Essai
Nouvelle parution
H. Rousso, La Dernière Catastrophe. L'histoire, le présent et le contemporain

H. Rousso, La Dernière Catastrophe. L'histoire, le présent et le contemporain

Publié le par Matthieu Vernet

Compte rendu publié dans le dossier critique d'Acta fabula "L'aire du témoin" (Juin-Juillet 2013, Vol. 14, n° 5) : "Écrire le temps présent, écrire la catastrophe" par Maxime Decout.

 

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Henry Rousso, La Dernière Catastrophe. L'histoire, le présent et le contemporain

Paris : Gallimard, coll. "NRf Essais", 2012

EAN 9782070759729

338p.

prix : 21EUR

Présentation de l'éditeur :

Naguère suspecte, voire rejetée, l'histoire du temps présent a pris aujourd'hui une place sans commune mesure dans l'espace public comme à l'Université - avec l'explosion du nombre d'étudiants en cette matière. A cela, plusieurs raisons : la mémoire et le patrimoine ont envahi l'espace public et scientifique ; le témoignage a pris l'allure d'un impératif social et moral ; la justice temporelle s'est muée en tribunal de l'histoire pour juger de crimes politiques vieux de plusieurs décennies mais dont l'après-coup continue de cheminer dans notre présent.
Une évidence, dira-t-on. Mais mesure-t-on pour autant le revirement qui se joue ici ? Car le passé n'est plus cet ensemble de traditions à respecter, d'héritages à transmettre, de connaissances à élaborer ni de morts à commémorer ; c'est un constant «travail» de deuil ou de mémoire à entreprendre, tant s'est enracinée l'idée que si le passé doit être arraché des limbes de l'oubli, seuls des dispositifs publics ou privés peuvent l'en exhumer, avec ou sans l'aide de l'historien.
Tel est le «présentisme» : devenu un problème à résoudre, et désormais un champ de l'action publique, le passé - et singulièrement le passé proche, celui des dernières catastrophes en date - n'est pas oublié, il est constamment mobilisé et reformulé selon les urgences du jour. L'exigence de vérité propre à la démarche historique s'est muée en exigence sociale de reconnaissance, en politiques de réparation, en discours d'excuses à l'égard des victimes.
La question de la contemporanéité n'est pas nouvelle : elle s'est posée à travers les âges, mais Henry Rousso prend la mesure de sa profonde transformation au cours des deux grands après-guerres du XXe siècle et définit ses enjeux fondamentaux : comment écrire une histoire en train de se faire ? Comment mettre à distance la proximité apparente ? Comment se battre sur deux fronts à la fois - celui de l'histoire et celui de la mémoire, celui d'un présent que l'on ne veut pas voir passer et celui d'un passé qui revient hanter le présent ? La nouvelle histoire du contemporain, toute entière inscrite dans cette tension, est plus que jamais marquée par l'incertitude, l'instabilité et l'inachèvement.

Historien, Henry Rousso est né en 1954. Il en particulier a dirigé l'Institut d'Histoire du temps présent de 1994 à 2005. Depuis 2011, il est membre de l'école doctorale d'histoire de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Spécialiste internationalement reconnu de la France dans la Deuxième guerre mondiale, ses travaux portent plus largement sur l'histoire de la mémoire collective et les rapports entre histoire, mémoire et justice.
De lui, les Editions Gallimard ont déjà publié Vichy, l'événement, la mémoire, l'histoire (Folio histoire n°102), Les années noires. Vivre sous l'Occupation, (Découvertes Gallimard n° 156).

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On peut lire sur le site nonfiction.fr un article sur cet ouvrage:

"La nouvelle Clio ou l'héritage sans testament", par C. Ruby.

Et sur le site laviedesidees.fr:

"Le contemporain à travers les âges", par L. Campos.