la commission d’achats.

Mon intervention retracera l’histoire de cette Société, son organisation, ses membres, ses options esthétiques, et s’arrêtera sur quelques événements notables liés à son action, par exemple l’achat par le musée de Soir de Septembre de Maurice Denis (1911).

 

Les travaux d’Alain Bonnet portent sur l’histoire des institutions artistiques, l’histoire de l’enseignement des arts et la formation de l’image sociale des artistes dans l’art du XIXe siècle (L’enseignement des arts au XIXe siècle. La réforme de l’École des beaux-arts de 1863 et la fin du modèle académique, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006 ; Artistes en groupe. La représentation de la communauté des artistes dans la peinture du XIXe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007). Il a collaboré au catalogue Devenir peintre au XIXe siècle : Baudry, Bouguereau, Lenepveu (La Roche-sur-Yon, Musée municipal, 2007-2008). Alain Bonnet prépare actuellement un essai sur L’artiste statufié. L’hommage sculpté aux Grands Artistes et mène une recherche sur les voyages des artistes français à l’étranger (L’artiste pérégrin. La Bourse de voyage et le Prix du Salon).

 

 

Aurélie PEYLHARD

Chargée d’études au musée Gustave Moreau

 

L’exposition de 1894 à La Dépêche de Toulouse : un exemple de « décentralisation artistique »

 

Au début du mois de mai 1894, le quotidien La Dépêche de Toulouse annonce aux lecteurs l’ouverture dans ses locaux d’une exposition de « peintres indépendants », parmi lesquels figurent Bonnard, Denis, Sérusier, Toulouse-Lautrec, Vallotton et Vuillard : « Les audacieuses recherches et les œuvres si curieuses des peintres de la jeune école sont encore mal connues en province. [...] Nous espérons que notre public voudra bien nous suivre et nous encourager dans cette tentative de décentralisation artistique dont il appartenait à Toulouse de donner l’exemple. »

Cette initiative revient à son nouveau directeur, Arthur Huc, homme politique, journaliste et amateur d’art. La conception de cette manifestation téméraire mérite d’être minutieusement analysée. Les œuvres sélectionnées chez dix-sept artistes récemment apparus sur la scène artistique parisienne d’avant-garde, tout comme le catalogue conçu comme un objet de collection, témoignent des partis pris significatifs de cette entreprise de promotion provinciale. Huc ne se limite pas à de simples annonces publicitaires. Les comptes rendus qu’il signe sont remarquables de didactisme, proposent une vision propre tout en faisant référence aux théories des artistes, qu’il contribue ainsi à diffuser.

Une étude comparée de la presse locale et nationale permet d’évaluer l’écho de cette exposition. Plusieurs lettres inédites révèlent les inquiétudes des artistes ainsi que les stratégies du journaliste pour tenter de leur assurer la vente de quelques tableaux. Échec commercial, cette courageuse entreprise semble cependant être parvenue à son dessein : « La Dépêche se croira assez récompensée si elle a réussi seulement à révéler à ses visiteurs tout un côté de l’art contemporain encore ignoré en province ».

 

Aurélie Peylhard est titulaire d’un DEA d’histoire de l’art (sous la dir. d’Eric Darragon, université de Paris I Panthéon Sorbonne) : elle s’est penchée dans le cadre de ses recherches sur « Les Expositions des Nabis et leur réception 1891-1914 ». Chargée d’études au musée Gustave Moreau depuis 2004, elle collabore à la publication du catalogue des dessins de Gustave Moreau (à paraître, éditions de la RMN, 2009). En 2007, elle a participé au programme d’échange franco-allemand pour jeunes professionnels des musées organisé par la Direction des Musées de France, contribuant dans ce cadre à l’organisation de l’exposition « Turner-Hugo-Moreau. Découverte de l’abstraction » (Francfort, Schirn Kunsthalle, 2007-2008).

 

 

Amandine PLACIN-GEAY

Docteur en histoire de l’art contemporain – université Michel de Montaigne Bordeaux III

 

La Société des amis du lac d’Hossegor. Quand intellectuels et artistes ambitionnent de défendre et valoriser une région

 

Officiellement fondée en 1909, la Société des amis du lac d’Hossegor réunit des intellectuels majoritairement parisiens qui se retrouvent pour parler musique, art, littérature et politique dans la villa « La Pierre bleue », construite en 1905-1907. Animée par trois membres de l’Académie Goncourt nourris de socialisme utopique, Maxime Leroy (1873-1957), J. H. Rosny Jeune (1859-1948) et Paul Margueritte (1860-1918), cette « colonie d’Hossegor » avait pour projet d’édifier une nouvelle abbaye de Thélème où l’élite de la pensée et des arts se serait développée au cœur d’une région retirée, simple et tranquille.

Après avoir reconstitué ce cercle artistique et littéraire, en insistant sur les relations qu’il entretenait avec les sculpteurs et les peintres originaires ou non des Landes, nous mettrons en évidence les échanges avec d’autres groupements landais et notamment ceux constitués autour du pianiste Francis Planté (1839-1934), du poète Jean Rameau (1858-1942) ou du compositeur Claude Duboscq (1897-1938).

