Questions de société
 Une lettre envoyée  à Valérie Pécresse par la SAES (Société des Anglicistes du Supérieur)

Une lettre envoyée à Valérie Pécresse par la SAES (Société des Anglicistes du Supérieur)

Publié le par Sophie Rabau

 Une lettre envoyée ce jour à Valérie Pécresse par la SAES (Société des Anglicistes du Supérieur)



     Paris, le 12 janvier 2009 


Madame Valérie PÉCRESSE Ministre de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche 1 rue Descartes 75231 Paris Cedex 05 



Madame la Ministre,  


Notre société n'a pas reçu de réponse, ou d'accusé de réception de vos services, à la lettre que je vous ai adressée le 30 octobre 2008 avec les présidents de quatre autres sociétés savantes du domaine des langues, littératures et civilisations étrangères au sujet de la « masterisation » de la formation des enseignants. Les enjeux de cette question nous semblent d'une telle acuité que je me permets de m'adresser de nouveau à vous. 
La formation des futurs professeurs de langues vivantes est à nos yeux une question qui par sa portée ne peut s'étudier dans la précipitation. Or le court délai accordé à nos universités pour préparer des maquettes de master, même un peu étendu comme il l'a été, est ressenti de manière générale comme très insuffisant, d'autant plus que les maquettes des CAPES (qui réduisent nettement et dangereusement la part des contenus disciplinaires) n'ont été connues qu'en décembre. Comment comprendre qu'un temps de réflexion et de concertation ne soit pas accordé alors qu'il ne s'agit pas moins que de concevoir à nouveau la formation et le recrutement des enseignants de notre pays ? Je crois de mon devoir de vous faire part, au nom du bureau de la SAES, de l'inquiétude, voire du découragement qui a gagné notre profession, qui comprend qu'elle n'est pas entendue et que son avis n'a pas été jugé digne d'intérêt. Les très nombreux messages qui me parviennent, dans le cadre d'une association qui regroupe plus de deux mille enseignants et enseignants-chercheurs anglicistes de l'enseignement supérieur, en témoignent, dépassant largement les différences traditionnelles de sensibilité. Nos collègues, qui forment les futurs professeurs de l'enseignement secondaire, qui préparent aux concours, externes et internes, et qui font partie des jurys de ces concours, sont attachés à ces missions et estiment ne pas être les plus mal placés pour contribuer à la réflexion. Ils ne peuvent concevoir leur rôle comme borné à l'application de réformes sur lesquelles leurs sociétés de spécialistes n'ont pas été consultées et qu'ils considèrent inadéquates. La spécificité de la formation en langues vivantes étrangères et les exigences particulières d'un recrutement de qualité dans ce secteur ne leur semblent pas avoir été suffisamment prises en considération. S'ils devaient finalement se résoudre à mettre en oeuvre cette réforme sur le terrain, ce ne serait que dans un climat d'exaspération contraire aux objectifs à atteindre. On ne peut par ailleurs que constater dans nos départements universitaires et nos équipes de recherche que le contexte plus large de réformes et annonces diverses, et notamment les inquiétudes suscitées par le projet de statut des enseignants-chercheurs, ne sont pas non plus de nature à créer le climat de sérénité que demande l'élaboration collective de formations nouvelles. 
Un véritable moratoire d'un an et le maintien des concours dans leur format actuel en 2010 seraient une chance donnée à une concertation qui permettrait de repenser l'articulation des masters et des concours de recrutement, sujet fondamental pour l'avenir de notre offre de formation et de notre recherche angliciste. La SAES reste sur ce sujet comme sur d'autres à la disposition des services de votre ministère.  
En espérant que cette lettre aura pu retenir votre attention, je vous prie d'agréer, Madame la Ministre, l'expression de mon profond dévouement. 



Jean Viviès Professeur à l'université de Provence Président de la Société des Anglicistes de l'Enseignement Supérieur