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De l’interdisciplinarité à la transdisciplinarité ?Nouveaux enjeux, nouveaux objets de la recherche en littérature et sciences humaines

De l’interdisciplinarité à la transdisciplinarité ?Nouveaux enjeux, nouveaux objets de la recherche en littérature et sciences humaines

Publié le par Matthieu Vernet (Source : Laure de Nervaux-Gavoty)

Université Paris-Est-Créteil (UPEC)

Colloque international IMAGER 27-28-29 novembre 2014

« De l’interdisciplinarité à la transdisciplinarité ?
Nouveaux enjeux, nouveaux objets de la recherche en littérature et sciences humaines »

 

L’ancrage disciplinaire en usage dans les études académiques et les lieux d’enseignement et de recherche est perçu comme indispensable, mais fait aujourd’hui l’objet de remises en question. Indispensable, car il garantit la délimitation d’un objet du savoir et celle des tâches assignées à l’enseignant et au chercheur dans un cadre institutionnel. Remis en question, car les disciplines tendent à être considérées comme autant de bastions dans lesquels se retranchent les « spécialistes » d’un domaine.

Les études mono-disciplinaires représentent un point de vue limité sur la culture en même temps qu’elles s’approprient l’exclusivité d’une compétence. Or l’identité des disciplines fait parallèlement l’objet d’interrogations. La crise des « études littéraires », régulièrement invoquée, pose la question de leur insertion dans le champ des sciences humaines. Ces mêmes études littéraires, confrontées au défi des sciences de la culture, envisagent par ailleurs le décloisonnement des disciplines comme un facteur de renouvellement : elles intègrent des outils exogènes pour analyser les conditions historiques, socio-politiques, institutionnelles de production des textes, l’horizon discursif dans lesquels ils s’inscrivent, étudier le rapport entre littérature et autres médias. De même, si des disciplines comme la sociologie, l’histoire et la science politique  sont depuis longtemps connexes – quand elles ne sont pas dans un rapport de filiation, telle la sociologie vis-à-vis de l’anthropologie – qu’advient-il de leur spécificité lorsqu’elles empruntent par exemple les outils de la géographie pour traiter les enjeux spatiaux, ceux de la psychologie pour s’intéresser aux motivations des acteurs, voire ceux de l’analyse littéraire pour étudier les récits individuels et collectifs ?

Dans la mesure où les disciplines constituent un enjeu territorial et identitaire, le dialogue ressenti comme nécessaire est également un facteur de tensions et de conflits que laisse apparaître l’élaboration de projets communs. Mais il stimule également la construction de cadres conceptuels de référence et de méthodes susceptibles d’intégrer différences et divergences dans un horizon global de réflexion sur la production et l’évolution des savoirs. Si la pluri- et l’interdisciplinarité font depuis longtemps partie des pratiques méthodologiques en sciences humaines, le terme « transdisciplinarité » a fait son apparition au cours des années 1990 dans le discours sur le dépassement des frontières disciplinaires, qui met désormais l’accent sur la constitution systématique d’un réseau de relations entre les disciplines. Il convient de s’interroger sur les raisons qui ont motivé cette transition et sur ses conséquences possibles en termes institutionnels.

Ce colloque organisé par l’Institut des Mondes Anglophone, Germanique et Roman (IMAGER – Université Paris-Est) se propose de faire un bilan de la réflexion théorique engagée et des recherches inter- ou transdisciplinaires en cours, mais également d’en mesurer l’impact sur la recomposition des savoirs et leur transmission dans les Lettres et Sciences humaines dans une vision prospective. Il invite à une réflexion sur la transdisciplinarité comme enjeu épistémologique et méthode de recherche.

