Essai
Nouvelle parution
S. Lévy-Kuentz & R. Napolitano, Pascin

S. Lévy-Kuentz & R. Napolitano, Pascin

Publié le par Marc Escola

Pascin
SOUS LA DIRECTION DE ROSEMARIE NAPOLITANO
Auteur : Lévy-Kuentz, Stéphan - Napolitano, Rosemarie
éditions La Différence

collection : Hors collection
date de parution : 3 décembre 2009

Texte de Stéphan Lévy-Kuentz.

Préface de Pascal Quignard.

300 ill.

24 x 32 cm. 360 p. 90 €

Collection : Grandes Monographies.

ISBN : 978-2-7291-1748-1

Julius Mordecaï Pincas, dit Jules Pascin (1885-1930), fut, aux côtés de Modigliani, Foujita et Soutine, l'un des maîtres de l'École de Paris. Défendue par Morand, Mac Orlan, Carco, son oeuvre foisonnante et polymorphe est entièrement vouée à la volupté. Peu enclin aux théories artistiques en vogue à l'époque, ce dessinateur de génie choisit de traverser la vie en dilettante. Parti de sa Bulgarie natale en quête d'une identité cosmopolite, son déracinement le mène de Vienne à New York, de La Havane à Lisbonne, de Londres à Tunis. Détruit par son propre succès, il se suicide le 2 juin 1930 à Paris.

Il est enterré au cimetière du Montparnasse. Mystique et libertin, dandy et voyou, noctambule et mélancolique, homme d'une seule femme mais les désirant toutes, Pascin restera – de Montmartre à Montparnasse – l'une des grandes figures de la bohème des années folles.

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Dans le Monde des livres du 11/12/9, on pouvait lire un article sur cet ouvrage:

"Une bibliothèque rose vif

LE MONDE DES LIVRES | 10.12.09 | 11h01

Libertinageet librairie sont de vieux amants, presque aussi vieux que la librairieelle-même. Régulièrement, ils renouvellent leur alliance, en inventantou en ressuscitant héroïnes et héros. Cette année, c'est Julius Pincas,dit Pascin (1885-1930), qui est en scène.

Né en Bulgarie, passé par Vienne, Berlin et Munich, où il collabore au journal satirique Simplicissimus,il arrive à Paris en 1905, fort d'une remarquable dextérité dedessinateur. Il l'applique au nu, à des scènes de bordel, à desfantaisies érotiques. Réfugié à New York pendant la guerre, il revientà Paris en 1920 : c'est sa période la plus faste, Montparnasse, lesfêtes, les amitiés célèbres - Hemingway, Salmon, Mac Orlan. Sa légendese nourrit des complications de sa vie privée, de sa prodigalité, deses excès. Mais si ce pittoresque moderne et nocturne, entreApollinaire et Morand, rehaussé d'un suicide, peut fournir des sujetspour romans ou films historiques, il ne suffit pas à placer l'oeuvre aupremier plan de son époque.

Dans sa monographie, Stéphan Lévy-Kuentzdéfend avec obstination son grand homme, mais il ne peut empêcher lelecteur de se dire que l'industrie de la lascivité reste une industrie,lassante comme toutes les productions en série, que la peinture dePascin manque d'invention et se réfugie dans des effets de floutécommodes et qu'à Paris, dans les années 1920, naissent des oeuvresautrement risquées et intenses. La maquette banale du livre, lesapproximations historiques, le ton uniformément admiratif n'aidentguère, il est vrai. Mais comme la publication en un fort gracieuxfac-similé de l'Abécédaire des filles et de l'enfant chéri,ouvrage attribué à Mac Orlan et illustré de vignettes scabreuses parPascin, suscite la même impression d'ennui, la responsabilité enincombe à l'artiste. Quoi qu'en disent ses admirateurs, il ne fut pasle Toulouse-Lautrec de l'entre-deux-guerres. Restent quelquescuriosités un peu moins attendues, particulièrement ses Amazonesithyphalliques.

Elles devraient figurer dans la galerie deshéroïnes de l'amour qu'a rassemblées Elisa Lécosse, suivant un texte deLaure Adler. Celui-ci se caractérise par son essentialisme un peu hâtif- "les femmes", "les hommes" - et l'écrasement de l'histoire dans unnon-temps où Louise Bourgeois et Catherine Millet côtoient les femmesdu paléolithique et celles de l'Egypte ancienne. La suite du volume estplus précise et plus claire : c'est un inventaire des types légendaireset historiques de la femme amoureuse, classé par catégories - lesensorceleuses, les fatales - et par thèmes - la transgression, lepouvoir, l'émancipation. Mythes et biographies sont rappelés chaquefois que nécessaire. Les figures majeures telles Vénus, Junon ouOphélie voisinent avec de moins connues, la nymphe Salmacis ou Omphale,les Grecques avec les bibliques, les créatures rêvées avec celles quivécurent jadis ou récemment. La sélection des images s'efforce, elleaussi, d'échapper au prévisible et au convenu, si bien que l'ontraverse l'ouvrage avec plaisir.

Photos à usage privé

Mais, dans ce genre, il serait difficile de soutenir la comparaison avec Parce qu'il aime ce qu'il n'a pas,histoire abrégée et bousculée de la sexualité composée par PascalPistacio à partir de ses chroniques télévisées. Les articles sontsouvent fort instructifs. Nous ne savions pas exactement que lesJaponaises, jadis, se donnaient du plaisir grâce à l'extrémité sculptéed'une de leurs chaussures, ni ce que fut la vie assez agitée de laBelle Otero, courtisane de très haute volée, ni quelles règles brutalesrégissaient la prostitution dans cette Athènes antique que l'on seplaît si souvent à citer en exemple.

A ce savoir éclectiquerépond le choix des oeuvres, d'une belle originalité, avec un goûtprononcé pour les photos à usage privé et pour les gravures médicalesanciennes déconcertantes par leur vision de l'anatomie. Des oeuvresméconnues d'artistes célèbres - Rops ou Picasso - s'allient à d'autressignées de grands peintres encore trop peu montrés en France - vonStück ou Beckmann. La part actuelle est aussi réussie grâce à Combas,Desgranchamps, Pencréac'h ou Marcheschi. Corpet a exécuté pour lespages de garde des dessins que le découpage de la couverture - rosenaturellement - met très adroitement en valeur tout en en masquantd'abord les sujets. Les bibliophiles et les amateurs de curiosaapprécieront.

PASCIN de Stéphan Lévy-Kuentz, préface de Pascal Quignard. La Différence, 336 p., 90 €.

PASCIN LIBERTIN. Cahier illustré de Stéphan Lévy-Kuentz (48 p.) et ABÉCÉDAIRE DES FILLES ET DE L'ENFANT CHÉRI (64 p.), Biro Ed., 30 €.

LES FEMMES QUI AIMENT SONT DANGEREUSES de Laure Adler et Elisa Lécosse. Flammarion, 160 p., 29,90 €.

PARCE QU'IL AIME CE QU'IL N'A PAS, HISTOIRE(S) DE LA SEXUALITÉ de Pascal Pistacio. Lienart, 144 p., 35 €.


Philippe Dagen Article paru dans l'édition du 11.12.09"