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Territoires d'écriture de fiction (revue Le français aujourd’hui)

Territoires d'écriture de fiction (revue Le français aujourd’hui)

Publié le par Marc Escola (Source : Marion Sauvaire)

Le français aujourd’hui – n° 228 – Mars 2025

TERRITOIRES D’ÉCRITURE DE LA FICTION : PROCESSUS DE GENÈSE, INVENTION, FICTIONNALISATION

Coordination : François Le Goff, Marion Sauvaire et Véronique Larrivé

Appel à articles

Alors que les apprentissages de la lecture et de l’écriture littéraires mettent régulièrement l’élève en situation de lire et de produire des textes de fiction, on peut être surpris de la persistance des programmes pour l’enseignement du français à taire la notion de fiction. Des motifs internes et externes peuvent être avancés pour expliquer ce qui apparait comme un choix épistémologique pour esquiver la notion de fiction dans la présentation des enjeux des enseignements de la littérature, comme dans la description des pratiques des formes fictionnelles dans les apprentissages de la lecture et de l’écriture.

Des raisons renvoient d’un côté à la définition même de la notion de fiction toujours vigoureusement discutée dans le champ de la théorie littéraire et plus largement des artéfacts culturels, et de l’autre, à la délimitation des savoirs de référence dans la constitution de la didactique de la littérature depuis cinquante ans. S’il peut y avoir une difficulté à construire la fiction comme objet didactique, du fait de l’instabilité de ses constituants, de ses contours et de ses frontières, il n’en demeure pas moins qu’elle détient une valeur euristique indéniable dans un projet éducatif de formation des élèves. Cela concerne tout particulièrement les conditions d’élaboration d’un univers de fiction dans le cadre de la création littéraire. Cela nous invite à interroger la nature des supports, pris dans leur acception la plus large.

Il s’agit en premier lieu de se pencher sur la matérialité des œuvres de fiction, leur présence physique ou digitale dans la classe, sur les supports de production fictionnelle. Par ailleurs, en tant que producteur de textes, à quelles ressources le sujet-scripteur peut-il avoir recours pour créer un univers de fiction, qui soit fondé sur le vraisemblable et qui suscite la curiosité du lecteur ? Le texte de fiction ne s’élabore pas uniquement à partir de propriétés narratologiques, longtemps dominantes dans les apprentissages de l’écriture du texte de fiction. La création d’un univers de fiction fait appel à d’autres compétences scripturales qui mettent en travail la référence, la réception, la tension narrative et le plaisir du lecteur, autant d’éléments que les ateliers d’écriture exploitent et pour lesquels une transposition dans l’espace de la classe peut être envisagée. C’est donc à l’établissement d’une cartographie des territoires scolaires des écritures de fiction que souhaite répondre ce numéro, organisé en deux axes principaux : les processus à l’œuvre dans l’invention de la fiction et l’écriture créative ; la variété des supports et des usages de l’écriture fictionnelle, éventuellement en lien avec la réception littéraire.

Axe 1. Processus de genèse, invention, fictionnalisation

La fiction et ses terrains d’expérience scripturale occupent une place notable dans la formation du sujet-scripteur de l’école à l’université. Terrain d’expérience pour l’exercice de la créativité (Biagioli 2020), pour l’expression de l’imagination, l’écriture de fiction est aussi souvent présentée comme support de connaissance des formes, des genres fictionnels et de leurs outils rhétoriques et narratologiques. Comment l’école, à tous les âges de la scolarité, répond-elle à un caractère puissant de l’écriture de fiction qui fait des failles de l’expérience langagière un surgissement des possibles, une mise en crise de la représentation d’un sujet-scripteur, la rencontre d’une altérité ? Rend-elle concevable une écriture de fiction comme mise en tension d’un jeu à double détente, un « jeu fantasmatique – projection dans le texte d’éléments de l’univers personnel - source de plaisir, et un jeu d’écriture, distancié, source d’un plaisir cognitif » (Rouxel 2003) ? Envisagée sous l’angle de sa genèse, quelles sont les temporalités de l’écriture de fiction, quelle place est-il fait au prérédactionnel (Lumbroso 2009), au recueil et à l’élaboration du matériau fictionnel ? Comment sont traités les formes et les codes de l’écriture de fiction, l’usage des stéréotypes et celui des genres fictionnels ? Quelle attention est portée aux modèles littéraires et aux interactions lecture-écriture ? En quels termes se pose la question de la posture du sujet-écrivant (Bucheton, 2014 ; Tauveron et Sève 2005) ? Quelle est la part du collectif, du singulier, de l’expérience du sujet dans le processus d’écriture (Boré et Calil 2010 ; Dufays et Plane 2009) ? Le partage des fictions élaborées peut aussi être abordé comme un puissant moteur de développement des imaginaires, et de confrontation des subjectivités. Comment ces caractères de la fiction sont-ils considérés dans les dispositifs d’écriture, aux différents âges de la scolarité ? Quels sont les obstacles ou les limites de la prise en compte didactique de ces diverses fictions parfois contradictoires ? Comment cette pluralité est-elle anticipée, investie, dialogisée par les enseignants et par les élèves ?

Axe 2. La fiction, des usages et des supports renouvelés ?

