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L'écrivain préféré

L'écrivain préféré

Publié le par Marielle Macé

Fabula-LHT n° 4. « L’écrivain préféré »
Dossier coordonné par Marielle Macé



Il existe, dans nos expériences littéraires, des situations ou des moments où l’ensemble de la littérature est ramené à une seule figure, qui sert à la fois d’objet privilégié et de modèle intérieur, celle de l’écrivain préféré, investie de toutes sortes de valeurs et à laquelle on revient sans cesse. L’écrivain préféré est celui qui, pour un temps et pour un individu, vaut la littérature et permet de la penser entièrement, dans une relation de face à face ou un entêtement qu’exemplifieraient volontiers le rapport de Gracq à Breton, les comptes que Sartre dit vouloir régler avec Flaubert, ou le recours à Proust dans une célèbre conférence prononcée par Barthes en 1978 – « Ce sera, si vous voulez bien, Proust et moi […] En disposant sur une même ligne Proust et moi-même je ne signifie nullement que je me compare à ce grand écrivain, mais d’une manière tout à fait différente, que je m’identifie à lui : confusion de pratique, non de valeur ».

Le romancier et, partant, le « romanesque » semblent constituer des points d’accroche privilégiés de cette réflexion. Question d’affects, mais également d’extension : la figure de l’écrivain préféré rend compte d’une vie de lectures, de ses centrages mais aussi de ses limites ; selon quelle amplitude réelle de livres lus et non lus, placés au centre ou rejetés volontairement en périphérie, décidons-nous (ou sommes-nous plus concrètement obligés, faute de voisinages avec la culture) de nous faire une idée de la littérature ? Une interrogation sur l’amplitude ne manquera pas, en outre, de mesurer ce qui, de l’écrivain, est retenu (isolé, potentialisé, ou transformé) pour être préféré : de Stendhal, les romans ou les écrits égotistes ? De Proust, la satire sociale ou le roman de la conscience ? Les écrivains préférés sont aussi joués les uns contre les autres ; quelle opération de distinction se dissimule dans les préférences ?

Le brassage et le maintien de la mémoire des œuvres doit beaucoup à ces raccourcis ou à ces allégories, et il importera d’en faire un ancrage pour une réflexion sur la construction de l’histoire littéraire ; quels récits, en-deçà même de la logique mémorielle désormais privilégiée dans les réflexions sur l’historicité de la littérature (puisqu’il s’agit ici d’une relation, incarnée au présent, et non d’une dynamique de souvenir et d’oubli), la figure de l’écrivain préféré rend-elle possibles, ou occulte-t-elle ? On pourra élargir l’analyse au statut de ces livres qui tiennent lieu de tout, de ces œuvres qui valent métonymiquement pour tout un genre, toute une forme, toute une période, voire toute une littérature, dans son histoire nationale.

Il s’agit donc de réfléchir à ce que c’est que concevoir et vivre la littérature selon l’auteur aimé. La question est à l’intersection de bien d’autres catégories : celles de l’autorité, de l’exemplarité, du corpus parfois restreint que se choisissent les théories, du statut de classique ou du canon, des pratiques concrètes de lecture, des enjeux et de la temporalité de la re-lecture, de la mémoire des œuvres, de l’identification (dans ses versions éventuellement les plus cognitives), de l’imitation et du commentaire, ou encore de l’influence… ; mais elle a cette particularité de les rapporter à une conception existentielle de l’expérience esthétique, et s’inscrit en cela dans la réflexion actuelle sur la place des émotions et de l’imagination de la vie dans la relation aux œuvres.


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Les textes, de libre longueur, sont à adresser par mail avant le 15 octobre à Marielle Macé (mace@fabula.org ) et Jean-Louis Jeannelle (jeannelle@fabula.org ), qui les soumettront anonymement au comité de lecture de la revue.


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