En nous intéressant aux idéaux de ce groupe informel ainsi qu’à son implication dans la mise en place d’expositions et de commandes monumentales locales, nous montrerons que leur ambition de participer activement à la reconnaissance de la côte landaise et à sa protection va dépasser leurs espérances, voire même les contredire, en aboutissant à la création de villégiature touristique dès les années 20.

 

Amandine Placin-Geay est spécialiste de la sculpture figurative de la première moitié du XXe siècle et intervient depuis 1999 à l’université Michel de Montaigne Bordeaux III. Ses premiers travaux ont porté sur un groupe d’artistes indépendants surnommé « la bande à Schnegg » (« L’Après Rodin : la bande à Schnegg, une rupture ? », Les Cahiers du Centre François Georges Pariset, nov. 2005 ; « La bande à Schnegg, examen d’un groupe », Histoire de l’Art, nov. 2003). Elle s’est ensuite attachée, dans sa thèse de doctorat, à analyser « La sculpture dans sa relation à l’architecture en France, de 1900 à 1937 » (sous la dir. de Dominique Jarrassé, 2005). Amandine Placin-Geay participe au programme de recherches sur les monuments publics français mis en place par l’INHA, en collaboration avec la musée d’Orsay, intitulé À nos grands hommes - La sculpture publique en France jusqu’à la Seconde Guerre mondiale (publication d’un double cédérom en 2004). Elle a été commissaire scientifique de deux expositions organisées par le musée Despiau-Wlérick de Mont-de-Marsan : Genèse d’un monument dans les Landes dans l’entre-deux-guerres (2004-2005) et Inspirations médiévales, les sculpteurs figuratifs et le Moyen Âge (2006-2007).


 

RÉSEAUX EN PROVINCE, INTERDÉPENDANCES ET INTERACTIONS

Président de séance : Pierre VAISSE

Professeur honoraire d’histoire de l’art contemporain à l’université de Genève

 

 

 

Nicolas BUCHANIEC

Docteur en histoire de l’art contemporain – université de Lille III

 

Le « placement » des œuvres d’art dans les salons artistiques du Nord de la France : les loteries

 

Durant la seconde moitié du XIXe siècle, les salons artistiques provinciaux et parisiens ont formé un réseau de diffusion et de commercialisation des œuvres d’art d’envergure nationale. Dans le Nord de la France, ces expositions des beaux-arts ont structuré le marché de l’art.

La première dimension de ce marché est institutionnelle : les expositions périodiques permettent aux musées locaux d’enrichir leurs collections. La deuxième relève du marché privé, reposant sur un mécénat actif, caractérisé par une tendance à la thésaurisation et une absence de comportement spéculatif. L’afflux sans précédent d’amateurs d’art constitue une nouvelle clientèle qui trouve dans les expositions provinciales de quoi assouvir ses velléités de culture et satisfaire son désir de loisir. Un nouveau genre de mécène apparaît, le souscripteur. Mû par une éthique, la philanthropie, il se substitue aux institutions publiques.

La dimension « sociétale » du marché de l’art, sans doute la plus mésestimé, sinon la plus méconnue, concerne ces événements incontournables qui accompagnent les salons septentrionaux, les loteries. En multipliant les acquisitions destinées aux tombolas, les sociétés artistiques ont stimulé le marché de l’art dans le Nord de la France. La fonction économique des loteries prime sur l’aspect purement artistique (la promotion des artistes) et la composante politique (la démocratisation de l’art, la décentralisation et le nouveau rôle de l’État républicain).

L’essentiel des ressources dont disposent les sociétés organisatrices, engendré par les souscriptions et par la vente des billets de tombola, est presque exclusivement dévolu à l’acquisition d’œuvres exposées destinées à la loterie. Pour la vedette nationale comme pour le salonnard local qui optimise le système des salons ou l’exposant occasionnel, l’espoir de conclure une vente suffit à motiver ses envois.

Les œuvres à lotir n’ont pas pour vocation de garnir des édifices publics. Elles sont destinées aux demeures particulières. Quant aux lauréats, ils ne forment pas forcément un public de connaisseurs. Les tombolas rassemblent une population néophyte, ne disposant pas de moyens suffisants ou n’osant franchir le pas de l’acquisition.

Encouragement à exposer pour les uns, incitation à acheter pour les autres, les loteries ont été un moyen efficace de dynamiser le marché de l’art dans le Nord de la France.

 

Nicolas Buchaniec a soutenu en 2006 sa thèse de doctorat en histoire de l’art sur « Les Expositions des beaux-arts dans le Nord de la France dans la seconde moitié du XIXe siècle (1870-1914) », (sous la dir. de François Robichon, université de Lille III). On lui doit des articles – « Les Salons artistiques dans le Nord et le Pas-de-Calais (1870-1914) : la présence belge », Cahiers de l’IRHIS, n°1, 2006 ; « Les expositions valenciennoises des beaux-arts dans la première moitié du XIXe siècle (1802-1849) », Valentiana. Revue d’Histoire des Pays du Hainaut Français, déc. 2003 – et un ouvrage : Ernest Desurmont (1870-1930). Essai biographique (Paris, Bernard Giovanangeli, 2002). Il a collaboré au Dictionnaire du Nord et du Pas-de-Calais (Paris, Larousse, 2001) et a co-rédigé le catalogue raisonné des peintures de Jean-Baptiste Carpeaux (Carpeaux peintre, Paris, RMN, 1999). Nicolas Buchaniec poursuit ses recherches sur la vie artistique en province et mène actuellement une étude sur les salons artistiques du Sud-Ouest de la France.

