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Loxias 25,

Loxias 25, "Littératures du pacifique"

Publié le par Florian Pennanech (Source : Odile Gannier)

Parution de Loxias 25, "Littératures du pacifique", sous la direction d'Odile Gannier et Sandhya Patel.


L'espacedu Pacifique ne produit pas un univers littéraire homogène et univoque.Issues d'influences très diverses, les littératures du Pacifiqueconstituent évidemment une somme d'oeuvres particulières et ne sauraientse conformer à un modèle unique, mais elles se conçoivent avant toutcomme faisant partie d'un ensemble de référence signifiant. Les étudesactuelles tendent souvent à fragmenter les domaines en se fondant surdes répartitions entre aires anglophones et francophones, alors qued'autres liens existent indéniablement à l'intérieur de la zonePacifique, avec une circulation des oeuvres et des thèmes. Ce numéro de Loxias vise à examiner la production littéraire dans une aire géographique cohérente.

Uncertain nombre d'oeuvres écrites par des voyageurs ou des résidentsd'origine étrangère ont été situées, au moins en partie, dans lePacifique, ce qui a donné aux métropoles et à l'Occident en général desreprésentations de type exotique. Mais aujourd'hui, les écrivains duPacifique s'expriment et se publient eux-mêmes, en Australie, enNouvelle-Zélande, aux Samoa, à Hawai'i, en Polynésie française, enNouvelle-Calédonie… Les problèmes de langue certes y croisent lesquestions des minorités (aborigènes, maories, ainsi que toutes lespopulations qui habitaient les îles avant l'arrivée des étrangers oudes colons). La littérature née dans le « triangle polynésien », dansles îles du Pacifique, n'est pas exclusivement, tant s'en faut, écriteen langues polynésiennes : le français et l'anglais particulièrementfournissent une part importante de la production. Des écrivains commeAlbert Wendt, Alan Duff, Sia Figiel écrivent en anglais, mais unanglais parfois très mâtiné de samoan ou d'autres langues de la zonePacifique. Chantal T. Spitz a opté pour un français véhiculaire.Certains auteurs ont fait un choix radical en utilisant la langued'origine étrangère, d'autres ont décidé d'écrire dans les languesvernaculaires, d'autres enfin accommodent dans des proportionsvariables les deux modes d'expression. La littérature pour la jeunesse,les comptines et chansons de Nouvelle-Calédonie par exemple sont lereflet de cette coexistence de langages.

L'ancragedans une réalité locale est donc essentiel dans la caractérisation deces littératures. Aussi est-il tentant de proposer de ces textes unelecture anthropologique, qui met les romans en correspondance avec lesgrands mythes polynésiens. En Australie également, la réalité aborigènese perpétue grâce à des romans contemporains, comme ceux d'AlexisWright.

Cependant, ilserait réducteur de ne considérer les oeuvres nées dans le Pacifique quecomme purs produits d'un espace et d'une culture : elles peuvent aussirelever tout simplement de la Littérature et être appréciées commetelles en dehors d'un lectorat auquel, peut-être, on les a cruesréservées et auprès duquel on pense qu'elles font exclusivement sens.Des rapprochements avec des écritures des Antillaises ou de l'OcéanIndien permettent d'élargir la perspective en soulignant les parentésde ces littératures insulaires. De la sorte, ces oeuvres qui sontsouvent lues avec la grille de la critique postcoloniale n'en sont paspour autant nécessairement appréciées avec plus de justesse si l'on sefocalise sur cette approche. Si les questions d'identité, dereprésentations préconçues, de clichés, sont des thèmes fréquemmentabordés, ces textes résonnent aussi d'autres échos et il est utile dese poser avec plus d'acuité la question de la réception et examiner desthèmes propres à cet espace, entre autres les rapports complexes queces îles entretiennent avec leurs (ex-)métropoles. Il ne s'agit pasd'appliquer simplement une lecture « postcoloniale » à une oeuvreparticulière, quelque intérêt qu'elle puisse revêtir.

Odile Gannier

Directrices du numéro :

Odile Gannier, Professeur de littérature comparée, Université de Nice, gannier@unice.fr

Sandhya Patel, MCF de Langues et Littératures du Commonwealth, Université de Clermont-Ferrand, sandhya@thinkingapp.com

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