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Femmes de sciences. Réalités et représentations, de l'Antiquité au XIXe siècle

Femmes de sciences. Réalités et représentations, de l'Antiquité au XIXe siècle

Publié le par Matthieu Vernet (Source : Adeline Gargam et Bertrand Lançon)

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L'accès des femmes aux étudeset à la pratique scientifique semble aujourd'hui un fait acquis, même s'ildemeure minoritaire. Pour autant, cet état de fait est le fruit récent d'unelongue et double évolution : celle de la distribution mentale et socialedes rôles dévolus aux deux sexes dans la société, et celle du statut de lascience au sein de la culture occidentale. Quand on parle du rapport entre lesfemmes et la culture de l'Antiquité aux temps modernes, on pense de prime abordau domaine littéraire car les femmes ont beaucoup écrit. Néanmoins, lesrecherches récentes, parmi lesquelles celles de L. Schiebinger, P. Phillips,d'E. Sartori, de G. Chazal et de J-P. Poirier, ont démontré que les femmes sesont intéressées aux sciences et ont pratiqué une activité scientifique,parfois de très haut niveau ; soit en collaborant aux travaux de lacommunauté masculine des savants, soit ce qui est beaucoup moins connu, de manièreautonome et émancipée. Depuis Hypatie jusqu'à Marie Curie, en passant parHildegarde de Bingen et Emilie du Châtelet, des femmes ont figuré parmi les élitesscientifiques en s'illustrant dans les mathématiques, la physique-chimie,l'astronomie, la médecine, et les sciences naturelles et occultes. Certaines lefirent en traduisant, en écrivant, en annotant ou en éditant des ouvrages fondamentaux ;d'autres menèrent des recherches expérimentales et inventèrent de nouveauxinstruments et procédés scientifiques ; d'autres encore enseignèrentelles-mêmes à des femmes et à des hommes – et pas des moindres . Elles participèrent,par cette activité variée, à l'avancement et la diffusion des connaissancesscientifiques en général, contribuant parfois même à l'élaboration et l'éclosiond'oeuvres masculines.

Tel est le premierobjectif de ce colloque : cerner et mettre en lumière le rôle insigne et multiple,parfois moteur, mais trop souvent méconnu de ces femmes de sciences depuisl'Antiquité jusqu'à l'aube du XXe siècle.

En effet, dans un mondeoccidental régi jusqu'aux temps modernes par l'Eglise et l'Université, ledomaine de la connaissance était un territoire d'hommes. Les femmes en étaienttenues à l'écart pour des raisons multiples, à la fois sociales, culturelles,idéologiques et religieuses. D'une part à cause de l'influence prééminente dansla chrétienté de la pensée paulinienne qui tendait à les minorer et à lessoumettre à l'ordre masculin. D'autre part à cause de leur exclusion des écoleset des universités. L'accession des femmes à la connaissance et à la pratiquescientifiques a sans nul doute été freinée par ces deux facteurs. La place dela Bible, perçue comme une vérité révélée, pouvait faire de toute recherche oudécouverte scientifique une menace théologique. Cette méfiance entretenue à l'égardde la science produisit durant la révolution scientifique une scission entrecertains représentants de l'Eglise et certains savants. Grâce à cela, denombreuses femmes purent faire leur entrée sur la scène scientifique.

Les femmes de sciencesapparurent pendant très longtemps comme des exceptions sociales et culturelles,tantôt décriées parce que femmes, tantôt admirées pour l'étendue de leur compétences.Le monde masculin était en effet mitigé : s'il était des hommes qui lesencourageaient dans leurs démarches et collaboraient avec elles, il en étaitaussi qui leur étaient résolument hostiles. Elles durent âprement gagner leurplace dans le sanctuaire du savoir scientifique. L'accession des femmescontemporaines au monde scientifique est le fruit d'une longue et difficileconquête intellectuelle à travers les époques. Cette conquête ne fut ni linéaireni progressive, mais connut des phases d'immobilisme, d'avancée et parfois derecul. Elle fut autant l'oeuvre de pionnières renommées que de laissées pourcompte qui méritent d'être réhabilitées.

Tel est le deuxièmeobjectif de ce colloque : examiner les phases de cette conquête et leursdifférentes raisons contextuelles, puis sortir de la pénombre des femmes éminentesdans leurs talents et leurs compétences, mais restées dans l'ombre des savantset des savantes de renom.

Ce colloque se donneaussi un troisième objectif qui a trait aux conditions sociales, culturelles etmentales de cette conquête.

Il s'intéressera d'abord auxmodes de formation et d'accès des femmes à un savoir primitivement puislonguement monopolisé par leshommes. Par exemple : les différents lieux d'enseignement, institutionnels ou non ; lessupports pédagogiques ; les précepteurs ; les réseaux de relations.Il se penchera aussi sur le statut social et familial de ces femmes et sonincidence éventuelle sur la nature de leur activité scientifique, privée oupublique. On n'oubliera pas le destin atypique ou extraordinaire de quelquesindividualités. On se demandera aussi s'il n'existait pas des secteurs privilégiésdans la science féminine, et si certains d'entre eux leur étaient plus ouvertsque d'autres et pour quels motifs. Cela permettra de déterminer s'il y a eu, enfonction des périodes, une classification sociale et « genrée » dessavoirs scientifiques. Il s'agira enfin d'examiner les regards et les jugementsportés sur ces femmes exceptionnelles et leurs travaux, puis de voirl'accueil qui leur fut réservé tant dans l'opinion publique que dans la Républiquedes sciences ou des lettres. Etaient-elles été acceptées, rejetées, admirées,craintes, moquées ou jalousées ? Nourrissaient-elles des fantasmes ?Et si oui, de quelle nature ? Cette investigation s'appuiera sur le large éventail des textes existants, mais aussi surles images dont on ne saurât négliger l'apport pour cerner ces représentations. 

  • La date et le lieu de cecolloque ne sont pas encore définis ( soit 2012 à Cerisy, soit 2011 à Lorient ou àRennes). Ses actes donneront lieu à une publication. Les propositions de communications comporteront votre nom et prénom, votre statut estudiantin ou professionnel, votre centre de recherche ou de rattachement éventuel, vos coordonnées électroniques et postales, le titre de votre projet de communication assorti d'un résumé d'une dizaine de lignes et d'un bref CV d'une liste de vos publications éventuelles. Les propositions doivent être adressées pour le 20 juin 2010 par courrier électronique à 

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Adeline Gargam : adgargam@numericable.fr

et en cc à

Bertrand Lançon : lancon.bertrand@wanadoo.fr