Agenda
Événements & colloques
Une émancipation créatrice. Penser l'imaginaire et l'autonomie post-coloniale avec Frantz Fanon (Paris) 

Une émancipation créatrice. Penser l'imaginaire et l'autonomie post-coloniale avec Frantz Fanon (Paris)

Publié le par Philippe Robichaud (Source : Chiara Palermo)

UNE ÉMANCIPATION CRÉATRICE.

PENSER L’IMAGINAIRE ET L’AUTONOMIE POST-COLONIALE AVEC FRANZ FANON

Journée d’étude organisée par Chiara Palermo

Approches contemporaines de la création et de la réflexion artistique ACCRA EA 3402

Centre de recherches en philosophie allemande et contemporaine  - CREPHAC EA 2326

 

Université de Strasbourg

 

8 juin 2019 10h -18h

La Colonie

128 Rue la Fayette, 75010 Paris

Retransmission dans l’Amphi 19 Palais Universitaire 10h-12h

9 Place de l'Université, Strasbourg 67000

En collaboration avec les étudiants du M2 en Arts Plastiques « Recherche et Création »

Université de Strasbourg

L’œuvre de Franz Fanon a marqué des générations d’anticolonialistes, d’activistes des droits civiques et de spécialistes des études postcoloniales. La publication récente de ses inédits dans Écrits sur l’aliénation et la liberté (éd par Jean Khalfa et Robert JC Young) La Découverte, 2015 est l’occasion de revenir sur la portée toujours actuelle de sa pensée. Fanon a contribué aux fondements d’une ethnopsychiatrie « critique » proposant un débat sur les concepts d’identité ethnique, de culture, d’altérité, de conflits, pour reformuler ces catégories dont les racines sont directement liées à l’histoire de notre modernité et à la violence présupposée par nos catégories pour penser l’histoire. Cette journée d’étude souhaite aborder l’œuvre de Fanon à la lumière de ces dernières recherches et notamment par le prisme de la notion d’imaginaire présente dans ces dernières publications pour penser aujourd’hui les définitions et les enjeux de la création contemporaine dans une société qui se définit « postcoloniale ». Ce qui nous intéresse est la capacité de cet auteur d’orienter une réflexion transdisciplinaire vers un usage politique de l’imaginaire et de l’activité de création. C’est dans cette direction qu’il est possible articuler une étude autour du dialogue de Fanon avec la phénoménologie et autour de la portée philosophique de la notion d’imaginaire élaborée à partir de ce dialogue et son efficacité pour reformuler nos pensées de l’histoire. Il s’agit par ce dialogue de réinvestir les outils théoriques fournis par Fanon pour penser notre modernité. Chez Fanon, la nécessité de l’émancipation et le refus de l’idéalisme, autant que le refus du déterminisme historique, nous obligent à une critique de l’avenir par une réflexion transdisciplinaire sur les enjeux de la relation entre art et politique, entre philosophie et psychiatrie. La richesse de l’influence de cet auteur dans la production artistique contemporaine témoigne d’une démarche qui exige la reformulation des codes de l’art occidental. Notre hypothèse est que avec Fanon, il s’agit de formuler les critères d’un régime « postcolonial » des arts en remettant en cause l’historicisme moderniste qui structure l’institution de l’art. Loin de se présenter comme un dispositif de nouvelles significations à interpréter ou à décoder, l’art se situe au-delà de son institutionnalisation, appelant une transgression des dimensions d’intériorité et de subjectivité permettant à l’homme moderne de tracer les limites entre conscient et inconscient, entre permission et interdit, entre sacré et profane. L’artiste prend donc des distances avec ces dimensions « d’intériorité », de sacralité, de vérité liées à l’art comme expérience humaine et la création semble remettre en cause les critères de notre récit sur l’art. En effet, la question de l’histoire de l’art est liée à une dépossession des protagonistes de son histoire et à une remise en cause de la notion d’artiste forgée par la modernité.

Dans cette démarche il nous semble possible de penser avec Fanon la complexité de la notion « d’étrangeté » pour revenir à une forme d’étrangeté, véhiculée par la pratique artistique, capable de dépasser les critères consolidés de l’évaluation de l’art et de son histoire. Frantz Fanon avait analysé à l’époque coloniale le rapport entre l’aliénation culturelle et l’expression de la demande de la reconnaissance avec les formes d’autorité socioculturelle. Comme cela a été théorisé pour l’époque coloniale, dans l’actuelle situation postcoloniale le clivage du sujet oscille entre la soumission et l’intériorisation des normes d’identification. En interrogeant les couples notionnels qui ont structuré, dans la seconde moitié du XXe siècle, nos modes de pensée - activité/passivité, apparence/réalité, cause/effet -, Frantz Fanon contribue non seulement à établir les conditions d’intelligibilité de l’expérience esthétique, mais aussi à étudier les tensions et les liens qui se tissent entre l’esthétique et le politique, quand il s’agit de penser une alternative aux couples notionnels qui articulent les transformations de nos sociétés entre dominants et dominés.

 

Avec des interventions de

Alenka Ambroz, ENS, Paris 

Mohamed Bourouissa, artiste

Joël De Rosier, écrivain et psychanalyste 

Jean-Christophe Goddard, Université de Toulouse II Jean Jaurès 

Olivier Marbeuf, commissaire d’exposition et théoricien 

Myriam Mihindou, artiste 

Rachida Triki, Université de Tunis 

Françoise Vergès, MSH Paris

 

Bibliographie

FANON, Frantz, Peau noire, masques blancs, Paris : Seuil, 1975 [1952].

FANON, Frantz, Pour la révolution africaine. Écrits politiques, Paris : Maspero, 1964.

FANON, Frantz, L’An V de la révolution algérienne, Paris : Maspero, 1959.

FANON, Frantz, Les damnés de la terre, Paris : La Découverte, 2002 [1961].

FANON, Frantz, (Khalfa, Jean et Young, Robert, (éd.) Écrits sur l’aliénation et la liberté, Paris, La Découverte, 2015.