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Georg Simmel et Marcel Proust : une esthétique sociale de la modernité (cours)

Georg Simmel et Marcel Proust : une esthétique sociale de la modernité (cours)

Publié le par Emilien Sermier (Source : Raffaello Rossi)

Le séminaire entend poursuivre et conclure le parcours entamé l’année précédente en analysant la pensée sociale de Simmel et de Proust dans une perspective comparative, à la fois théorique, historique et généalogique.

Au début du XXe siècle, le philosophe et sociologue allemand qui enseigne à Berlin et le romancier parisien, tout en s’ignorant réciproquement, se rencontrent dans une vision très originale de la société. Au cœur de leur analyse, on trouve les phénomènes « esthético-sociaux », ces aspects de la vie sociale dans lesquels la dimension esthétique, soit l’ensemble des qualités et des formes sensibles socialement partagées, se révèle fondamentale : l’imitation et la distinction, la mode, la sociabilité mondaine, le style de vie, la représentation du statut et du prestige, la consommation ostentatoire, l’hypersthésie et la néurasthénie modernes, les figures du snob, du blasé et du cynique… Les affinités qui relient les deux auteurs sont essentielles et philosophiquement très troublantes, mais seul Walter Benjamin semble les avoir reconnues. Elles s’enracinent dans leur intérêt pour le rôle central de la sensibilité et de la perception dans la vie de la conscience et dans la constitution des relations intersubjectives, dans leur regard « microscopique », dans leur conviction commune que la dimension dite « superficielle » du social exprime des significations profondes, aussi bien que dans une interprétation de la modernité fondée sur le caractère central de l’expérience esthétique.

Le corpus des textes simmeliens qui seront analysés comprend la Philosophie de l’argent (1900, « Le style de vie »), la grande Sociologie de 1908, et les essais d’esthétique sociologique (« Les grandes villes et la vie de l’esprit », « Sociologie des sens », « La mode », « Psychologie de la parure », « La sociabilité »...). Dans À la recherche du temps perdu, on privilégiera les trois premiers volumes, en particulier Le Côté de Guermantes (1920-1921).
L’interprétation des textes s’accompagnera d’une réflexion méthodologique sur la nature spécifique de la connaissance du social que l’on peut tirer des formes discursives et conceptuelles telles que le traité ou l’essai, ou de la représentation romanesque.

17 décembre : conférence d’Anne Simon “Proust et le sensible".

Programme provisoire des séances :

1.  Introduction. Présentation de l’approche esthético-sociale et récapitulation du parcours précédent. 2. Suite de la récapitulation sur l’esthétique sociologique de Simmel : sociologie des sens ; le style de vie à l’époque des métropoles et de l’économie monétaire, la vie nerveuse. 3. « Stimmung », aura et ambiance. Simmel-Proust-Benjamin, en passant par Léon Daudet. 4. Conférence de Maurizio Ferraris. 5. Proust et la connaissance du social. (Lecture de Descombes). 6. Les phénomènes purement sociaux I : la parure et la mode (Simmel). Le débat sur l’ornement à la Belle Époque. 7.  Proust : la mode, les apparences sociales. 8. Exposition et mise en scène. Simmel-Benjamin, Simmel-Goffman. Lectures goffmaniennes de Proust. 9. Les phénomènes purement sociaux II : la sociabilité mondaine. L’essai sur la Geselligkeit de Simmel. Simmel, Proust, les salons. 10. Proust : la mondanité (lecture de Deleuze). 11.  Les phénomènes purement sociaux III : Imitation et distinction (La différentiation sociale, Simmel). 12. Les Lois de l’imitation de Gabriel Tarde. Tarde et Simmel. Tarde et Proust. 13. Proust et l’aristocratie. Lectures de Benjamin et Adorno. La question de la persistance de l’Ancien Régime. 14.  Le snobisme chez Proust. (Lecture de Girard). 15.  Économie et esthétique : Simmel, La théorie de la classe de loisir de Veblen, la valeur sociale, le prestige. 16. Lectures bourdieusiennes de Proust. 17. Conférence d’Edmund White. 18. Conclusions.