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Regarder l'impossible : l'écriture didascalique au vingtième siècle

Regarder l'impossible : l'écriture didascalique au vingtième siècle

Publié le par Vincent Ferré (Source : Frédérique Toudoire-Surlapierre)

Projet d'ouvrage collectif à paraître aux Presses Universitaires de Dijon

 

Regarder l'impossible : l'écriture didascalique au vingtième siècle

 

 

 

« Regarder l'impossible », la formule, d'Ibsen, ouvre, un siècle d'interrogations renouvelées quant à la validité, le contenu et les enjeux de la mimesis, tandis que les champs du possible dans la fabrique du décor s'élargissent.

 

 

L'écriture didascalique prend peu à peu la forme d'un discours caractéristique, méthodologique parfois polémique, sans doute parce que ses référents débordent en diverses occurrences et formes que nous souhaiterions explorer. Quels sont ses contours ? Est-elle un « acte directif » au sens d'Anne Ubersfeld qui ne touche pas seulement les conditions d'énonciation (temps, espace, décor) mais aussi le jeu (gestuelle, diction, intonation, rythme du phrasé, silences voire enjeux de l'échange), qui peut atteindre (toucher) le dialogue – didascalie interne – ou rejoint-elle le paratexte – tout ce qui n'est pas du dialogue de théâtre, y compris la liste de distribution des personnages et le titre de la pièce – dans des « discours d'escorte » pour reprendre l'expression de Jean-Marie Thomasseau ?

 

 

La didascalie de Maurice Maeterlinck à Jean-Luc Lagarce se dérobe à l'indication circonstancielle précise (décor, jeu), à la suggestion d'interprétation, pour se faire énigme, jeu poétique sur l'interprétation, dérive romanesque, commentaire (la longue didascalie liminaire d'Un tramway nommé désir de Tennessee Williams), monologue intérieur (Strange interludes d'O'Neill), occupant par sa voix singulière ce qui fut peut-être l'espace collectif du choeur...

 

 

Si elle est encore indication périphérique dans certains genres (comédies et pièces de boulevard), objet d'un discours qui renvoie aux objets du décor, elle se fait texte, sujet, investit la scène et ne reste plus en sa marge illustrative ou décorative. Mais peut-on encore parler de spécificité du texte théâtral de Beckett (Acte sans paroles) à Handke (L'Heure où nous ne savions rien l'un de l'autre), quand la didascalie est le texte théâtral ?

 

 

Quand cette indication scénique n'indique plus rien qu'elle même, qu'elle n'est plus technique, concret mais littéraire (« pas de réalisme » indique Yasmina Reza dans Conversations après un enterrement), elle participe d'un discours de l'invasion qui semble nier la parole théâtrale, le jeu, le décor, d'être à contre-emploi, oxymorique. Elle ne place plus le metteur en scène devant un discours directement adjuvant, mais devant un discours oblique, énigmatique, voire clos, qui ôte la parole au comédien (ou qui du moins le heurte, l'interrompt constamment comme dans Oh les beaux jours), un discours adressé directement au public (Savannah Bay de Marguerite Duras). Quand la didascalie est parfois scandale logique en distorsion avec le dialogue (l'ultime didascalie d'En attendant Godot), ou scandale visuel (ce sont les didascalies qui disent le viol, le meurtre chez Sarah Kane), elle projette l'insolence, la provocation sinon l'intolérable. Comment dès lors se pratique-t-elle, quels sont ses enjeux, ses motivations, comment ce discours de l'ordre, de la mise en ordre, devient-il discours du désordre, de la menace de la parole théâtrale, de sa fragilisation ? Quelle place pour la didascalie dans la partition du texte théâtral contemporain ? Quels nouveaux enjeux pour l'architecture du texte de théâtre que cette invasion du discours d'escorte ? Voilà les diverses questions auxquelles nous voudrions que les articles de ce volume sinon répondent, tout du moins réfléchissent. Si le corpus est vaste, nous souhaiterions que les analyses soient précises, qu'elles privilégient le texte en tant que tel et les enjeux de sa représentation.

 

 

Les propositions de communication (une dizaine de lignes) devront parvenir par courrier électronique avant le 30 octobre 2005. Après accord de principe du comité de lecture, les articles seront remis au plus tard le 30 mars 2006.

 

 

florence@jfix.com

frederique.toudoire@free.fr