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1960-2010 : Nécropolitiques africaines, langages de violence et réinventions de l'avenir

1960-2010 : Nécropolitiques africaines, langages de violence et réinventions de l'avenir

Publié le par Florian Pennanech (Source : Alexie Tcheuyap)

1960-2010

Nécropolitiques africaines, langages de violenceet réinventions de l'avenir

Colloque International

Université de Toronto, 10 et 11décembre 2010

Depuisl'avènement des indépendances dans les années 60 surle continent africain, les guerres qui ont balisé les chemins de la libérationsemblent se perpétuer. Les « mésaventures de la consciencenationale » (Fanon) ont engendré des violences dans un espace postcolonialpar ailleurs souvent ravagé par des cataclysmes naturels. Désertifications, famineset guerres écrivent la préface des génocides qui ontprofondément marqué l'imaginaire, générant une multitude de textes quiobligent à réengager une réflexion sur l'humain, ses défis et ses rationalités.Les romanciers, cinéastes et divers théoriciens entreprennent de représenterl'irreprésentable de la violence directe etstructurelle, de nommer l'innommable, de penser l'impensable et decomprendre l'incompréhensible des drames d'une Afrique aux prises avec sesdémons et ses espoirs. Des tentatives desécession (Biafra, Katanga), des guerres civiles (Angola, Tchad, Congo,ex-Zaïre, Côte d'Ivoire, Algérie), le génocide de 1994 au Rwanda, comme ceux encours en République Démocratique du Congo et au Soudan, montrent qu'il esturgent d'imaginer de nouvelles utopies alternatives à l'imaginaire de lacoercition endémique.

L'irruptionde ces violences, qui illustre le quasi éclatement de la« Francophonie », du « Commonwealth » et d'autresstructures géopolitiques traditionnelles, clarifie aussi les limites dedispositions légales, discursives, linguistiques, sociologiques etanthropologiques qui, au fil des ans, ont progressivement construit ce qu'onpeut appeler des altérités meurtrières.Avant de tomber sous le coup de balles ou de machettes, le sujet postcolonial,souvent sévèrement malade ou affamé, est aussi victime de lois contraignantes,de classifications exclusives, de pratiquespolitiques qui lui imposent de réévaluer le sens de son identité dans un espacenational ou transnational en constante mutation.

Unautre trait marquant de ces violences tient du fait qu'elles se déclinent sousle signe du partage, dans les rapports complexes qu'elles entretiennent avecl'espace non africain, en raison notamment du déplacement des peuples. Elles révèlentainsi un lien entre plusieurs lieux et peuvent se traduire par des interventions(militaire, économique, humanitaire, juridique, culturelle) en Afrique, des secousseslocales comme celles qui ont ébranlé les banlieues françaises en 2005, la récente polémique des « accommodements raisonnables »au Québec, ou encore le défi juridique de juger les coupables. Tout cela montreque ces violences postcoloniales relèvent également d'une dynamique quitranscende l'espace originel de leur avènement, pour affecter à une échelleplus globale les pratiques culturelles, politiques et juridiques.

Enpartant de l'armature institutionnelle, sociologique et juridique des sociétéspostcoloniales, des productions littéraires et filmiques, le présent colloquevoudrait engager une réflexion sur le bilan des violences ayant marqué l'Afriquedepuis les années 1960. Il est question de déterminer la manière dont on penseou représente la violence qu'on subit, mais aussi la possibilité de percevoircelle de l'autre. Ces violences étant devenues des catégories de représentationdans des espaces non africains, il convient d'en étudier les modalités etd'envisager les possibilités d'une paixcivile ou d'une réconciliation quidonnerait, de l'Afrique aux anciennes métropoles, de nouvelles perspectives d'avenir.Ce colloque invite à définir les formes du regard qu'on (se) porte commelégislateur, victime, bourreau ou bienfaiteur, ce qui permettra de voir commenton perçoit l'autre, comment on se perçoit, et quel type d'humanité se déploiedans les oeuvres.

Cetteréflexion ne pourra se passer d'un questionnement sur les bases juridiques,historiques, esthétiques et politiques de pratiques qui hissent certains lieuxau statut de camps, au sens de Giorgio Agamben, à savoir « un espaced'exception où la loi est intégralement suspendue. » ( Moyens sans fins. Notes sur la politique, Paris, Payot, 2002, 50).Plus important même que le questionnement des fondements historico-politiquesqui permettraient d'examiner l'hypothèse d'un continuum entre la colonie et lapostcolonie, la nécessité s'impose de déterminer par quels dispositifs le sujetpostcolonial devient dépouillé de toute prérogative sans que ces actes soienttoujours perçus comme criminels. Dans lacontinuité de cette manière de voir, la thèse de Fabien Eboussi Boulaga sur le« mensonge structurel » fondant cet « empire du faux » quiplonge dans la déchéance et la démission humaine (Le Génocide rwandais. Interrogation des intellectuels africains, Yaoundé, Terroirs, 2006, p. 128) nous semble fondamentaledans les interrogations qui sont au coeur de cette réflexion sur la violence. Autotal, ce colloque a pour ambition de mobiliser la communauté intellectuelleautour des documents juridiques, des travaux d'écrivains, d'artistes, decinéastes et de penseurs divers pour faire un bilan de la rhétorique de laviolence après 50 ans d'indépendance et d'envisager tant les possibilités queles modalités d'un autre futur.

Axes possibles de réflexion

Les fondements juridiques de laviolence postcoloniale 

Les limites de la violence d'état

Guerres civiles et chaospostcolonial

État-nation et sociétémultiethnique

Imaginaires de l'abject: filmer/écrirela violence

L'État en jachère : triomphe del'humanitaire?

Théories du génocide

Propagandes et écritures de la haine

Possibilités et modalités de réconciliation

Violence et production des biens

Lire/voir la violence de l'autre –questions de réception

Écritures et sociétés post-conflit

Veuillez faire parvenir votreproposition de communication en français ou en anglais (250 mots), ainsi qu'unebrève note bio-bibliographique à africa50@utoronto.caavant le 30 mars 2010.

Comité d'organisation : IsaacBazié, Josias Semujanga et Alexie Tcheuyap