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The Representation of the Holocaust under Question: Jonathan Littell's Les Bienveillantes

The Representation of the Holocaust under Question: Jonathan Littell's Les Bienveillantes

Publié le par Marielle Macé (Source : Instituut voor Joodse Studies)

InternationaleWorkshop
Donderdag 17 december 2009
Universiteit Antwerpen, Gebouw “Grauwzusters”, LangeSt Annastraat 7, 2000 Antwerpen

Workshop in het Engels en het Frans, i.s.m. LiranRazinsky (The Hebrew University of Jerusalem)

This workshop is devoted to Jonathan Littell's novel Les Bienveillantes and its implications for the representation of the Holocaust. Published in 2006, Jonathan Littell's Les Bienveillantes can be called the most important literary phenomenon in France in recent years, having sold over one million copies and having won France's most important literary prizes. It has also been the object of a strong debate ever since. Furthermore, Les Bienveillantes, translated as The Kindly Ones, which tells the story of World War II and the Holocaust from the point of view of a Nazi SS officer, seems to be a turning point in Holocaust representation. The lectures in this workshop will explore the novel's literary, historical and cultural dimensions. They will address its narative aspects, the theoretical and literary references and traditions relevant to its understanding, as well as the way the novel deals with ideology of history.

 

PROGRAM

I. WORKSHOP


9:30-10:00 Welcome - Vivian Liska
10:00-10:30'Je suis une véritable usine à souvenirs': manufacture etlittérature - Aurélie Barjonet (Université de Versailles,St-Quentin, CHCSC)
10:30-11:00 Mémoire de textes français dans Les Bienveillantes - Marc Dambre (Sorbonne Nouvelle - Paris III)
11:00-11:30 Coffee Break
11:30-12:00 The Perpetrator as a Totalitarian Subject: Allegiance andGuilt in Les Bienveillantes - Sandra Janßen (Freie Universität Berlin)
12:00-12:30 We Are All the Same: The Similarity of All Perpetrators inLes Bienveillantes - Liran Razinsky (The Hebrew University ofJerusalem)
12:30-14:00 Lunch Break
14:00-14:30 Les Bienveillantes ou le paradoxe d'une énonciation - Luc Rasson (Universiteit Antwerpen)
14:30-15:00 La plaidorie de Maximilian Aue - Herman Van Goethem (Universiteit Antwerpen)
15:00-15:30 Coffee Break
15:30-16:00 Goncourt antipodiques: l'Affaire Schwarz-Bart vs l'Affaire Littell - Kathleen Gyssels (Universiteit Antwerpen)
16:00-16:30 ‘Frères humains', ‘Mesdames et messieurs': à quis'adresse le bourreau? - Catherine Coquio (Université de Poitiers)
16:30-17:00 Concluding Remarks
20:00 Evening Lecture


ABSTRACTS


‘Jesuis une véritable usine à souvenirs': manufacture et littérature -Aurélie Barjonet (Université de Versailles, St-Quentin, CHCSC)
Dèsles premières pages, le narrateur des Bienveillantes nous invite àune lecture symbolique. Ce narrateur (fictif) est un ancien SSreconverti dans la fabrication de dentelle qui, au moment où ilcommence la rédaction de ses mémoires, dirige une usine dans le Nordde la France. Ce narrateur ne se contente pas de manufacturer ce tissu“fragile [qui] craint la lumière”; en écrivant ses mémoires, il “semanufacture” aussi des souvenirs: il produit des faits en grandequantité, et ce avec une précision et une véracité quasidocumentaires. Après avoir donné plusieurs exemples d'analogie entrela matière produite par Max Aue et son texte, nous nous intéresseronsau fonctionnement de sa mémoire. Nous faisons l'hypothèse que par lamétaphore de la manufacture, le texte se donne comme un artefact etassume ainsi son caractère fabriqué et expérimental.
Aurélie Barjonet estmaître de conférences en Littérature comparée à l'Université deVersailles, Saint-Quentin-en-Yvelines et traductrice diplômée. Elleest membre du Centre d'Histoire culturelle des sociétéscontemporaines de son université. En 2007, elle a soutenu une thèsesur la réception de Zola dans la critique française et allemande(1873-1978). À côté de ses travaux sur Zola, elle s'est intéresséeà Flaubert. Elle a coorganisé, avec Cyril Aslanov et Liran Razinsky,le colloque “Écrire la Shoah et la Seconde Guerre mondiale au XXIesiècle” qui a eu lieu du 21 au 23 juin 2009 à l'Universitéhébraïque de Jérusalem.

