Questions de société
Réponse à Darcos qui minimise la désobéissance des profs (Rue89 - France Inter, 24/03/2009)

Réponse à Darcos qui minimise la désobéissance des profs (Rue89 - France Inter, 24/03/2009)

Publié le par Bérenger Boulay

Rappel: X. Darcos est Supermenteur.

Voir la vidéo de l'intervention de Supermenteur sur France Inter le  24/03/2009.

Sur le site Rue 89:

Réponse à Darcos qui minimise la désobéissance des profs. Par Mireille Charpy, directrice d'école retraitée, et Jean-Yves Le Gall, directeur d'école (24/03/2009).

Mardi 24 mars, Xavier Darcos, interviewé à la matinale de France Inter,a voulu minimiser l'impact de ceux qu'on appelle depuis quelques mois« les professeurs désobéissants ». D'un revers de la manche, leministre de l'Education a rétorqué :  « Je trouve qu'on en parlebeaucoup. Ils sont 2000, j'aimerais bien qu'on parle des 358 000professeurs qui au quotidien font leur métier. » (Voir la vidéo, auxenvirons d'1 minute 50) 

 

Sur le terrain, ces 2000 enseignants réfractaires qui militent contre la « base-élèves » ou la réforme de l'aide aux élèves en difficulté sont pourtant de plus en plus soutenus par les parents d'élèves, qui prennent souvent le relais en cas de sanctions de l'administration.

Alors qu'une nouvelle fronde grossit au gré des semaines, contre l'évaluation des élèves de CM2 en milieu d'année, Caro,riveraine que vous connaissez, nous a envoyé ce témoignage co-signéavec Mireille Charpy et Jean-Yves Le Gall, directeurs d'école mobilisés dont Rue89 vous parlait dès le mois de novembre. Voici leur texte.

Des directeurs d'école résistent encore à la « base élèves » et aux pressions de l'inspection académique. Ils refusent de mettre les enfants en fiches pour… trente-cinq ans. Où en est la résistance en ce mois de mars 2009 ?

182 directeurs d'école se sont déclarés publiquement contre la « base élèves »malgré les menaces de leur administration. Le département de l'Isère al'air de servir d'expérimentation. La nouvelle inspectrice d'académieexerce des pressions très importantes sur les récalcitrants, tel Jean-Yves Le Gall,convoqué le 29 janvier. Il a réitéré son refus de remplir et renseignerbase-élèves et a reçu un ultimatum, s'il ne la remplit pas avant le 27mars, il perdra son poste de directeur à la prochaine rentrée.

Des postes de direction disparaissent par la fusion des écolesmaternelles et primaires. Des directeurs d'école rétifs ont étéconvoqués le vendredi 13 mars pour une formation individualisée aulogiciel Base élèves. Ils ne s'y rendront pas, motivant leur refus dansune lettre collective et invoquent la date funeste…

Pressions de la hiérarchie contre soutien citoyen

D'autres déjà « formés » sont sommés de remplir la base de donnéesavant le 23 mars et subissent des pressions énormes pour demander leurmutation. Une réunion de soutien à Jean-Yves Le Gall s'est tenue le 14mars, dans le petit village de Notre-Dame-de-Vaulx, sur le plateau dela Matheysine, à trente kilomètres de Grenoble. 200 à 300 personnessuivant les sources s'y sont retrouvées :  directeurs d'autres écoles,enseignants, parents d'élèves, élus, syndicalistes, membresd'associations diverses et simples citoyens venus en soutien.

Au milieu des informations, affichées tout au long du grillage, etdes banderolles, des prises de parole très fortes. Jean-Yves Le Gallréitère son refus de ficher les enfants. Il soutient notamment que lesdonnées personnelles ne devraient pas sortir de l'école. A partir dumoment où les élèves sont rentrés dans le fichier, tout est possible, ycompris le pire… et il y a lieu de s'inquiéter de cela dans un monde oùla vie privée des personnes est de plus en plus difficile à protéger.

La multiplication des instruments de contrôle social est déjà trèsinquiétante… mais élargir ceux-ci à l'enfance est proprementintolérable. Les enfants ne sont pas des citoyens et n'ont pas lestatut juridique pour rendre des comptes à la collectivité. Ils doiventêtre protégés et non fichés. Or dans la base élèves, ils sont inscritsd'autorité sans que le droit d'opposition de leurs parents ne puisses'appliquer.

Plusieurs élus de la Matheysine apportent le soutien de leursconseils municipaux. Ils relient cette sanction à la casse del'Education nationale, engendrée aussi par la disparition des Rased(Réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté, que XavierDarcos veut supprimer) des écoles dont ils ont la charge.

Côté politique, le conseiller général du canton, la suppléante dudéputé de la circonscription et une sénatrice expriment leur soutienet, côté syndicats, interviennent la secrétaire départementale dusyndicat enseignant SNUIPP-Isère, celui du PAS et un syndicaliste del'UL CGT.

La « base élèves », une violation aux conventions internationales

Plusieurs directeurs d'école « rétifs » expliquent les motifs deleur refus sur le plan éthique et un enseignant de la Drôme apportesymboliquement le soutien du collectif national. Deux recours devant leConseil d'Etat ont été déposés contre la « base élèves », l'un contreles actes engagés dès 2004, l'autre contre l'arrêté du 20 octobre 2008,pris quatre ans après avoir démarré la collecte de donnéespersonnelles.

Le requérant souligne les nombreuses irrégularités autour de cefichage :  absence d'information des familles, interconnexion des basesélèves avec la Base nationale des identifiants des élèves (BNIE) cachéeaux enseignants et aux familles. La « base élèves » serait uneviolation aux conventions internationales. L'arrêté rejette, sansjustification, le droit d'opposition des personnes à figurer dans cefichier.

Une table ronde était organisée pour parler de tous les fichagesliberticides mis en place ou à venir et leur interconnexion, entreautres, Sconet (Scolarité sur le net) concerne tous les élèves du collège et du lycée.Des champs supprimés de la « base élèves » y figurent comme lanationalité, les fiches nominatives remontent au rectorat, il comportela gestion de l'élève, les bourses, les absences et retards… Uninformaticien remarquait qu'il n'était nul besoin de donnéesnominatives pour établir des statistiques. Alors… ?

Caro, Mireille Charpy, directrice d'école retraitée, et Jean-Yves Le Gall, directeur d'école

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