On remettra tout d’abord ces enjeux en perspective en revenant sur la généalogie de l’organisation des systèmes disciplinaires dans les aires culturelles européennes et extra-européennes (Etats-Unis, Amérique latine). On se penchera sur les conditions (subjectives, sociales, nationales…) qui orientent la constitution des disciplines dans le champ des sciences humaines et sociales, et de ce fait sur les enjeux qui sous-tendent leur institutionnalisation. Comment la critique de modèles culturels dominants a-t-elle ensuite conduit à substituer dans certains contextes le terme d’« études » (studies) à celui de « discipline » ? Comment la dialectique entre l’exigence de spécialisation et ce qui s’apparente à l’utopie d’un point de vue global sur la culture se construit-elle ?

On s’interrogera ensuite sur un possible dépassement des frontières disciplinaires en analysant la construction de nouveaux objets de recherche par le biais de la création en synergie de nouvelles méthodologies dans un contexte de globalisation de l’espace de la recherche. On peut mentionner : le développement des études fondées sur l’intermédialité et celui de l’historiographie littéraire et artistique transnationale en écho à celui de la Global History, la réflexion sur les « canevas culturels » (Kulturmuster) globaux propres aux cadres de pensée d’une société, mais aussi les synergies entre divers champs des sciences sociales sur la construction des identités collectives, ou entre sciences sociales et sciences « dures » dans le domaine de l’environnement. Il convient également de rendre compte de l’avènement de nouvelles méthodologies issues du croisement entre supports différents, telles les humanités numériques.

On s’intéressera enfin aux conséquences pratiques qu’entraîne la mise en œuvre d’une perspective transdisciplinaire dans l’enseignement et la recherche. En quoi le développement de la transdisciplinarité invite-t-il à repenser la formation des élèves et des étudiants ainsi que celle des professeurs chargés de la transmission des savoirs ? Peut-on vraiment sortir du cadre des disciplines ? N’y a-t-il pas un risque de dilution des savoirs et de confusion méthodologique ? L’évaluation elle-même, au cœur de l’enseignement et de la recherche, est affectée par les pratiques transdisciplinaires : sur quelles bases en effet, évaluer des compétences s’il n’y a plus de frontières entre les disciplines ? Quels sont à l’inverse les bénéfices de cette approche ?

Le colloque s’organisera donc autour de trois grands volets :

  • réflexion théorique et mise en perspective historique ;
  • recherches en cours impliquant une démarche transdisciplinaire ;
  • aspects didactiques et institutionnels.

 

Les communications - en français ou en anglais - pourront s’articuler autour des axes suivants (liste non exhaustive) :

  • Le passage des disciplines aux « studies », de l’inter- à la transdisciplinarité dans le contexte de la globalisation ; le lien entre transdisciplinarité et transculturalité.
  • Définir la transdisciplinarité. En quoi se distingue-t-elle de l'interdisciplinarité ?
  • La constitution de nouveaux champs d’étude transdisciplinaires et les bouleversements méthodologiques qu’ils entraînent. La constitution de corpus transgénériques.
  • Les enjeux philosophiques et épistémologiques de la transdisciplinarité. Le savoir décloisonné, nouvelle utopie ? Peut-on vraiment être complètement « au-delà » de la discipline ?
  • Les implications éthiques et sociales de la transdisciplinarité. 
  • Le rôle d’internet et des nouvelles technologies dans le développement des pratiques transdisciplinaires.
  • Les applications pratiques dans l’enseignement et dans les études académiques, les résistances rencontrées et les difficultés de mise en œuvre de projets ou de cursus transdisciplinaires ; les apports des approches transdisciplinaires dans ces mêmes domaines.
  • De quelle manière la transdisciplinarité affecte-t-elle les institutions qui travaillent en lien avec l’université (agences d’évaluation, CNU, bibliothèques etc.) ?

Les propositions de communication (300-400 mots), accompagnées d’une courte notice bio-bibliographique, sont à adresser pour le 31 janvier au plus tard à :

Laure de Nervaux-Gavoty                            denervaux@u-pec.fr

Sylvie Le Moël                                              sylvie.lemoel@u-pec.fr

Guillaume Marche                                         gmarche@u-pec.fr