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L’Interview littéraire : mise en scène et (re)configuration de soi (Arras)

L’Interview littéraire : mise en scène et (re)configuration de soi (Arras)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Jaime Céspedes)

Appel à communications pour le séminaire doctoral interdisciplinaire

"L’Interview littéraire : mise en scène et (re)configuration de soi"

Séminaire doctoral Transferts Littérature - Cinéma

Université d’Artois (Arras), le mercredi 15 janvier 2020

Laboratoire Textes et Cultures, EA 4028

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DESCRIPTION :

Dans le cadre du cycle "Transferts Littérature - Cinéma", le séminaire interdisciplinaire doctoral du laboratoire Textes et Cultures de l'Université d'Artois consacre la journée du mercredi 15 janvier 2020 à l'étude d'interviews audiovisuelles avec des écrivains. Comme lors de la session du 21 mars de l'année dernière, cette deuxième session du séminaire présentera des pratiques méthodologiques centrées sur des cas qui servent de modèles aux étudiants, enseignants et chercheurs du laboratoire et de l'extérieur intéressés par cet axe.

Les communications dureront 30 minutes (y compris les séquences vidéo) et s'articuleront autour de l'étude d'une ou plusieurs personnalités littéraires interviewées dans un média audiovisuel (télévision, Internet ou autres moyens). L'intérêt de cette modalité réside dans la manière dont un écrivain façonne son image publique dans l'interaction avec un journaliste, en se basant sur des explications sur ses livres mais aussi en ajoutant des données externes à celles-ci que l'auteur "révèle" dans les interviews avec les médias (et non pas dans sa littérature). Cette situation comporte deux aspects qui peuvent être étudiés séparément ou dans leur ensemble en fonction d'une stratégie de communication qui, dans de nombreux cas, est bien calculée par l'auteur, parfois même avec la complicité de l'intervieweur. D'une part, on peut s'intéresser à la façon dont ses livres ou l'un de ses livres, généralement le plus récent avant l'entretien, ont été reçus et interprétés à la lumière des déclarations de l'auteur sur leur signification. De nombreuses critiques littéraires se fondent sur ces affirmations et ne sont pas tirées de la lecture du texte, qui produit des critiques qui relient parfois de manière déviante les paroles de l'auteur à son propre travail, selon plusieurs objectifs. D'autre part, l'auteur peut profiter de l'entretien pour établir des ponts entre sa vie personnelle et la vie de ses personnages et justifier ainsi sa dimension autobiographique ou, au contraire, la nier. Cette ambivalence découle des jugements portés sur les auteurs qui écrivent sur des choses qu'ils ne connaissent pas en personne, en supposant qu'il est nécessaire d'avoir vécu quelque chose personnellement pour qu'il soit légitime d'en parler. De ce point de vue, elle soulève des problèmes épistémologiques intéressants. Par exemple, un critique d'art qui ne sait pas bien peindre ne pourrait jamais être un bon critique d'art (un jugement souvent rejeté parce que cela voudrait dire que les critiques d'art seraient mauvais). Ainsi, un auteur peut "bien" parler de choses qu'il ne sait pas en personne mais qui peuvent être connues par l'étude. D'où l'intérêt des questions sur la motivation de l'auteur et sur la documentation ou les sources d'information qu'il a pu utiliser pour compenser son manque de connaissance directe des faits auxquels il est confronté et du contexte dans lequel ses personnages évoluent. Dans le cas contraire, comme nous l'avons dit, les questions d'une entrevue ont tendance à être très axées sur des questions autobiographiques.

 

Les auteurs professionnels et les plus médiatiques connaissent bien l'importance de ce type de questions à partir desquelles les journalistes émettent souvent leurs opinions et conseils. L'auteur est conscient de la dimension rhétorique de l'interview : beaucoup de lecteurs optent pour son livre après avoir entendu l'auteur lui-même en parler. Ainsi, cette situation pragmatique fréquente dans le monde littéraire dépend de l'image, de la figure de l'auteur comme personne morale plutôt que de la textualité de ses livres. Pour l'auteur conscient de cette situation (et l'auteur professionnel l'est toujours), l'entretien audiovisuel est une évaluation ou une réévaluation de sa personnalité qu'il doit résoudre favorablement pour vendre son dernier livre, même si l'entretien n'en tourne pas souvent autour, et pour consolider ou élargir le champ de son image médiatique d'auteur à écouter et à lire. A cet égard, l'image est aussi importante ou plus importante que les mots prononcés dans une interview plus ou moins improvisée, car entre l'interview préparée et préenregistrée et l'interview totalement spontanée il existe différents degrés. Dans l'interview audiovisuelle, contrairement à l'interview publiée dans la presse écrite ou à la radio, l'auteur peut utiliser une rhétorique de l'image ajoutée à sa rhétorique verbale pour arriver à un concept d'image médiatique qui forme sa figure littéraire, intellectuelle ou sociale qui peut avoir et a souvent des implications politiques importantes. Il y a des auteurs considérés comme de droite ou de gauche, bien qu'ils aspirent à être accessibles et appréciés par le plus grand nombre de lecteurs possible. Sur Internet, le contrôle des médias est beaucoup moins décisif, car l'internaute a la liberté d'aller sur les sites qu'il souhaite et ne dépend pas tant des gatekeepers qui régulent le marché culturel, même si leur influence est également présente sur Internet.

Les communications doivent mettre en évidence l'intérêt d'étudier l'interaction entre un ou plusieurs enquêteurs et une ou plusieurs personnes interrogées, en tenant compte d'aspects tels que l'image des deux, le décor, leur tenue, leurs gestes et interruptions, leur proximité ou distance et tous les éléments kinesthésiques (du langage du corps) ou proxémiques (de l'espace environnant) qui font partie de la communication non verbale, simultanément avec un entretien oral ou une conversation. La manière dont le contexte est présenté et la présentation de l'auteur est faite (parfois par l'intervieweur, parfois par la personne interrogée) peut également être analysée, de même que les réactions produites par une entrevue et son impact sur certains changements de situation prévus ou non par l'auteur interviewé. L'écart entre ce qu'un auteur dit et ce qu'il publie peut avoir attiré l'attention à plus d'une occasion, ainsi que les différences d'opinion selon les médias sur le même auteur. L' "écart herméneutique ou rhétorique", comme l'appelait Paul Ricœur, ou la distance entre ce qui est interprété d'une œuvre et ce que dit textuellement une œuvre, peut aussi être étudié à la lumière des déclarations d'un auteur. L'évolution de l'interview audiovisuelle en tant que genre peut également faire l'objet d'une étude en soi, étayée par des exemples de différents moments de l'histoire de l'image audiovisuelle et par l'évolution de l'attitude des auteurs (littéraires) quant à l'importance de cultiver leur propre image comme complément indispensable à leur travail littéraire.

Langues acceptées : français, espagnol, anglais.

Interventions prévues : 6 (maximum).

Le déplacement en France est pris en charge.

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Envoi des propositions : Jaime CESPEDES (jaimecespedes@yahoo.fr) pour le 20 décembre 2019.

Laboratoire Textes et Cultures EA 4028

Université d’Artois

Maison de la Recherche

9 rue du Temple

62000 Arras