Mémoire de textes français dans Les Bienveillantes - Marc Dambre (Sorbonne Nouvelle - Paris III)
Sila tragédie grecque et la littérature russe, comme le montrent F.Leca-Mercier et G. Nivat, constituent des intertextes déterminantsdans Les Bienveillantes, l'incipit renvoie clairement à Villon etBaudelaire. Sont également convoqués dans l'ensemble du livred'autres auteurs de Guillaume d'Aquitaine à Sartre, des oeuvresdocumentaires ou polémiques, des phénomènes de la vie littéraire.Quantitativement peu marquante, cette présence hétérogène pose unesérie de questions particulières. Tenter d'y répondre peut engagerl'interprétation de ce “roman russe écrit en français par unAméricain” (Nora). La culture française sollicitée, renduevraisemblable par la diégèse et par la formation et les expériencesdu narrateur, relève-t-elle de la simple caractérisation?Entre-t-elle dans d'autres desseins, perceptibles par d'autresfonctions de l'intertexte, quand on tient compte par exemple duparatexte? Révèle-t-elle une esthétique ?
Professeur de littérature française à la Sorbonne Nouvelle (Paris III), Marc Dambrey dirige le Centre d'Etudes sur le Roman des Années Cinquante auContemporain. Il a participé au séminaire de recherche “‘Vichy' andthe Holocaust in France since 1990: memory, representation, andrevision” (Washington, Center for Advanced Holocaust Studies, 2008). Ila “édité” des textes de Paul Morand et Roger Nimier (Arléa, LeDilettante, Gallimard, Rivages) et plusieurs ouvrages collectifs, dontLe Roman au tournant du XXIe siècle (Presses Sorbonne Nouvelle, 2004),Henri Thomas, l'écriture du secret (Champ Vallon, 2007) et L'exceptionet la France contemporaine (à paraître fin 2009).  

ThePerpetrator as a Totalitarian Subject: Allegiance and Guilt in LesBienveillantes - Sandra Janßen (Freie Universität Berlin)
Thepaper will tackle the question of the perpetrator's psyche by startingfrom Hannah Arendt's and Bruno Bettelheim's common assumption that theconcentration camps are the crystallizing point of a totalitariansystem, since the state the prisoner is reduced to simply takes to anextreme what is expected from the ordinary totalitarian subject. Buteven if the violence done to the persecuted and the violence thepersecutors are supposed to do to themselves originate in the same“movement” and, to some extent, even have comparable psychologicalconsequences, as Bettelheim shows, both kinds of violence are of courseentirely different as to their ethical implications. I will argue thatLittell's book infers two possible concepts of guilt from two possibleways in which the perpetrator may (retrospectively) interpret hisNational Socialist allegiance.
Sandra Janßen is Researchand Teaching Assistant of Comparative Literature at Freie UniversitätBerlin. She obtained a Franco-German PhD at Freie Universität Berlinand Université Paris 8 Saint-Denis in 2006, with a study of theconcepts of imagination in history of psychology and literary history(1840-1930). She is co-editor of the diaries of the German writer EinarSchleef (1944-2001) at Suhrkamp Verlag. In 2007-2008, she started aresearch project which focuses on the relations between scientificpsychology, political theory and literature from 1930 to 1950 as afellow of the Maison des sciences de l'homme, Paris.

We AreAll the Same: The Similarity of All Perpetrators in Les Bienveillantes- Liran Razinsky (The Hebrew University of Jerusalem)
Max Aueis not only writing a personal memoir. He also attempts an overallinterpretation of the Nazi era and of perpetrators' behavior. Inparticular he puts forward several provocative theses, drawing anequivalence between all kinds of atrocities, be it those of Stalin,those of colonization and those of Nazi Germany. He cancels thedifference between such acts and regular wars. I will try to examinethe complex functioning of these ideas in the novel beyond Aue, andshow how the text supports, subverts and mostly complicates them. LesBienveillantes demonstrates, I will claim, how literature can engage ina very complex way with these issues.
Liran Razinsky is a post-doctoral researcher at the HebrewUniversity of Jerusalem. Previously, he was a post-doctoral researcherat New York University, USA. He is working mainly in two fields, Frenchand comparative literature and psychoanalytic theory.  He has publishedseveral papers on Jonathan Littell's Les Bienveillantes, and also onGeorges Bataille and on Sigmund Freud. Among his research interests areHolocaust literature, critical theory, psychoanalytic theory, death andthe writing subject. His current research project studies the questionof death and subjectivity in writing. He has recently organized,together with Aurélie Barjonet and Cyril Aslanov, the firstinternational conference on Littell's Les Bienveillantes, in Jerusalem,June 2009.