Par ailleurs, les apprentissages de l’écriture de fiction s’inscrivent-ils dans les évolutions contemporaines de la description de la réception littéraire et multimodale : le déplacement de l’attention de l’objet littéraire vers la relation entretenue entre un sujet-lecteur et l’objet de sa lecture trouve-t-il des équivalents dans la pratique de l’écriture de fiction ? Les écritures numériques ont-elles introduit de nouvelles formes de génération fictionnelle, de nouvelles formes d’écriture collaborative ? Quelle est la place de l’écriture numérique dans les pratiques de classe et d’atelier d’écriture et quels en sont les enjeux de formation ? (Brunel 2021; Houdart-Merot et Petitjean 2015). Dans une compréhension élargie et complémentaire de la notion de support, on s’intéressera aussi aux usages présents dans l’univers scolaire considérés dans leur plus large diversité : le corpus des fictions narratives, dramatiques, multimodales a-t-il été élargi en même temps que se développaient, dans le champ des recherches en didactique de la littérature, les approches éthiques et esthétiques posées par la relation à l’œuvre de fiction en situation d’apprentissage scolaire (Rouvière 2018 ; Sauvaire 2019) ? Si l’écriture de fiction est abordée sous l’angle de sa réception (Le Goff 2020 ; Petitjean 2017), pensée dans un espace associant les lecteurs, dans une conduite pragmatique et esthétique du discours fictionnel littéraire, et des effets produits par le texte, comment, dans cette compréhension de l’écriture de fiction, sont exploités les outils de la narratologie post-classique (Baroni 2017) ? Comment sont accompagnés et favorisés les processus de fictionnalisation à l’œuvre dans les projets d’écriture ? Sur quelles opérations (greffes, imitation, transfictionnalisation, transmodélisation, etc.) ces processus s’appuient-ils (Louichon 2017) ?

Références bibliographiques

BARONI, R. (2017). Les Rouages de l'intrigue. Genève : Éditions Slatkine. 

BIAGIOLI, N. (2020). « Écritures créatives ». Dans N. Brillant Rannou, F. Le Goff, M.-J. Fourtanier & J.-F. Massol. Un Dictionnaire de didactique de la littérature (pp. 292-296). Paris : Éditions Champion.

BORE, C. & CALIL, E. (2013). L’École, l’écriture et la création : études françaises et brésiliennes. Louvain-la-Neuve : Èditions Academia Bruylant.

BRUNEL, M. (2021). L'Enseignement de la littérature à l'ère du numérique : Études empiriques au collège et au lycée. Rennes : Presses universitaires de Rennes, coll. « Paideia ».

BUCHETON, D. (2014). Refonder l’enseignement de l’écriture. Paris : Retz.

DUFAYS, J.-L. & PLANE, S. (éds) (2009). L’Écriture de fiction en classe de français. Namur : Presses universitaires de Namur.

HOUDART-MEROT, V. & PETITJEAN, A.-M. (éds) (2015). Numérique et écriture littéraire. Paris : Hermann.

LE GOFF, F. (2020). « La fiction, le réel et leurs frontières : pour une didactique de l’écriture de fiction ». Recherches, 72, 87-108.

LOUICHON, B. (2017) « La réception scolaire des œuvres patrimoniales ou les Objets Sémiotiques Secondaires à l’école ». Dans F. Le Goff, M.-J. Fourtanier, Les Formes plurielles des écritures de la réception. Vol 1 (pp. 19-33). Namur : Presses universitaires de Namur.

LUMBROSO, O. (2009). « Entrer dans l’écriture littéraire en Seconde : pour un développement de la compétence programmatique ». Repères, 40, 227-248.

PETITJEAN, A.-M. (2017). « Les écritures créatives sont-elles des écritures de la réception ? » Dans F. Le Goff, & M.-J. Fourtanier (éds). Les Formes plurielles des écritures de la réception, vol. 1 : Genres, espaces et formes (pp. 201-219). Namur : Presses universitaires de Namur.

ROUVIÈRE, N. (2018) « Les composantes de la lecture axiologique ». Repères, 58, 31-47.

ROUXEL, A. (2003). « Écriture d’invention, quelle place pour la subjectivité, hier et aujourd’hui ? » Enjeux, 57, 25-38.

SAUVAIRE, M. (2019) « Lecture littéraire et imagination éthique ». Recherches & Travaux, 94, . 

TAUVERON, C. & SÈVE, P. (2005). Vers une écriture littéraire ou comment construire une posture d’auteur à l’école. Paris : Hatier.

MODALITÉS DE SOUMISSION 

Les propositions de contribution sont à envoyer par courriel en fichier attaché avant le 1er juin 2024 à :

24rencontres@univ-tlse2.fr

Elles devront comporter :

- la mention du numéro Le français aujourd’hui – N° 228 – « Territoires d’écriture de la fiction » ;

- les nom, prénom, adresse courriel, adresse postale et institution professionnelle de l’auteur (ou des auteurs) ;

- le titre de la proposition (aussi court qu’explicite) ;

- un résumé de 4 000 à 5 000 signes environ (espaces compris) présentant de façon précise les

contenus et le/les contexte/s abordés ainsi que les problématiques soulevées ;

- cinq mots-clés ;

- les références bibliographiques associées.

CALENDRIER 

01 juin 2024 : réception des propositions d’article.

15 juin 2024 : réponse aux auteurs des propositions.

20 septembre 2024 : envoi de la première version de l’article avant évaluation.

20 novembre 2024 : retour de la première version évaluée, avec demandes éventuelles de réécriture.

10 janvier 2025 : réception de la version définitive.

15 mars 2025 : publication, envoi aux abonnés et libraires, diffusion sur sites Armand Colin & Cairn.