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Une cosmopolite sur les chemins de traverse / Kosmopolitin auf Zwischenwegen : Lou Andreas-Salomé (1861-1937)

Une cosmopolite sur les chemins de traverse / Kosmopolitin auf Zwischenwegen : Lou Andreas-Salomé (1861-1937)

Publié le par Marc Escola (Source : Britta BENERT)

Une cosmopolite sur les chemins de traverse

Kosmopolitin auf Zwischenwegen :

Lou Andreas-Salomé (1861-1937)

Colloque international à l’occasion du 80e anniversaire de sa mort

/ Internationale Konferenz zum 80. Todestag der Autorin

 

Coopération franco-allemande : 

Université de la Sarre/Université de Strasbourg

 

APPEL À COMMUNICATION

 

Lieu : Université de Strasbourg

Dates : du 9 au 11 février 2017

Responsables :

Britta Benert, Université de Strasbourg

Romana Weiershausen, Universität des Saarlandes

Langues du colloque : allemand, français, anglais

 

Argumentaire :

« Quand quelqu’un quitte la vie, qui pour nous y avait profondément sa place, tout alors se sépare en deux camps : les vivants et les morts. Pas seulement au sens de la perte – la mort appartient aussi dès lors, d’une manière particulière, à la vie. Et pas seulement comme une coloration plus noire de celle-ci, mais plutôt comme si on en savait davantage, comme si on vivait davantage ce qui vaut véritablement d’être vécu, comme si on était aussi un peu là où quelqu’un s’en est allé. D’une certaine façon, les carcans sautent ». / «Wenn Jemand aus diesem Leben ging, der für uns ganz tief hineingehörte, dann teilt sich seitdem alles in dies Zwei: Lebende und Tote. Nicht nur indem Sinn des Verlus­tes, – sondern der Tod gehört seitdem auf eine besondere Weise dem Leben zu. Und nicht nur als dessen schwärzer erscheinende Färbung, sondern auch als wisse man mehr, […] als sei man ebenfalls ein wenig auch mit da, wohin Jemand fortging; irgendwo platzen Engen».Lou Andreas-Salomé dans une lettre à Anna Freud, à la date du 23 juin 1923 ; traduction française de S. Michaud.

A l’occasion du 80e anniversaire de la mort de Lou Andreas-Salomé (née en 1860 à Saint Pétersbourg, décédée en 1937 à Göttingen, en Allemagne), le présent colloque propose de revenir sur une œuvre singulière et foncièrement paradoxale qui n’a de cesse de nous mener au-delà de « carcans » et de barrières infranchissables – telles que celles qui opposeraient, dans une dichotomie simpliste, la vie à la mort.

En voyageuse infatigable, Lou Andreas-Salomé a passé des frontières tant réelles que symboliques, et peut-être sont-ce ces incessants passages qui ont contribué à semer d’embûches le chemin vers une pleine reconnaissance de son œuvre. Cela étant, la renommée de la romancière, psychanalyste et essayiste dépasse de plus en plus la seule sphère des initiés. Après les manifestations scientifiques qui lui ont été consacrées ces dernières années le présent colloque, s’inscrivant dans cette dynamique de redécouverte, se propose de cerner la complexité de l’œuvre saloméenne en privilégiant deux axes : d’une part, en mettant la focale sur le caractère interdisciplinaire de ses textes ; d’autre part, en étudiant, dans une approche contrastive, sa réception en Allemagne, en France, en Russie, etc. En accord avec cette accentuation, le colloque se caractérisera par une forte dominante internationale ainsi que par une présence pluridisciplinaire et comparatiste; elle sera en outre portée par une collaboration franco-allemande, réunissant les Universités de la Sarre et de Strasbourg.

 

L’accueil de l’œuvre saloméenne

 

C’est grâce aux travaux menés depuis une vingtaine d’années que l’approche indirecte qui réduisait auparavant Lou Andreas-Salomé à la seule muse ou au simple « prétexte », a pu être rectifiée. Plusieurs décennies se sont en effet écoulées avant que puisse être envisagé le fait que Lou Andreas-Salomé, de son vivant, puisse être fêtée non pas uniquement pour sa vie de femme (libre) mais bien tout autant pour sa propre œuvre : fêtée comme celle qui comprit et introduisit Nietzsche, également comme la romancière que le jeune Rilke se flattait de connaître, puis, comme psychanalyste formée et admirée par Freud, au point qu’il allait lui confier « l’éducation » de sa fille Anna. Le colloque propose ainsi de poursuivre dans la voie de la réévaluation d’une œuvre protéiforme et difficile, restée trop longtemps méconnue tant par l’ombre jetée par l’imposante triade Nietzsche, Rilke, Freud, que par le piège d’une survalorisation idolâtre.

 

Interdisciplinarité

 

Lou Andreas-Salomé nous lance bien d’autres défis encore, et en particulier celui de l’interdisciplinarité de son œuvre. A cette dimension étudiée seulement à la marge jusqu’ici, nous souhaitons, au contraire, accorder une place centrale, en abordant l’interdisciplinarité comme l’une des interrogations clé du présent colloque.

Philosophie, histoire des religions, littérature, anthropologie, psychologie, psychanalyse, … : l’œuvre de Lou Andreas-Salomé relève de l’ensemble de ces domaines sans jamais cependant se réduire à un seul d’entre eux, tout en ne cessant de dépasser les catégorisations simplificatrices. En ce sens, ce serait surtout l’idée d’ouverture, de constante interrogation des frontières – disciplinaires, métaphoriques – , le refus de toute pensée catégorique qui semblent constituer l’essence de ses écrits.