 

 

Ségolène LE MEN

Professeur d’histoire de l’art contemporain à l’université de Paris X Nanterre, membre de l’Institut universitaire de France

 

Des tableaux et des ammonites, le cas de la collection Dollfus et le collectionnisme mulhousien

 

Cette communication sera centrée sur une étude de cas, celle de la collection Dollfus, en la mettant en perspective avec le collectionnisme mulhousien. Elle présentera la situation politique, sociale et industrielle de Mulhouse qui a conduit à l’essor du collectionnisme parmi ses élites protestantes, et le collectionneur indienneur Jean Dollfus (Mulhouse, 1823-Paris, 1911) dont les collections éclectiques, rassemblées de 1846 à 1911, au cours de voyages ou en ventes publiques, furent dispersées en quatre grandes ventes à l’hôtel Drouot (du 2 mars au 21 avril 1912, et diverses ventes en avril-mai). En analysant les lieux et modes de constitution de sa collection jusqu’à sa dispersion, elle abordera la part du réseau manufacturier protestant mulhousien dans l’évolution du goût et le fonctionnement du marché de l’art français du XIXe siècle, phénomène qui s’accuse après 1870. Elle s’intéressera à ses déplacements familiaux de Mulhouse à la côte normande en passant par Paris et mettra en évidence le goût du naturalisme dans les choix des collectionneurs de Mulhouse.

 

Ségolène Le Men a été chercheur CNRS au musée d’Orsay et directrice des études littéraires à l’École normale supérieure. Elle est actuellement professeur d’histoire de l’art contemporain à l’université Paris X Nanterre, membre de l’Institut universitaire de France. Ses recherches portent sur les rapports entre Beaux-Arts et imagerie, sur l’histoire de l’illustration et de la caricature au XIXe siècle, ainsi que sur l’image politique et sociale. Commissaire de plusieurs expositions, dont Les Français peints par eux-mêmes (Paris, musée d’Orsay, 1993), Les Révolutions de 1848 : l’Europe des images (Paris, Assemblée nationale, 1998), et Daumier (Ottawa, Musée des beaux-arts du Canada, Paris, Galeries nationales du Grand Palais, Washington, The Phillips collection, 1999-2000), elle a publié La Cathédrale illustrée, de Hugo à Monet. Regard romantique et modernité (Paris, CNRS, 2002), et travaille à présent sur Courbet (Courbet, Paris, Citadelles & Mazenod, 2007).

 

 

Laurent NOET

Docteur en histoire de l’art contemporain – université Paul Valéry Montpellier III

 

L’atelier-musée des frères Carli et la promotion de la sculpture religieuse à Marseille

 

Les frères Carli intègrent très jeunes l’École des beaux-arts de Marseille afin de reprendre l’atelier paternel. Auguste Carli (1868-1930), montrant de réelles dispositions, poursuit finalement une carrière de sculpteur à Paris ; c’est donc son frère cadet François (1872-1957) qui s’occupe de l’atelier de moulage. Dès avant 1900, ce dernier acquiert une certaine renommée en reproduisant de nombreux chefs-d’œuvre des musées nationaux et étrangers : Victoire de Samothrace, Persée de Cellini et tanagras… Il transforme dès lors ses locaux en « atelier-musée » ouvert au public et aux éventuels acheteurs. À partir de 1902 et jusqu’en 1914, il organise dans l’atelier des « expositions de Vierges ». Catholique convaincu dans une période marquée par la séparation de l’Église et de l’État, François Carli réalise de nombreuses copies de sculptures religieuses : Vierge primitive de Notre-Dame de Paris, Vierge en adoration de Luca della Robbia, Vierge de Nuremberg… Les reproductions voisinent avec des œuvres originales contemporaines de sa main, de celle de son frère ou de Paul Gonzalès (1856-1938). L’atelier sert en outre d’agence à Auguste Carli : lorsque celui-ci projette l’érection d’un monument à Marseille via une souscription publique, François multiplie les moulages de la maquette (Le Christ et sainte Véronique, Monument à Monticelli, Monument aux héros et victimes de la mer). Ayant pignon sur rue, François Carli s’attire le regard bienveillant de la municipalité marseillaise : c’est à lui qu’elle s’adresse en 1905 pour la réalisation d’une Vierge destinée au décor d’une pièce jouée au Grand Théâtre ou encore en 1906 pour mouler à Gênes les œuvres de Pierre Puget.