Les Bienveillantes ou le paradoxe d'une énonciation - Luc Rasson (Universiteit Antwerpen)
Lelecteur des Bienveillantes ne manque pas d'être frappé par ladimension encyclopédique du roman. Le narrateur n'est pas seulementcet ancien SS qui prit une part active à la mise en oeuvre dugénocide, c'est aussi un intellectuel qui a bien assimilé lesmodèles d'explication du nazisme (et de la personnalité nazie)élaborées après-guerre. Je voudrais m'arrêter plusparticulièrement à la façon dont trois hypothèses désormaisclassiques sont reprises dans le roman: celle du “monstre nazi”,inspirée sans doute par les travaux d'Adorno et de son équipe sur la“personnalité autoritaire”; dans le prolongement de celle-ci, ensuite,l'analyse de la personnalité fasciste psychorigide proposée par KlausTheweleit – ce qui me permettra de lire le roman à la lumière del'essai que publie Littell en 2008, Le sec et l'humide; et enfin leshypothèses sur la “banalité du mal” et sur “l'homme ordinaire”avancées par Hannah Arendt et Christopher Browning. Mon intuition estque Les Bienveillantes ne met en scène ces modèles d'explication quepour mieux les déjouer: Max Aue, en effet, ne se laisse pas saisir parces théories, ce qui nous oblige à prendre acte du paradoxe de ceroman: ce n'est pas parce qu'on donne la parole à un nazi pendant 900pages qu'on finit par le comprendre. L'énigme demeure entière.
Luc Rassonest professeur de littérature française à l'Université d'Anvers. Ils'intéresse au témoignage de guerre et à la littérature inspiréepar les totalitarismes. Il est l'auteur, entre autres, de Littératureet fascisme: les romans de Robert Brasillach (Paris, Minard, 1991),Ecrire contre la guerre. Littérature et pacifismes 1916-1938 (Paris,L'Harmattan, 1997) et de L'écrivain et le dictateur. Ecrirel'expérience totalitaire (Paris, Imago, 2008). Il prépare un livresur le statut de l'animal dans le récit de guerre.

La plaidorie de Maximilian Aue - Herman Van Goethem (Universiteit Antwerpen)
Laforce de ce livre est due au fait que la victime (Littell en tant quereprésentant du monde juif) prend la place de l'agresseur nazi. Dansson introduction déconcertante, Maximilian Aue nous fait entrevoirqu'il était devenu assassin par hasard. Chaque autre, à sa place,aurait fait la même chose... L'avocat d'Eichmann a plaidé dans lemême sens en 1961. La Cour de La Haye a repris l'argumentation en1993, dans la cause d'un policier Croate. Les auteurs potentiels decrimes de guerre sont donc, parait-il, interchangeables. C'est lecontexte qui fait le criminel de guerre. Sommes-nous donc tous capablesde mêmes crimes? Littell a compris le phénomène, à travers derécents travaux d'historiens et de sociopsychologues, mais il nel'explique pas. Le lecteur devrait les connaître. Il devrait aussiconnaître ces autres trajets de gens mêlés aux tueries, ceux qui ontrefusés. Aue nous fait oublier que chacun a toujours le choix. Mêmeles soldats allemands, à l'époque. Le lecteur est donc confrontéavec une habile plaidoirie, qui le laisse pantois.
Herman Van Goethem.Historien et juriste, professeur à l'Université d'Anvers, présidentdu département d'Histoire. Il étudie l'histoire politique de laBelgique, particulièrement la deuxième guerre mondiale. Sa biographiedu roi Léopold III a été publiée en 1994 (avec Jan Velaers), etl'édition critique des carnets de guerre du ministre Auguste DeSchryver en 1998. Actuellement il prépare un étude sur lacollaboration administrative et la Shoah à Anvers en 1940-1942. Il estégalement chargé de l'élaboration de l'exposition permanente dans lenouveau Musée de la Shoah et des Droits de l'Homme à Malines, quisera bientôt construit et qui ouvrira ses portes en 2012.

Goncourt antipodiques: l'Affaire Schwarz-Bart vs l'Affaire Littell - Kathleen Gyssels (Universiteit Antwerpen)
Dansun entretien avec Littell, l'auteur des Lieux de mémoire lui rappelleun roman étonnamment proche: "Quand je vous ai lu, j'ai tout de suitepensé à un autre livre, Le Dernier des Justes, d'André Schwarz-Bart,auquel il ne ressemble pas, mais qui a eu le même effet déflagrateurtrès puissant par rapport à la Shoah quand il a paru, en 1959." Nonseulement la réponse de Littell montrera qu'il ne connaît pas ceroman, Nora se trompe quant aux correspondances: les deux Goncourt sontantipodiques. Sur certains points, l'écriture schwarz-bartiennesurpasse même celle du Goncourt 2006. Puisant aux sources de laculture et spiritualité juives, insufflant au roman historique unedimension mémorielle, Schwarz-Bart sut contrer ce dont LesBienveillantes souffre éperdument: spectacularisation de la Shoah,confusion entre Histoire et Littérature. Contrairement à Littell,Schwarz-Bart résiste à la “mémoire saturée” (Robin, 2003) et àl'ère du temps, celle de la surmédiatisation et de l'Holocaustkitch. 
Kathleen Gyssels est professeure de littératuresfrancophones à l'Université d'Anvers. Titulaire d'un doctorat enlettres modernes de l'Université de Cergy-Pontoise avec un essaiintitulé Filles de Solitude: essai sur l'identité antillaise dans lesauto-biographies fictives de Simone et André Schwarz-Bart (Paris:L'Harmattan 1996), et d'un HDR en littérature comparée de Paris III,elle publie dans de nombreuses revues sur les littératures caribéenneet africaine américaine et dirige un groupe de recherche enlittératures postcoloniales à l'Université d'Anvers:www.ua.ac.be/postcolonial.