 

La dimension internationale

 

La dimension internationale – voire son comparatisme – est une caractéristique de premier ordre de l’œuvre de Lou Andreas-Salomé, que la recherche est très loin d’avoir explorée : ici encore, nous souhaitons avancer en contribuant à mettre en lumière quelques-unes des (très) nombreuses pistes qui s’offrent à l’étude. Le caractère extraordinaire de son réseau social a pour sa part été très justement mis en avant dès les premières biographies qui lui ont été consacrées après sa mort, affirmant notamment que les amitiés de Lou Andreas-Salomé « […] approximate a Who was Who of Central European intellectual life during the half –century between 1880 and 1930/ appartenaient plus ou moins au Who was Who de la vie intellectuelle de l’Europe Centrale entre 1880 et 1930 » (Kaufmann, 1968, notre trad.). C’est ce cosmopolitisme qu’évoqua de son vivant déjà son amie Ellen Key, une fois l’horreur de la première guerre mondiale advenue avec ses antagonismes nationaux, lorsqu’elle lui écrit dans une lettre : « Et toi, ma chère, avec ton âme russe, ton mari perse, ton foyer allemand et tes amis dans le monde entier, comme tu dois souffrir » (cité dans Michaud, 1993 : 287).

 

Enfin, ce colloque a pour ambition d’insister sur l’esprit paradoxal (rendu par notre intitulé : Une Cosmopolite sur les chemins de traverse/auf Zwischenwegen) si caractéristique de l’œuvre saloméenne. Cet esprit que le vocable de zwischen/inter pourrait incarner, renvoie au refus de l’auteur des catégorisations figeantes, qu’elle interroge plutôt dans leur artifice et/ou leur porosité (voir notamment sa manière hérétique de récuser les couples dichotomiques, tels que vus d’entrée, vie/mort, mais aussi Occident/Orient ; science/poésie ; homme/femme par exemple). Rappelons l’intitulé de l’un des recueils de nouvelles de notre auteur, Im Zwischenland, dont l’une des thématiques est la frontière si incertaine entre les différents âges de la vie : refus, là encore, d’une binarité trop tranchée. L’œuvre est un défi, outre son caractère audacieux, de par l’emploi de tournures stéréotypées auxquelles sont ajoutées des connotations inhabituelles. Ses textes se caractérisent ainsi par de surprenantes connexions conjuguant des propos innovants et conventionnels en une seule proposition, rendant impossible toute tentative d’appréciation définitive. Adepte des Zwischenwege, Lou Andreas Salomé aime emprunter des chemins de traverse ; elle a d’ailleurs fait de brèves haltes à Strasbourg qui l’ont amené en cette Alsace en torts et de travers de Tomi Ungerer (1988). Si l’album de l’auteur strasbourgeois évoque par son intitulé une région transfrontalière aux richesses culturelles et linguistiques, mais aussi aux interrogations identitaires complexes, ces caractéristiques ne sont pas sans faire écho à l’œuvre saloméenne, permettant ainsi de rendre le lieu du présent colloque pleinement significatif.

 

Ce ne sont pas seulement des contenus que Lou Andreas-Salomé aime aborder de façon paradoxale et hérétique, son écriture se caractérise également par une ambivalence foncière. Faire voler en éclats l’étroitesse de nos visions et réflexions, c’est ce à quoi la pensée de Lou Andreas-Salomé nous invite, et qui rend le travail avec son œuvre si nécessaire. Ce sera là notre fil d’Ariane pour un colloque en hommage à son œuvre, placé sous le signe de traversées internationales et transdisciplinaires, et pour lequel nous  souhaitons accueillir les contributions de chercheurs et chercheuses venant des différents champs qui ont nourri ses écrits, champs qu’en contrepartie elle a contribué à enrichir. Nous aimerions que ces contributions proviennent d’aires culturelles les plus variées possibles, à l’image de l’œuvre polygraphe de Lou Andreas-Salomé. 

Comité scientifique :

  • Guy Ducrey, Professeur de Littérature comparée, Université de Strasbourg
  • Christiane Solte-Gresser, Professeure de Littérature comparée, Université de la Sarre
  • Tatiana Victoroff, Maître de conférences en Littérature comparée, Université de Strasbourg
  • Karine Winkelvoss, Maître de conférences en langue et littérature allemandes, Université de Rouen/Zentrum für Literatur-und Kulturforschung Berlin
  • Karl Zieger, Professeur de Littérature comparée, Université de Lille 3

 

Modalités :

Date limite pour l’envoi des propositions d’intervention : 1 septembre 2016

La participation de doctorant(e)s est souhaitée. Les propositions (titre + résumé : 300 mots maximum) et une brève notice biobliographique de l’auteur (statut, rattachement scientifique, champs de recherche) sont à envoyer aux deux adresses suivantes :

britta.benert@unistra.fr

romana.weiershausen@uni-saarland.de

Réponse du comité scientifique : 30 septembre 2016

Une sélection des contributions au colloque fera l’objet d’une publication collective.

Frais d’inscription au colloque : 50 euros (gratuité pour les doctorant(e)s)

Nos demandes de financement sont en cours. Dans l’état actuel des choses, il faut partir du principe que les frais engagés (hébergement, déplacement) seront à la charge de l’intervenant.