 

Après avoir soutenu en 2000 sa thèse de doctorat (« L’école marseillaise de sculpture à la fin du XIXe siècle », sous la dir. de Luce Barlangue, université Paul Valéry, Montpellier III), Laurent Noet a publié le catalogue raisonné de plusieurs sculpteurs (Jean-Baptiste Hugues. Un sculpteur sous la IIIe République, Paris, Thélès, 2002 ; Louis Botinelly, sculpteur provençal, Paris, Mare & Martin, 2006 ; André Allar, Paris, Mare & Martin, 2008). Il a collaboré à divers dictionnaires (Marseillaises, 26 siècles d’histoire, Édisud, 1999 ; Dictionnaire des Marseillais, Édisud, 2001), participé à l’exposition Maestà di Roma da Napoleone all’unità d’Italia. D’Ingres à Degas, les artistes français à Rome (Rome, villa Médicis, 2003) et dirigé la refonte du Dictionnaire des peintres et sculpteurs de Provence Alpes Côte d’Azur (Marseille, Jeanne Laffitte, 2006). Laurent Noet a organisé une exposition pour le centenaire de l’hôtel de la Caisse d’Épargne des Bouches-du-Rhône et collaboré à la publication qui l’accompagne (Bâtir un palais pour l’épargne, Caisse d’Épargne Provence-Alpes-Corses-La Réunion, 2004). Il prépare actuellement, en collaboration avec Florence Marciano et Éléonore Marantz-Jaën, un ouvrage sur Les Allar, une dynastie d’artistes (à paraître en 2008).

 

 

Clotilde ROTH-MEYER

Assistante de recherches au Centre allemand d’histoire de l’art

 

Quand Lyon achetait pour Lyon : la municipalité, les sociétés artistiques et les marchands dans la dynamique d’acquisition des œuvres d’art entre 1870 et 1900

 

« Devait-on acheter pour le compte de la Ville les meilleures œuvres du Salon ou borner les achats aux œuvres créées pas les artistes lyonnais ? Devait-on n’acheter qu’exceptionnellement ou se borner à des récompenses ? » : ces questions, soulevées par la commission d’acquisition de la Société des amis des arts de Lyon, sont fondamentales. Elles nous permettent de comprendre l’esprit qui y présidait : favoriser l’art à Lyon sans jamais nuire à la qualité des œuvres. Le but n’est donc pas d’en collectionner un maximum, mais d’en posséder du plus grand nombre d’artistes lyonnais dignes d’être exposés au Palais des Arts.

Dans la lignée d’autres sociétés artistiques mises en place dès la fin du XVIIIe siècle, Lyon a vu naître en 1836 une Société des amis des arts, qui devient en 1887 la Société lyonnaise des beaux-arts. Preuve de son succès, elle organise dès 1859 des expositions qui accueillent jusqu’à 12000 visiteurs par jour. La municipalité, consciente de l’importance et du rôle de cette société, lui offre par exemple ses frais d’installation en 1881. Des subventions sont alors régulièrement accordées par la ville pour subvenir à ses dépenses afin que les moyens dont elle dispose soient exclusivement consacrés à l’achat d’œuvres d’art.

Les acquisitions font partie, avec les médailles, prix honorifiques et autres encouragements, des moyens déployés par la municipalité et les sociétés artistiques pour encourager l’art local et acheter lyonnais. Il ne s’agira pas ici de nous consacrer exclusivement à la Société des amis des arts, mais de comprendre le rôle de ces institutions locales dans la vie artistique et le lien qui les unit. Nous pourrons alors montrer l’impact et dévoiler l’ambiguïté de cette politique artistique partagée entre sa volonté de promulguer les artistes lyonnais et son désir de s’ouvrir aux étrangers.

 

Après sa monographie de l’École du Louvre consacrée à la vie artistique à Lyon au XIXe siècle (1999), Clotilde Roth-Meyer a soutenu en 2004 sa thèse de doctorat d’histoire de l’art sur « Les marchands de couleurs à Paris au XIXe siècle » (sous la dir. de Bruno Foucart, université Paris Sorbonne Paris IV). Depuis janvier 2006, elle est assistante de recherches au Centre allemand d’histoire de l’art dans le cadre du projet sur « les relations artistiques entre la France et l’Allemagne, 1789-1870 ». Elle a signé plusieurs notices dans le catalogue d’exposition Die schönsten Franzosen kommen aus New-York (Berlin, Nationalgalerie, 2007), dont « Les collectionneurs » et « Le commerce d’art ». Parmi ses articles relatifs à la critique d’art et à la vie artistique citons : « Le phénomène de la location de tableaux par les marchands de couleurs à Paris au XIXe siècle », Histoire de l’art, avr. 2006 ; « Histoire de L’Artiste », Nouveaux Cahiers du Second Empire, avr. 2007.


 

CRITIQUER

Présidente de séance : Chantal GEORGEL

Conservateur en Chef au musée d’Orsay

 

 

 

Régis LATOUCHE

Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’université de Nancy II

 

Marché de l’art et système de propagande : l’École de Nancy et la revue Nancy artiste

 

L’École de Nancy s’est inventée une place particulière sur le marché de l’art français de la fin du XIXe siècle et du début du XXe. Ce mouvement lie l’artiste, l’industriel, le scientifique, le commerçant et le pédagogue. Il repose sur un patriotisme provincial qui s’oppose au milieu parisien et revendique ses propres sources et structures. L’organe commun de l’École de Nancy est Nancy artiste (1887-1914). Si cette revue répond aux codes d’un bulletin provincial d’art (soutien aux jeunes artistes, organisation d’expositions, nouvelles diverses, comptes rendus d’expositions), elle se revendique aussi comme un organe de formation artistique tourné vers les mouvements d’Europe centrale. C’est encore un moyen de propagande efficace qu’utilisent les industriels-artistes pour imposer une école d’artisanat d’art, pour imposer les architectes des projets urbains et l’esthétique des grandes manifestations.

