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Sujet créateur et conscience d’auteur

Sujet créateur et conscience d’auteur

Publié le par Matthieu Vernet

Sujet créateur et conscience d’auteur

Université de Bourgogne (Dijon)

CPTC –« Textes-Discours-Représentations » - Jacques Poirier, Joël Loehr

les 12-13-14 juin 2013

 

         Dans les années 1960, l’instance du narrateur prenait toute sa place, celle de l’auteur était devenue encombrante et l’idée même de «sujet créateur » était pour ainsi dire taboue. Dans ses derniers cours au Collège de France, Barthes, sous l’effet d’un « ébranlement du sur-moi théorique », faisait sauter un certain nombre de verrous, confessait sa curiosité pour la « nébuleuse biographique », et ouvrait les perspectives d’un « défoulement ou dé-refoulement de l’auteur ».  

        L’intention qui préside à ce colloque international, organisé par Jacques Poirier et Joël Loehr, membres de l’équipe « Textes-Discours-Représentations » de l’Université de Bourgogne, est d’explorer les options qui s’offrent pour penser la place et la fonction qui pourraient « revenir » au sujet créateur et à la conscience d’auteur. 

      Le colloque s’ouvrira aux points de vue des comparatistes et des linguistes, des historiens et des philosophes. Les contributions pourront s’orienter selon les axes suivants :

1-Conscience créatrice et mimèsis

Alors que la mimèsis aristotélicienne semblait devenue obsolète, ou pire encore anti-poétique (le mimétique comme pur reflet), les relectures du concept par des auteurs comme George Steiner ou Philippe Lacoue-Labarthe en ont renouvelé la portée. On se propose ainsi de faire retour sur la notion d' « auteur » à l'aune de cette notion, et d'en montrer la fécondité retrouvée.

2-Conscience créatrice et fictions critiques

En avançant la notion de « fiction critique », Dominique Viart a attiré l'attention sur un aspect caractéristique de la modernité, qui consiste à penser la littérature, et donc la notion d'auteur et de création, à partir de la fiction. Dans cette perspective, on s'interrogera sur le discours de la fiction et la conscience de la création dont elle est porteuse.

3- Le sujet créateur : voix de l’Universel, écho de l’Anonyme ?

Dans Néocritique, Malraux évoque le magistère que l’Europe reconnut au génie créateur sous la figure du « grand écrivain », qu’on pourrait définir comme celui qui représente à la fois le plus haut degré possible d’implication d’une conscience dans l’Histoire et la capacité à être la voix de l’Universel. Selon Blanchot, parlant des années 1960 dans l’Entretien infini : « Certes les vanités demeurent. Le ‘Je’ littéraire continue à se montrer. On parle encore des grands écrivains, des grands artistes. Personne n’y attache d’importance. Ce sont d’anciens échos qui achèvent de retentir ». 

         La mission d’un auteur est-elle de dresser sa stature sur le devant de la scène, de prétendre parler en son nom propre au nom de tous ? Ou la vocation du sujet créateur est-elle  d’être le « bouc émissaire de l’humanité », d’approfondir des maux qui ne soient plus seulement les siens, de  défixer son identité et de faire éclater sa subjectivité pour n’être plus que l’écho des douleurs de l’Anonyme ?

 

4-Conscience d’auteur et ethos 

Dans un ouvrage de pensée (sauf cas exceptionnels, comme celui des ouvrages écrits en collaboration), l’auteur assume en personne le discours qu’il produit : on est donc a priori fondé à rapporter l’ethos que le contenu de son discours exprime à l’auteur empirique et à conjecturer que cet ethos correspond à son ethos effectif. Qu’en est-il dans les ouvrages d’imagination ? Quelle place donner aux discours dogmatiques, didactiques ou d’ordre idéologique ? Comment faire le partage entre ethos projectif et ethos effectif ?

5-Le deuxième auteur

Genette considérait qu’il y avait déjà suffisamment de monde dans un récit pour qu’on n’ajoute pas à l’auteur empirique et au narrateur cette instance que Wayne Booth appela « implied author ». L’hypothèse a du coup été comme verrouillée en France, alors qu’elle a continué à porter ses fruits aux USA et ailleurs. L’on voudrait que ce colloque soit l’occasion d’en éprouver à nouveaux frais la validité et la productivité : comment ce deuxième auteur négocie-t-il sa place avec celle du narrateur ? comment trouve-t-il « voix au chapitre » ? dans quelle mesure serait-il soustrait à l’influence des nébuleuses biographiques et socioculturelles auxquelles aucun auteur empirique n’est censé pouvoir échapper ?

6-Science critique et conscience d’auteur

Dans Figures III, Genette déclarait: « La conscience esthétique d’un artiste, quand il est grand, n’est pour ainsi dire jamais au niveau de sa pratique, et ceci n’est qu’une des manifestations de ce que Hegel symbolisait par l’envol tardif de l’oiseau de Minerve ». Le « génie » d’un artiste serait-il dans ce qu’il ne contrôle pas ? Les oeuvres seraient-elles plus intelligentes que leurs auteurs ? Et la science critique plus lucide et plus perspicace que la conscience esthétique du sujet créateur?

 

Titre provisoire et résumé de la proposition sont à envoyer avant le 15 novembre 2012 à:

Joel Loehr: joelloehr@hotmail.com et Jacques Poirier: jacques.poirier@u-bourgogne.fr