Essai
Nouvelle parution
Thierry Barbaud Catulle. Une poétique de l'indicible

Thierry Barbaud Catulle. Une poétique de l'indicible

Publié le par Bérenger Boulay (Source : http://www.peeters-leuven.be/)

Thierry Barbaud
Catulle. Une poétique de l'indicible.

PEETERS publishers
Série "Bibliothèque d’Études Classiques" n°47
Leuven (Belgium)  2006
Isbn: 90-429-1693-1 / Ean 13 : 9789042916937
XII +280 pages
 45,00 €

Présentation (d'après le site de l'éditeur) :

Nous avons choisi d'aborder Catulle par ce qu'il nous laisse: undésordre et un secret.Ce désordre est une source d'imaginaire: en effet, la mémoire dulecteur s'ingénie à en reconstituer les thèmes par le biais despersonnages notamment.La «dissémination poétique» créée paradoxalement par le regroupementmétrique engendre, avec ce double mouvement de liaison et de séparationqui caractérise Catulle, une dynamique temporelle troublante. L'espacepoétique fragmenté (volontairement ou non) appelle un temps unifié, leshiatus appellent les ressemblances. Dans le monde catullien, chaqueétoile fait signe et cherche sa constellation.Il nous est ainsi apparu d'emblée que le travail de reprise, de retour,de ressassement même de l'écriture allait de pair avec une poétique del'inexprimé. Qu'il s'agisse de passions lyriques ou allégoriques,l'auteur décline sa culture affective tout en cherchant des structuresidéales et des styles multiples soumis aux exigences des genres.L'ellipse et la digression figurent assez bien l'insatisfaction del'artiste face au langage explicite et au trace rectiligne; il cultivel'implicite et le détour, il détourne les signes au profit dessurprises qu'ils enferment. Même pour toujours redire, il reditautrement. C'est le chatoiement du langage versicolore ou ses brusquescontrastes qui l'intéressent surtout.D'où l'importance des voix différentes, des figures qui escortentchaque poème afin qu'impressions diffuses et violentes deviennentexpressions stylistiques. La mimétique catullienne serre les émotionsau plus près, par le dialogue notamment, mais aussi elle les place àdistance grâce au tissage des images dont l'«ecphrasis» et l'allégoriesont les lieux majeurs.Ainsi la rhétorique évolutive de Catulle suit le processus desrecherches stylistiques les plus personnelles: notre seconde partietente de visiter l'atelier du poète, en considérant les aspectsrhétoriques et stylistiques de son oeuvre. Parole romaine et accentsitaliques croisent une préciosité grecque valorisante. Catulle used'une oralité ludique et festive, il la dote de capacités inventivesnouvelles; sa parole est ouverte aussi bien aux éclats du forum qu'à laverve de l'insulte, il capte la vie des mots quotidiens et stylise leseffets: il retranscrit dans les registres choisis, en fonction d'unesituation, d'un contexte énonciatif fictif, les petites et grandesdramaturgies du ressenti. Le poète explore les modes d'expression pouren souligner le caractère émotionnel. Il ne les choisit pas sans leurinsuffler la force d'une persuasion sensible.Catulle s'avise des charmes trompeurs et véridiques, pourtant, de laparole: le locuteur se révèle souvent grâce à ce paradoxe, avec sesmanques, ses excès, hyperbole et litote réunies. Mais l'arbitre desélégances passionnelles ne serait-il pas le «carmen», ce chant fluidede la chanson éolienne qui peu à peu se ritualise dans le distique?Catulle tourne l'hexamètre vers le pentamètre, il cadre une pensée(concettisme avant l'heure?) et lui imprime un mouvement de séduction:le poète sans doute cherche à rendre désirable sa parole, il en fait unsymbole sensible. Il active, pour ce faire, les ressources lexicales etrythmiques, visant une facture achevée du poème. Le poème 64, souventanalysé, figure un art inquiet qui tend à se stabiliser.Mais toujours la recherche poétique des expressions du moi se fait endialogue double: en amont, avec les poètes grecs - Sappho, Callimaquenotamment - il rassemble la violence et la grâce, son érotisme devientpassion. En aval, avec les poètes de l'élégie - Properce, Tibulle,Ovide - il trace la route où s'aventurent les paradoxes du désir et lesillusions du coeur, mais aussi la beauté des images. Il figure jusquechez Horace, Sénèque et Martial ce mouvement intermédiaire d'absorptionde l'hellénisme «baroque» et sa réaction classique: Catulle évolue versune poètique de la profondeur, entre l'ombre et la lumière des figures.