Je me propose d’étudier cette revue en utilisant les outils des sciences de l’information et de la communication : généalogie des liens (financiers et humains) entre la revue et les journaux locaux et nationaux, entre les collaborateurs de la revue et les autorités ; étude du système propagandiste et de son influence.

 

Maître de conférences HDR à l’Institut Européen du Cinéma et de l’Audiovisuel (université de Nancy II), membre du CREM (université Paul Verlaine, Metz), Régis Latouche travaille sur les systèmes de propagande, sur la communication interdite et sur la production audiovisuelle. Ses principaux objets d’étude sont la presse, les circuits touristiques, les maisons de tolérance, les axes de communication, la grande guerre, les films domestiques et le genre documentaire. Parmi ses publications, citons : Léopold Poiré, évolution d’une esthétique photographique, Haroué, PLI, 2001 ; « Le cinéma, Sadoul et le Comité Nancy-Paris », dans Une expérience moderne, Lyon, Fage, 2006 ; « Les vues stéréoscopiques et les médias », dans La guerre en relief, Metz, Serpenoise, 2006.

 

 

Dominique DUSSOL

Professeur en histoire de l’art contemporain à l’université de Pau et des Pays de l’Adour

 

La critique d’art dans les Salons provinciaux du XIXe siècle : l’exemple de la Société des amis des arts de Bordeaux

 

« Il y a à Bordeaux un mobile d’activité assez rare en province : c’est une presse locale ardente, jeune, singulièrement douée pour la critique » constatait, en 1869, Philippe Burty dans La Gazette des beaux-arts. La critique d’art est apparue et s’est développée à Bordeaux, comme dans la plupart des grandes villes de province, dans le sillage de la Société des Amis des arts. Cette critique était-elle autonome ou dépendante de la critique parisienne ? Présentait-elle des traits provinciaux ? A-t-elle été influente sur le goût ou le marché local ? Outre ces questions, qui permettent de définir son rôle et d’apprécier son efficacité, on remarquera que les grands débats esthétiques ne se livrent pas à Bordeaux avec la même pertinence et la même actualité qu’à Paris, la critique provinciale ne se plaçant pas dans une problématique d’avant-garde. En revanche, elle rend compte de ce qui a été la vie réelle de la scène artistique, vécue par les contemporains et non par les générations suivantes. Il est intéressant à ce titre de considérer aujourd’hui ce matériau souvent sous-estimé qui permet une meilleure connaissance de l’ensemble du champ artistique et critique du XIXe siècle.

 

Les travaux de Dominique Dussol portent notamment sur le marché de l’art local et ses acteurs – Art et bourgeoisie. La Société des amis des arts de Bordeaux (1851-1939) (Bordeaux, Le Festin/Atelier du CERCAM, 1997) ; « Alfred Smith ou la carrière d’un peintre ‘officiel’ de province » dans Peinture et société au temps des impressionnistes. Alfred Smith-Alfred Roll (Bordeaux, Musée des beaux-arts de Bordeaux, 2007-2008) –, ainsi que sur la presse locale et la critique d’art – « La place de Rosa Bonheur dans l’art animalier, à travers la presse de 1841 à 1899 », dans Rosa Bonheur (1822-1899) (Bordeaux, Musée des beaux-arts de Bordeaux, 1997) ; « Entre le genre et l’histoire, Évariste Luminais et la critique de son temps », dans Évariste Vital Luminais, peintre des Gaules, 1821-1896 (Carcassonne, Musée des beaux-arts, Charleville-Mézières, musée de l’Ardenne, 2002-2003) ; « Alfred-Philippe Roll et Bordeaux : ‘l’apôtre attendu de la lumière et du plein air’ », dans Peinture et société au temps des impressionnistes. Alfred Smith-Alfred Roll (id.).

 

 

Sophie PAULIAC

Docteur en histoire de l’art contemporain – université de Paris X Nanterre

 

Le regard de L’Artiste sur les arts en province

 

Dès sa première année de parution, L’Artiste participe à l’enthousiasme général en faveur des départements et de leurs richesses en publiant dans son intégralité le premier rapport de Ludovic Vitet sur les monuments de province. Les arts en province vont ensuite être le sujet d’innombrables articles, tout au long de l’existence de la revue (1831-1904). La recherche d’un nouveau lectorat n’est bien sûr pas étrangère à cet enthousiasme, c’est pourquoi L’Artiste rend aussi compte des ventes publiques et des expositions des sociétés des amis des arts dans les départements. Dans les dernières années du siècle, elle présente également une série sur les galeries de province en 1882 et des articles sur les musées de France, dont le premier date de 1847. Pour L’Artiste, le rôle des expositions dans les départements est essentiel : ces manifestations permettent à l’art régional de s’épanouir et fournissent aux artistes locaux un substitut aux expositions parisiennes. La revue encourage d’ailleurs le développement des sociétés d’amateurs et d’artistes en province, système qui lui semble être le meilleur moyen de promotion en dehors des institutions officielles.