‘Frères humains', ‘Mesdames et messieurs': à qui s'adresse le bourreau? - Catherine Coquio (Université de Poitier)
Onconnaît bien la formule d'incipit des Bienveillantes: “Frèreshumains, laissez-moi vous raconter comment ça s'est passé”. Plus quede réfléchir ici sur cet appel ironique à une “fraternité humaine”,je veux m'arrêter sur cette adresse aux lecteurs et sur ce plurield'un destinataire. Mais plus que de plonger dans cet universlittéraire singulier, je souhaite m'interroger sur lathéâtralité de l'adresse, au-delà des Bienveillantes. Ce traitprêté au bourreau nazi, qui entre en résonance avec certainstémoignages de criminels nazis, semble surjouer la réalité d'uncertain cabotinage: le bourreau, devenu narrateur et plaidoyer delui-même, semble ne pouvoir en appeler à l'autre que sur un modedéclamatoire, voire provocateur, à proportion que sa conscience desoi est flottante ou intermittente. Mais c'est à un autre textelittéraire que je confronterai celui de Littell: “Moi, le bourreau”,ainsi s'intitule le texte que l'écrivain hongrois Imre Kertészintègre à la fin de son roman Le Refus (1988). Kertész y met enscène le narcissisme littéraire d'un criminel, qui, écrivaindilettant, s'adresse à “Mesdames et Messieurs” afin de plaider sacause. Kertész donne au bourreau littéraire un interlocuteur plusréel que lui, et qui, après lecture du texte, en désamorce l'impacten posant certaines questions simples. Ainsi, la harangue littéraires'interrompt à peine amorcée - dans Le Refus on n'a que le “prologue”d'un roman qui s'annonce illisible - alors qu'elle devient unroman-fleuve chez Littell. Je voudrais donc préciser ce que disent dedifférent ces deux textes ultra-littéraires, sans perdre de vue cequ'ils pointent de manière étrangement proche.
Catherine Coquioest professeur de littérature comparée à Poitiers, après avoirpassé dix ans à Paris IV-Sorbonne. Elle co-dirige avec Pierre Bayardle “Groupe de Recherche sur la Violence Extrême” dans l'équiped'accueil “Littérature et histoire” de Paris VIII. Elle est égalementla présidente de l'AIRCRIGE (Association Internationale de Recherchesur les Crimes contre l'Humanité et les Génocides)

II. EVENING LECTURE - 20:00, Rodestraat 14 (R.013), 2000 Antwerpen
THE PERPETRATOR SPEAKS: LES BIENVEILLANTES BETWEEN HISTORY AND TESTIMONY
Liran Razinsky (The Hebrew University of Jerusalem)

JonathanLittell's novel Les Bienveillantes (The Kindly Ones) has stirred up aheated controversy since its publication in 2006. This lecture willaddress the most intriguing aspects of this book: its use of the voiceof a perpetrator to tell the events of the war, its depictions ofsexuality and violence, and its ambitions with regard to historicaltruth. Mainly, I will examine this work as a project of bearingwitness, and turn a critical eye to the role that the literary genre ofexcess and transgression plays within it, to the novel's historicalaspects, and to the interplay between them. I will explore thenarrator's authority as a witness, focusing on both literary andethical questions.
Liran Razinsky is a post-doctoralresearcher at the Hebrew University of Jerusalem. Previously, he was apost-doctoral researcher at New York University, USA. He is workingmainly in two fields, French and comparative literature andpsychoanalytic theory.  He has published several papers on JonathanLittell's Les Bienveillantes, and also on Georges Bataille and onSigmund Freud. Among his research interests are Holocaust literature,critical theory, psychoanalytic theory, death and the writing subject.His current research project studies the question of death andsubjectivity in writing. He has recently organized, together withAurélie Barjonet and Cyril Aslanov, the first international conferenceon Littell's Les Bienveillantes, in Jerusalem, June 2009.