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Traduire: pour découvrir ou neutraliser?

Traduire: pour découvrir ou neutraliser?

Publié le par Bérenger Boulay (Source : EA LHPLE & CRL)

Traduire : pour découvrir ou neutraliser ?

Journée d'étude, le vendredi 8 avril 2010 à l'Université de Franche-Comté (Besançon - France)

Organisée par l'Équipe d'Accueil LHPLE (Littérature et Histoire des Pays de Langues Européennes) et la CRL (Cellule de Recherche en Linguistique).

La traduction, quel que soit son domaine, semble irrémédiablement prise, depuis les origines, dans une double tension : montrer que celui qu'on ne comprenait pas au point de le croire étranger à la nature humaine, voire carrément muet, a à dire des choses qu'on n'a jamais entendues et qu'il sait les dire d'une manière propre à nous surprendre ou nous émerveiller, ou démontrer que ce qu'on n'entendait pas n'était au fond qu'une transposition de nos formulations ancestrales et qu'en y mettant les formes, le texte traduit coule d'aussi bonne source que ce qui s'écrit dans notre langue maternelle.

Le traducteur peut vouloir épater ou, ayant revêtu les attributs des prophètes, vouloir révéler une vérité que la surdité à la langue qu'il traduit a désespérément masquée à ceux qui partagent sa langue maternelle, comme il peut être animé par cette rage de nivellement, de neutralisation, de normalisation qui lui fait dépenser le meilleur de son énergie pour nous convaincre qu'en fin de compte nous pouvons circuler le plus tranquillement du monde, qu'au fond il n'y a rien à voir.

D'un côté la conviction que si les différences sont traduisibles ou tout au moins transposables, elles restent pour l'essentiel irréductibles et qu'elles sont constitutives de la diversité humaine, de l'autre l'idée, que ce soit dans une perspective pacifique ou guerrière, que le monde est un, que les hommes sont identiques, que les différences, qu'elles soient linguistiques, culturelles ou autres, ne sont que de surface et que ce que dit une langue ne peut pas différer fondamentalement de ce que dit la nôtre. D'un côté, on va, sans armure ni prévention, vers un autre dont on voudrait être tout à la fois différent et solidaire, de l'autre, on assimile à soi, au nom de l'universalité qu'on croit évidente de nos sentiments naturels, toutes les différences du monde.

Cette tension ne se manifeste pas avec la même intensité ni de la même manière selon le domaine où s'exerce la traduction. Nous proposons de ramener la multiplicité des domaines à quatre types où l'on reconnaîtra tout à la fois quelques grandes fonctions du langage et quelques secteurs clé des usages et de la communication langagière : (1) la traduction des émotions et du sentiment esthétique, champ privilégié de la littérature, (2) la traduction de ce qui fait ou dont on voudrait faire un événement, champ privilégié de ce que les institutions qu'elles soient médiatique, politique ou idéologique appellent l'information, (3) la traduction des connaissances dont dépend la maîtrise du monde, degré zéro s'il en fût de la traduction, et enfin (4) la traduction des textes de référence, toujours sacrés pour qui considère que la construction ultime du sens passe par la formulation étalon qu'ils donnent des concepts et du réseau de relations où ils s'inscrivent.

Nous n'aborderons pas dans cette journée les questions soulevées par le champ de la littérature. La traduction littéraire étant le plus souvent une réécriture, une recréation, met en jeu des problématiques infinies qu'il n'est ni facile ni souhaitable d'articuler, dans ce cadre, aux trois autres champs.

Nous invitons ceux qui voient dans les pratiques de traduction des enjeux importants, qu'ils adoptent ou contestent les termes dans lesquels nous avons formulé la problématique, à proposer, en se situant par rapport aux trois derniers champs - l'information, la traduction spécialisée et la traduction des textes de référence -, une réflexion personnelle argumentée par l'analyse linguistique d'un cas précis de traduction dans un domaine de leur choix.

Les propositions, prévues pour une intervention de 35 minutes suivie de 10 minutes de discussion, doivent être envoyées à cellulerecherchelinguistique@gmail.com pour, au plus tard, le dimanche 20 février.

Elles ne doivent pas excéder une page (40 lignes) ni être inférieures à une demi page (20 lignes), bibliographie comprise. Elles doivent comporter le nom de l'auteur, son statut, ainsi que ses coordonnées institutionnelles et personnelles. Une notification d'acceptation ou de refus sera envoyée aux auteurs dans le courant de la première moitié de février.

Les communications, sous une forme éventuellement plus longue et plus élaborée, donneront lieu à une publication qui sera soumise, pour chaque communication, à une double évaluation anonyme.