Parallèlement, L’Artiste s’intéresse fortement au sort des musées. La revue prend notamment position en faveur de l’établissement d’un inventaire général des collections de province et publie également en 1874 le rapport qu’Arsène Houssaye, alors directeur de la revue, avait adressé au ministre sur la question de l’administration des musées.

L’action de la revue en faveur d’un soutien aux artistes en province et au développement d’une vie artistique riche n’aurait pu se faire sans le concours de deux personnalités : Philippe de Chennevières et Clément de Ris.

L’importance que le journal accorde à la vie des musées et aux expositions de province témoigne de l’intérêt pour l’art national, thème qui fait sa réapparition après la guerre de 1870-1871 et se retrouve au centre des réflexions menées par L’Artiste.

 

Sophie Pauliac a soutenu en 2004 une thèse de doctorat sur « Les institutions artistiques françaises en débat dans la revue L’Artiste de 1848 à 1904 » (sous la dir. de Ségolène Le Men, université de Paris X Nanterre), dont la publication est à venir aux éditions Ellug (université Stendhal, Grenoble III). Rédactrice en chef des Cahiers Daumier, nouvelle revue semestrielle sur la caricature et le dessin de presse, et responsable du contenu scientifique du site internet de l’Association des amis d’Honoré Daumier, elle a collaboré à deux ouvrages dirigés par Noëlle Lenoir : La vie politique de Daumier à nos jours, Paris, Somogy, 2005 ; Les artistes et la Justice, de Daumier à nos jours, Paris, Somogy, 1999.

 

 

Dominique LOBSTEIN

Chargé d’études documentaires au musée d’Orsay

 

Les artistes normands au Salon : une publication pour une école ?

 

Sous différentes formes, et sous la plume de différents commentateurs, plusieurs textes portant le même titre, « Les artistes normands au Salon », furent publiés des années 1850 aux années 1890. À travers une analyse des formes de la publication (de l’article à l’opuscule développé et enfin au livre, publiés à Caen, à Rouen ou à Paris), de l’origine de ses auteurs (du conservateur de musée parisien au nobliau amateur ou au journaliste appointé), et du contenu de ces publications, il est possible d’étudier les stratégies de promotion locale des artistes qui pouvaient se prévaloir d’avoir été reçus dans les manifestations officielles parisiennes. Ces données permettent de s’interroger sur l’existence d’une école normande de peinture revendiquée par les différents commentateurs.

À défaut de connaître les résultats de ces tentatives chez les collectionneurs particuliers, l’exploitation des inventaires de quelques musées durant la même période permet, d’une part, de connaître le comportement des édiles, oscillant entre désirs d’acquisitions et demandes de dépôts d’œuvres achetées par l’État, et, d’autre part, celui de la Direction des Beaux-Arts parisienne, face à la promotion des artistes normands dans leur région.

 

Les recherches de Dominique Lobstein ont surtout porté sur l’organisation administrative des manifestations officielles dans la seconde moitié du XIXe siècle, sur les collectionneurs et sur les critiques d’art. Ces différents axes de recherches l’ont amené à participer à plusieurs expositions liées à ces thèmes et à collaborer au commissariat de : Des amitiés modernes. De Rodin à Matisse. Carolus-Duran et la Société nationale des beaux-arts (1890-1905) (Roubaix, La Piscine, musée d’art et d’histoire André Diligent, 2003) ; Blicke auf Carmen (Graz, Landesmuseum Johanneum, 2005) ; Jules Bastien-Lepage, 1848-1884 (Paris, musée d’Orsay, Verdun, Centre mondial de la Paix, 2007). On lui doit de nombreux articles et plusieurs ouvrages dont les plus récents sont le Dictionnaire des Indépendants, Dijon, L’Échelle de Jacob, 2003 et Les Salons au XIXe siècle. Paris capitale des arts, Paris, La Martinière, 2006. Il prépare actuellement la publication annotée de recueils méconnus de critiques de Salons.


 

Paris-province, PROVINCE-PARIS : stratÉgies de DIFFUSION, politiques d’achat

Président de séance : François FOSSIER

Professeur d’histoire de l’art contemporain à l’université Lumière Lyon II

 

 

 

Geneviève LACAMBRE

Conservateur en chef honoraire au musée d’Orsay

 

À la recherche d’amateurs : l’exemple de la participation du peintre parisien Gustave Moreau aux expositions de province

 

Gustave Moreau, comme ses proches amis Chassériau, Fromentin ou Berchère, participe à diverses expositions provinciales. On le trouve ainsi à Lyon, Bordeaux, Amiens, Rouen et Douai entre 1853 et 1872. Correspondances et documents divers, conservés notamment dans les archives du musée Gustave Moreau, apportent des éclairages variés sur les rapports de l’artiste avec les organisateurs locaux et sur les résultats obtenus auprès des amateurs. Il convient de prendre aussi en considération le rôle de ces envois dans la formation des artistes résidant en province, en rappelant que c’est à Bordeaux qu’Odilon Redon découvrit Œdipe et le Sphinx de Gustave Moreau, ce qui ne fut pas sans conséquence sur son art.

