Édition
Nouvelle parution
Régis Messac, La Crise

Régis Messac, La Crise

Publié le par Ivanne Rialland (Source : Natacha Vas-Deyres)

Régis Messac, La Crise, préface de Michel Besnier, Paris, Éditions Ex nihilo, Paris, 2013, 276 p.

  • ISBN 978-2-916185-23-1
  • 15 €.
  • Distribution : Belles Lettres Distribution

Ce recueil rassemble les éditoriaux politiques rédigés de 1930 à 1939 sous la plume de Régis Messac pour la revue Les Primaires. Dressant un panorama de l’histoire sociale et politique de l’entre-deux-guerres, il est aussi révélateur d’une part importante de la pensée de son auteur, pour qui l'intérêt collectif passe avant l'ambition personnelle. Messac occupe une place singulière dans la littérature militante. Ses chroniques se nourrissent de l'actualité et d'un regard très personnel : bien que les Primaires ne touche qu'un public restreint, Régis Messac, rédacteur en chef et auteur de quelque soixante-quinze éditoriaux politiques de la revue, n’en poursuit pas moins la mission qu’il s’est assigné de servir ici, la cause de la paix. Lui qui rêvait en 1914 d'une humanité pacifique, garde en mémoire ces années de guerre où tombèrent « des millions d'hommes amoureux de la vie, dressés les uns contre les autres par l'intérêt criminel des nationalistes et des magnats industriels ». Les événements qui se succèdent depuis 1919 ne sont pas faits pour encourager les survivants. « Ils ont, écrit-il, assisté de la part des chefs, tant bourgeois qu'ouvriers, à des reniements successifs, qui ont ruiné l'effort des générations antérieures ». Faisant appel à l’exemple de Jaurès, Messac en appelle tout au long de ses éditoriaux à « l’unité des hommes des champs, des usines, des bureaux, des écoles, à se dresser contre les tyrannies, les oppresseurs, le confusionnisme ». Simultanément, avec le politologue Roger Lévy, il appelle aussi à l’union les quelques intellectuels qui, comme lui, « ont tout connu : l'amertume, le chagrin, le désespoir, le doute, et leurs dernières illusions, le jour où ils ont compris que trop des leurs bernaient et trahissaient aussi la classe ouvrière. […] Qu'ils se rapprochent ensuite de la classe ouvrière, non pour la flatter, mais pour la servir. Qu’ils soient désintéressés dans leurs efforts, sincères dans leur désir de chercher à transformer le vieux monde. » Puis il ajoute un peu plus loin: « Avec le peuple des villes et des champs, avec les intellectuels qui n'ont pas renié leur idéal, nous lutterons pour la paix et nous défendrons le droit que nous avons de crier notre horreur de la guerre. »

Attentif aux idées nouvelles, Messac n’en regarde pas moins l'avenir avec une relative angoisse, gagné parfois par l’inquiétude et la résignation, oscillant entre optimisme et pessimisme. Pour lui, le fascisme, inévitablement, amènera la guerre. D’autant que ni la Société des Nations, ni la seconde, ni la troisième Internationale ne sont en mesure d'assurer la paix du monde. Il s’agit donc d’agir simultanément contre le fascisme et contre la guerre. Ses chroniques doivent être perçues comme le cri de révolte d’un homme ayant brisé son avenir et risquant son gagne-pain pour ses idées, un homme qui rêve d'une politique plus rouge qu’elle n’a jamais été. « Si demain, écrit-il sereinement, des rumeurs sinistres circulaient, et qu'il nous faille nous battre comme en 1914, alors rappelons-nous qu'il est toujours possible d'aller se faire tuer ailleurs que sur le front ! » Plus d'une idée de Messac semble écrite aujourd'hui. Les mêmes forces produisent, avec des technologies différentes, les mêmes effets. C'est cette similitude, cette différence que Régis Messac invite à identifier. Ajoutées aux textes, les notes d'Olivier Messac font de cet ouvrage un outil précieux pour comprendre l'Entre-deux-guerres, cette période paraissant aujourd’hui éloignée mais dont le contexte économique semble parfois si proche du nôtre.

Régis Messac (1893-1945) : Penseur, essayiste et romancier. Agrégé de grammaire, docteur ès lettres, premier exégète de la littérature policière, historien de la littérature populaire et de science-fiction, Messac s’est intéressé à toutes les branches de la sociologie du xxe siècle. En 1930, il rejoint les Primaires, revue littéraire dont il deviendra rédacteur en chef, y introduisant une dimension politique à sa propre mesure.

  • Responsable :
    Olivier Messac