Questions de société
Violences policières: évacuation musclée du rectorat à Orléans - appel à témoin Paris-CNRS

Violences policières: évacuation musclée du rectorat à Orléans - appel à témoin Paris-CNRS

Publié le par Sophie Rabau

Voir aussi:

Violences policières : Amiens, Paris, Orléans, Marseille, Toulouse (maj. 28/03/09)

Sur cette page:

- Incompréhension après l'évacuation musclée du rectorat à Orléans

- Appel à témoignage CNRS, jeudi 26 mars - 11h30 et après-midi

- Incompréhension après l'évacuation musclée du rectorat à Orléans

L'évacuation du rectorat par les forces de l'ordre, vendrediaprès-midi, n'en finit pas de susciter des réactions, tant dans le milieuuniversitaire que politique et syndical. Rappel des faits. Vendredi midi, aprèsleur assemblée générale, une cinquantaine de professeurs et étudiants del'université d'Orléans décident d'investir les locaux du rectorat situés rueSaint-Etienne à deux pas de la préfecture. L'occupation pacifique et le face àface courtois entre manifestants et policiers laissent place, en find'après-midi, à une évacuation musclée. Bilan : l'arrestation d'unétudiant qui comparaîtra le 9 septembre devant le tribunal correctionneld'Orléans et une conseillère régionale légèrement choquée.


« Sud éducation Loiret, Sud étudiants Orléans et Sudrecherche tiennent à exprimer leur soutien sans réserve à Aurélien (l'étudiantarrêté - ndlr). Ils demandent la levée des poursuites engagées contre Aurélien,bouc émissaire de cette action collective ». Les syndicats s'interrogentégalement sur « le fait qu'une action non violente ait pu donner lieu à untel dérapage au moment de l'intervention des forces de l'ordre ».

« Le pouvoir porte donc l'entière responsabilité desdiverses "escalades" et violences actuelles. Au lieu de céder sur lesrevendications majoritaires du monde universitaire, il choisit la violence etla répression », écrit Stéphane Bois, porte-parole du nouveau partianticapitaliste orléanais dans un autre communiqué adressé aux médias. « C'estbien comme en Guadeloupe un mouvement d'ensemble et généralisé qui le feracéder ou se démettre », conclut-il.

La coordination des personnels et étudiants de l'universitéd'Orléans et des organismes de recherche, elle, « condamne vivement lesbrutalités policières survenues lors de l'occupation pacifique du rectorat del'académie Orléans-Tours ». Elle dénonce « l'interpellationarbitraire d'un étudiant (...) et exige qu'aucune charge ne soit retenue contrelui. Elle constate que « c'est la seule réponse que le gouvernement opposeà huit semaines de mobilisation légitime ».

Au moment de l'évacuation, Micheline Prahecq, conseillèrerégionale socialiste a été bousculée par un policier. Elle s'en tire avec unegrosse frayeur. « Elle est choquée, mais tout va bien pour elle »,confirme un proche.

Cette évacuation musclée devrait, paradoxalement, renforcer lesopposants à la loi Pécresse dans leur combat entamé début février.

Mourad Guichard

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Appel à témoignage CNRS, jeudi 26 mars - 11h30 et après-midi

Eliane Daphy, Ingénieure CNRS. Syndicaliste SNCS-FSU

11h30-11h40

Dans la rue, 43 rue d'Auteuil, 75016, Paris. Entrée alternative pour le CNRS que les agents ont coutume d'employer, dite par les collègues "petit jardin" ou "au 43" (rue d'Auteuil). La première porte était fermée, la deuxième était bloquée par deux hommes, sans brassard, qui ne disaient rien. Je les ai pris pour des agents privés de sécurité (CNRS). Un agent en uniforme était présent sur le trottoir. Je lui demandé poliment pourquoi ces deux messieurs ne me laissaient pas entrer et qui ils étaient. Un gradé en uniforme était posté un peu plus loin (vers ma gauche), devant la pharmacie. De nombreux collègues étaient présents aux fenêtres du 2e étage,  et observaient la scène. Je les ai salués d'une voix forte, en clamant "bonjours, collègues, je suis cnrs, je voudrais rentrer à la maison". S'en sont suivis quelques échanges ludiques théatralisés entre la rue et les collègues. Dans mon souvenir, très bon enfant (en tous cas, pas assez pour me faire embarquer par l'agent de police pour trouble à l'ordre public", il n'y avait pas de public).

Ensuite, deux collègues sont venus dans le jardin, et ont cherché à parlementer avec les deux hommes pour qu'ils me laissent passer. Ils ont obtenu l'autorisation d'un occupant (qui arrivait depuis le fond du jardin), la porte s'est ouverte. Je me suis avancée pour entrer.

Tout s'est passé très rapidement ensuite, sur le moment, je n'ai rien compris. Les hommes bloquant l'entrée se sont avancé, m'ont encerclée, ils m'ont donné deux (ou trois) coups de poing très violents aux seins, rapidement, puis ont sorti des brassards rouge "police". J'ai hurlé "vous me faites mal, vous n'avez pas le droit de me taper". Je leur ai dit "messieurs, vous n'aviez pas le droit de me frapper, je vais porter plainte". Ils m'ont insultée (quelque chose du genre "va te plaindre à tes pédés de collègues, connassse"  et "fiche le camp, si on te retrouve on te viole").

Quelques collègues ont-ils pris de photos pendant les échanges rue/choeurs du 2e ? Ont-ils des souvenirs ? Ont-ils constaté que j'avais agressé verbalement ou physiquement ces deux hommes ? Que ces hommes avaient un brassard ? Quand  l'ont-ils mis ? Si d'autres faits à porter au dossier, n'hésitez pas.

Hier soir, vendredi 27 mars, le médecin a constaté sur mon bras gauche un gros hématome de 6 x 6 "violet et douloureux" [forme et emplacement prouvant qu'il résulte d'un violent coup de poing, et ne peut être une 'auto-mutilation"], palpations douloureses (sic). Je dois faire des radios du sein et des côtes pour voir si quelque chose de visible (ça fait vraiment mal). Trauma psy et  "anxiété post-traumatique", chaque fois qu'on s'approche de moi je sursaute. Cinq jours d'ITT.

Non, je ne vais pas "oublier", ce n'était pas "rien ou pas grand chose" : c'était une agression par des fonctionnaires de police abusant de leurs fonctions. Inacceptable dans un État de Droit. J'ai décidé de porter plainte. Je suis prête à subir les examens de l'Institut médico-judiciaire de l'Hôtel Dieu, les auditions de l'IGS (inspection générale des services).

Je sais que ma plainte sera sans doute classée "sans suite", ce n'est pas une raison pour me taire.

Si ces policiers voyous avaient porté leurs brassards, je n'aurais pas fait le guignol devant eux.

Quelle est la loi dans notre pays ? En réponse à un numéro d'activiste agitprop, deux hommes dans la force de l'âge, entraînés au combat de rue, frappent à la poitrine une femme de 57 ans (et 60 kilos) ? Des vrais coups, bien violents, qui inscrivent leurs traces inscrites sur le corps, et cassent la tête. La violence, ce n'est pas la loi, l'ordre, ce n'est la brutalité.

J'espère que parmi les collègues présents, il y avait des observateurs ayant de la mémoire.

Merci d'avance pour votre solidarité.

Eliane Daphy, Ingénieure CNRS. Syndicaliste SNCS-FSU