 

Geneviève Lacambre, conservateur général honoraire du patrimoine, chargée de mission au musée d’Orsay, a débuté au département des Peintures du musée du Louvre, puis, à partir de 1979, a été nommée au musée d’Orsay. Elle a été chargée en outre, à partir de 1985, de la conservation du musée Gustave Moreau. Parmi les nombreuses expositions autour de l’œuvre de Gustave Moreau qu’elle a organisées, citons Gustave Moreau 1826-1898 (Paris, Galeries nationales du Grand Palais, Paris, Art Institute, Chicago, Metropolitan Museum of art, New York, 1998-1999) et, en 2000, l’exposition Gustave Moreau. Diomède dévoré par ses chevaux au Musée des beaux-arts de Rouen, centrée sur la participation de Gustave Moreau aux expositions municipales de cette ville.

 

 

Nicholas-Henri ZMELTY

Doctorant en histoire de l’art contemporain – université de Picardie Jules Verne, Amiens ; chargé d’études et de recherches à l’INHA

 

Edmond Sagot et l’affichomanie en province : du commerce à la reconnaissance d’une nouvelle forme d’art

 

En 1891, le marchand d’estampe parisien Edmond Sagot publie son premier catalogue de vente d’affiches. Bien que rapidement concurrencé, il s’impose comme le leader d’un nouveau marché né de l’engouement sans précédent des collectionneurs pour l’affiche illustrée. Alors que celle-ci se développe essentiellement à Paris, quelques-uns des plus grands « affichomaniaques » sont pourtant domiciliés en province : Bourcard à Nantes, Henriot à Reims, Dutailly à Chaumont ou encore de Gallaix à Amiens. Sagot apparaît alors aux yeux de tous comme un relais incontournable. Si chacun accroît sa collection par l’intermédiaire du marchand, ces affichomaniaques prennent également part à diverses initiatives pour lesquelles ils sollicitent Sagot en qualité d’expert : publication d’articles critiques, expositions, soirées « d’affiches animées » basées sur le principe des tableaux vivants etc. L’affichomanie en province n’a dès lors rien d’anecdotique : la plus importante exposition d’affiches de la fin du XIXe siècle a lieu en 1896, non pas à Paris, mais au Cirque de Reims, sous l’impulsion d’Alexandre Henriot et sous le haut patronage de Puvis de Chavannes.

L’étude des correspondances conservées dans les archives de la galerie Sagot-Le Garrec à la Bibliothèque de l’INHA, permettra d’étudier la nature des relations entre le marchand et les quatre grands affichomaniaques provinciaux cités plus haut : ces échanges d’abord commerciaux traduisent aussi la volonté de diffuser le goût pour l’affiche illustrée en dehors des murs de la capitale et d’œuvrer en faveur d’une plus grande (re)connaissance de cette nouvelle forme d’art.

 

Nicholas-Henri Zmelty poursuit actuellement sa thèse de doctorat sur « L’affiche comme genre : la place de l’affiche illustrée à la croisée des débats artistiques, intellectuels et politiques en France au tournant du XIXe et du XXe siècle » (sous la dir. de Rémi Labrusse). Il a été commissaire de l’exposition La Plume 1889-1899 une revue « Pour l’Art ! » (Paris, INHA, 2007). On lui doit plusieurs études dont « Coup d’œil sur une revue artistique de la fin du XIXe siècle : L’Estampe et l’affiche (1897-1899) », Corridor, sept. 2007 ; « L’affiche illustrée, miroir de la modernité culturelle et esthétique en France à la fin du XIXe siècle », dans Le Salon de la rue, l’affiche illustrée de 1890 à 1910 (Strasbourg, musée d’art moderne et contemporain, 2007-2008).

 

 

Marie-Claude GENET-DELACROIX

Professeur d’histoire de l’art contemporain à l’université de Reims Champagne Ardenne

 

Les interactions et échanges artistiques Paris-Province à partir de la prosopographie du Conseil Supérieur des Beaux-Arts (1875-1914)

 

Par son caractère de « parlement des Arts et des artistes » et son rôle dans la reconnaissance symbolique et la consécration des artistes, le Conseil Supérieur des Beaux-Arts constitue un observatoire privilégié des milieux de la culture. Il permet donc d’analyser précisément, sous toutes leurs formes, les relations que la capitale et les régions françaises entretiennent entre elles d’une part, et avec le marché international de l’autre. L’étude de la composition du Conseil permet de décrire et d’interpréter la dynamique des interactions et des échanges artistiques entre Paris et la province dans tous ses aspects académiques, professionnels et sociaux. Il permet, à ce propos, d’étudier la pluralité des systèmes géographiques et institutionnels (local, national, international), ainsi que les types d’échanges et de réseaux entre les artistes et leurs différents commanditaires privés et/ou publics ; Alfred Roll est à cet égard un cas représentatif. Enfin, il est possible d’aborder à partir du rôle critique des membres du Conseil la redistribution des élites, des pouvoirs et des savoirs à l’intérieur de l’espace national, en s’intéressant notamment aux expositions.

