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Altérité et étrangeté dans le récit bref de science-fiction (Toulouse)

Altérité et étrangeté dans le récit bref de science-fiction (Toulouse)

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Yves Iehl)

Altérité et étrangeté dans le récit bref de science-fiction

Journée d’Étude du séminaire de l’IRPALL « Fictions de mondes possibles »

Jeudi 9 juin  2017

Organisateurs :

Yves Iehl, Université Toulouse 2,  Jean Nimis, Université Toulouse 2)

Le récit bref de science-fiction ou d’anticipation tend, à certaines périodes précises, à refléter les visions, les problèmes et les conflits d’un monde en crise, notamment au cours des épisodes saillants de tension qui ont marqué le XXe siècle et le début du XXIe siècle. On peut en effet observer un certain nombre de convergences, dans ce domaine, entre œuvres d’aires linguistiques diverses et donc spécifiques, et l’on constate que dans bien des récits écrits durant ces périodes charnières ou s’y référant, se mettent en place les représentations décalées (distanciées ou « étrangéifiées », si l’on préfère) de phénomènes de basculement, de franchissement de seuil, de changements de paradigme (linguistique, stylistique, philosophique, social, politique, technologique, humain). La narration de ces phénomènes, par son inventivité même, devient en quelque sorte un miroir, parfois paradoxal, de l’Histoire.

Si l’on affine la perspective, on aboutit à la conclusion que, dans un certain nombre de récits de science-fiction et d’anticipation, ces phénomènes renvoient à la thématique de l’altérité, qui apparaît clairement dessinée sous des visages divers : du désormais classique « double » au clone et au cyborg, à l’alien et au « transhumain » comme altération (et aliénation) de l’humain, jusqu’à de nouvelles modulations de l’Unheimliche ou inquiétante étrangeté freudienne, qui hantait et hante encore les récits du genre fantastique. L’« Âge des extrêmes » (selon les termes d’Éric Hobsbawm) a inspiré nombre de visions inventives qui permettent de considérer sous d’autres angles les territoires, les temporalités et jusqu’aux existences des êtres. À des distances nouvelles et sous des perspectives « autres », l’histoire humaine se trouve ainsi redessinée dans des voisinages inédits, des « terres étrangères » ou des temporalités insolites qui reproduisent les clivages et affinités historiques. C’est ce que l’on peut lire en filigrane dans Chroniques martiennes de Ray Bradbury (1950), Voisins d’ailleurs de Clifford Simak, Les Perles du temps de Gérard Klein (1958), Persistances de la vision de John Varley (1978), L’anniversaire du monde d’Ursula Le Guin (2002), Radieux de Greg Egan (1998), Le Haut-Lieu de Serge Lehman (2008), les nouvelles de Laurent Genefort, celles d’Élisabeth Vonaburg, ou les « réalités déviantes » de Philip K. Dick (pour ne donner que quelques jalons-phares d’un territoire spatio-temporel bien plus ample, qu’il s’agisse des époques ou des aires linguistiques).

C’est donc cette perspective de l’altérité (des altérités) qui constituera l’axe central de la réflexion au cours de cette journée d’études. Outre l’analyse narratologique et stylistique de la distanciation (ou « étrangéification », « estrangement », « straniamento », « ostranienie » et autres termes spécifiques aux différentes aires linguistiques principalement mais pas exclusivement européennes (italienne, allemande, anglaises, espagnole, française, polonaise, russe, …) qui pourront être ici envisagées, il conviendra de s’intéresser aux diverses facettes de l’altérité telles que présentées par ces récits. Il pourra s’agir des « terres étrangères (à coloniser, terraformer, etc.), des « temps parallèles », de la rencontre (notamment amoureuse) avec l’autre, des « figures de l’autre » (extraterrestres, intelligences artificielles, etc.), des inventions fondées sur les possibilités ou les aléas des sciences (robots, androïdes, mutations, clonage, informatique, etc.) ou des questions philosophiques posées par l’identité en tant que telle (par exemple certains des récits de Poul Anderson, dans Le Chant du barde).

L’enjeu de cette réflexion sera dans tous les cas d’observer comment le récit bref de science-fiction et d’anticipation donne « un visage neuf à de vieilles questions » (Roger Bozzetto), en quelle mesure les questions posées par la communication et par l’altérité refondent les approches de nos « histoires naturelles » et de nos « vices de forme » (Primo Levi). Cette perspective nous amènera à envisager comment cette littérature peut être à la fois un outil d’analyse des cultures et une source de contre-culture.

Les communications de cette journée d’étude feront l’objet d’une publication.

Les propositions de communication, d’une page, accompagnée d’une brève notice biographique, sont à transmettre à Yves Iehl (iehl.yves@free.fr) jusqu’au 15 avril 2017.