 

Marie-Claude Genet Delacroix a publié une partie de sa thèse de doctorat d’État sous le titre Art et État sous la IIIe République, 1870-1940 (Paris, Publications de la Sorbonne, 1992) et a écrit avec Claude Troger, Du dessin aux arts plastiques, histoire d’un enseignement (Orléans, 1994). Elle a édité plusieurs colloques qu’elle a co-organisés : Les Américains et la France, 1917-1947. Engagements et représentations (Paris, Maisonneuve & Larose, 1999, en coll. avec F. Cochet et H. Trocmé), Les conversions, comme formes et figures de la métamorphose (Paris, L’Harmattan, 2002, en coll. avec F. Desbuissons et F. Gugelot), Historicisme et modernité dans la préservation et la mise en valeur du patrimoine culturel européen aux XIXe et XXe siècles (Paris, L’Harmattan, 2007, en coll. avec J.-C. Delorme et J.-M. Leniaud). Parmi ses derniers articles, signalons : « National Art national and French Art: History, Art and Politics during the Early Third Republic », dans Nationalism in French Visual Culture, 1870-1914, édité par June Hargrove et Neil McWilliam, Yale University Press, 2005 ; « Delacroix et les ‘Néos’ : pour le vrai contre le faux », dans Maïté Bouissy (éd.), Puissances du gothique. Entre Forme et Symbole (XIXe-XXe siècles), n° spécial de Représentations et Sociétés, 20, 2005 ; « Académisme et avant-garde dans la peinture française au XIXe siècle », dans Academii Roudogiest : Vchera, Sivodnia, Zavtra ?, Saint-Pétersbourg, 2007.

 

 

France NERLICH

Maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’université François Rabelais, Tours

 

La fin de l’exclusion artistique ou comment le marchand d’art Louis Friedrich Sachse partit à la conquête de la province allemande et française

 

Le marchand d’art berlinois Louis Friedrich Sachse (1798-1877), auquel l’histoire de l’art n’a pas encore rendu la place qu’il mérite, est une figure centrale dans l’émergence du marché de l’art moderne en Allemagne. Convaincu de l’importance du commerce d’art comme fondement d’une conscience européenne et de la priorité des échanges commerciaux et culturels entre la France et l’Allemagne, il a été un acteur infatigable de la promotion des artistes français en Allemagne et des artistes allemands en France. Mais son action de médiateur ne concernait pas seulement les relations entre nations : très vite, en effet, Sachse a tenu compte de la « périphérie », de la province, et a étendu son activité de diffusion à toute la Prusse pour aller de Halberstadt à Königsberg ou Danzig. Il ne se contenta pas en effet de présenter des œuvres étrangères au public berlinois, mais se servit très tôt du réseau des sociétés d’art prussiennes pour connecter les provinces au « grand mouvement des arts ». Les commentaires sur cette stratégie de diffusion ne manquent pas et le débat se fait assez vif par rapport à la collusion d’intérêt entre commerce et engagement civique au profit des beaux-arts. On peut néanmoins observer que cette stratégie de « désenclavement » porte ses fruits et engendre la création de collections locales qui souvent se transforment en institutions muséales. Face à cette idée de « décentralisation » il faut noter que Sachse – s’il comptait la plupart de ses contacts professionnels à Paris – prenait également en compte les villes de province françaises, en particulier Rouen où il intensifia ses relations avec des artistes comme Eugène Balan. Il s’agira donc ici de rappeler à quel point les enjeux du désenclavement de la province – qu’elle soit allemande ou française – ont été compris tôt dans la mise en place d’un marché de l’art international, mais aussi de comprendre l’évolution de la notion de « province artistique » jusqu’à l’aube du XXe siècle.

 

Parallèlement à ses fonctions de maître de conférences, France Nerlich est conseillère scientifique dans le projet de recherche « France-Allemagne, 1789-1870. Les transferts artistiques » (Centre allemand d’histoire de l’art, Paris). Elle a achevé en 2004 une thèse de doctorat en cotutelle (sous la dir. de Barthélémy Jobert et Thomas Gaehtgens, Paris Sorbonne Paris IV, Freie Universität Berlin) sur « La réception de la peinture française en Allemagne de 1815 à 1870 ». On lui doit notamment des études sur « David, peintre révolutionnaire. Le regard allemand », Annales historiques de la Révolution Française, avr.-juin 2005) ; « Les voies de l’art. La présence de la peinture française en Allemagne, 1789-1848 », dans La Circulation des œuvres d’art. 1789-1848, Presses universitaires de Rennes, INHA, Getty Research Institute, 2007 ; « La réception des tableaux italiens de la collection d’Eugène de Beauharnais, duc de Leuchtenberg », dans Le goût pour la peinture italienne autour de 1800 : prédécesseurs, modèles et concurrents du cardinal Fesch, Ajaccio, musée Fesch, 2006. Parmi ses prochaines publications, citons « Heinrich Heine et Paul Delaroche. Une certaine idée de l’art moderne », « ‘Un rôle qui ne le ferait pas rire’. La réception critique d’Ingres en Allemagne au XIXe siècle » et « Le Panthéon des Allemands ou comment l’Allemagne éclairée honore ses grands hommes ».