Questions de société
Réforme du lycée: pétition pour défendre l'enseignement de français et de littérature

Réforme du lycée: pétition pour défendre l'enseignement de français et de littérature

Publié le par Bérenger Boulay (Source : Claude Jaëcklé Plunian)

Dossier réforme du lycée

Dépêche AFP du 28/01: La réforme du lycée au JO: critique d'une intersyndicale d'enseignants


Pétition pour défendre l'enseignement du français et de la littérature en lycée

http://petitions.eu.org/?petition=11

Pétition pour défendre l'enseignement du français

Lettre ouverte aux professeurs de français et à tous ceux que l'enseignement de notre langue et de la littérature concerne

La nouvelle réforme prévue par Luc Chatel, l'actuel ministre del'Education nationale, a suscité de nombreux remous à propos de lasuppression de l'Histoire-Géographie en classe de Terminale S. Il estétonnant que la suppression, sur trois années de lycée, d'à peu près 4heures d'enseignement obligatoire du français ait suscité si peu deréactions, à croire que cette suppression est passée inaperçue. Defait, elle est bien camouflée et pourtant…

En classe de seconde, lesélèves ne feront plus, sous le régime Chatel, que 4 heures de françaisen classe entière, l'heure de module par quinzaine disparaît ainsi quel'heure d'aide individualisée. Dans un document remis aux proviseursdes établissements, il est dit très clairement que les heures demodules de français et d'histoire géographie ont été ôtées à ces deuxmatières pour la mise en place de l'accompagnement personnalisé. Or,l'heure d'accompagnement personnalisé n'est pas une heure de français,ce qu'était l'heure d'aide individualisée. Les élèves perdent environ1h 30 de français par semaine, ce qui met la matière au même rang queles autres. Certes les établissements auront tout loisir de rétablir cemanque grâce au volant de dix heures complémentaires par division, maiscelui-ci est « volant », ajustable, et sera réparti selon les projets,les volontés et personnalités plus ou moins fortes des équipes, autantdire que la rivalité entre les équipes d'enseignants et les matièresrisque de s'amplifier. Il va sans dire aussi que moins d'heures pourles élèves signifie moins d'heures par classe pour les professeurs etque les enseignants de français vont tôt ou tard voir leur nombre declasses augmenter, donc le nombre de leurs copies, ce qui risque deporter préjudice à leur enseignement. L'enseignement « Littérature etmonde contemporain » ouvert comme enseignement d'exploration est uneproposition intéressante, mais, optionnel, il ne saurait concernerchaque classe, il regroupera sans doute les élèves qui en feront lechoix si l'établissement propose un tel enseignement et cetenseignement se fera sur 1h30. Là encore, c'est aux équipes de semobiliser sans doute et de convaincre le chef d'établissement d'ouvrirune telle option, mais comment convaincre les élèves de la choisirlorsqu'une telle option est mise en concurrence avec l'économie (SES),les méthodes et pratiques scientifiques (MPS), déjà présentes dans lesétablissements ?

En classe de première, peu de changementapparemment, sinon que l'horaire de français est réduit à 4 h enpremière L, dont la spécificité était jusque là d'être littéraire.Désormais, pour former un futur lettré, quatre heures devraientsuffire. Un enseignement de spécialisation obligatoire de deux heuresvient certes remplacer les deux heures perdues, mais l'on peuts'inquiéter de l'intitulé « littérature française » qui présuppose queles 4 h allouées au français soient destinées à autre chose qu'àétudier la littérature française. De plus, il y a fort à parier que cetenseignement dit de spécialisation soit confié à un autre professeurque celui qui assurera, toutes séries confondues, les 4 premièresheures de la matière. Quelle sera la cohérence d'un enseignement ainsimorcelé ? La perte de formation véritablement littéraire, quoiquediffuse et difficilement quantifiable, sera réelle. Là encore, lesprofesseurs auront sans doute moins d'heures à assurer par classe etverront ainsi leur nombre de classes augmenter.

Enfin, en classede Terminale L, l'enseignement de la littérature passe à deux heurespar semaine, malgré une expérience convaincante de quatre heures, quifonctionnait bien depuis plusieurs années et permettait d'asseoir laspécificité littéraire de la filière sur un programme sérieux etexigeant. L'enseignement de spécialisation obligatoire de Première L etintitulé Littérature française disparaît et aucune optionspécifiquement littéraire n'est plus proposée aux élèves.

Le plusétrange dans cette réforme est qu'elle prétend vouloir « renflouer » lafilière L. Or, avec 3 heures 30 de français par semaine en moins surtrois ans pour un élève suivant le cursus littéraire (soit 126 heuressupprimées au total), les mots du ministère résonnent comme un habilecamouflage d'une diminution radicale de la place du français dansl'enseignement.

Le français n'est pas une matière comme uneautre. Est-ce une matière de moindre importance qu'une autre ? Déjà,depuis plusieurs décennies, les professeurs ne disposent que de deuxans pour préparer leurs élèves à deux épreuves de baccalauréat, tandisque les autres matières disposent de trois ans pour les préparer à uneseule épreuve ! Cet écart, de plus en plus nuisible à la maîtrise et dela langue et des exercices requis, explique peut-être la médiocrité desrésultats de nos élèves au baccalauréat. Un véritable «renflouement» etde la filière L et de l'enseignement du français aurait consisté àajouter des heures de français en terminale S et ES ainsi qu'une heurehebdomadaire dans tous les niveaux. Le français est le poumon desautres disciplines. Sans maîtrise de celui-ci, il est fort difficile deréussir dans les autres matières, quelles qu'elles soient.

Lasuppression de 126 heures d'enseignement obligatoire du français surtrois ans, ainsi que la perte objective de contenus proprementlittéraires dans une partie des heures restantes (144 heures), faitclairement apparaître l'esprit de cette réforme : on ne donne plus auxélèves les moyens de progresser dans la maîtrise de leur langue ni dansla connaissance de la littérature. Matière d'éveil et de réflexion aumême titre que l'Histoire et la Géographie, le français fait l'objet decoupes claires pour que l'école ne soit surtout pas le lieu d'unapprentissage de l‘esprit critique. Priver le peuple de sa proprelangue, c'est délibérément chercher à le priver de son outil de pensée.Il n'est pas besoin d'avoir lu George Orwell pour comprendre qu'unelangue appauvrie donne des esprits plus accessibles aux slogans et àl'absence de logique.

Les belles paroles du projet cachent mal desurcroît son objectif majeur : faire passer les restrictionsbudgétaires pour une réforme de l'enseignement. Les prévisions dubudget 2010 sont claires : - 5200 postes seront supprimés dans lesecond degré public. En ne remplaçant pas un professeur sur deux quipart à la retraite, il faut bien faire en sorte que ceux qui restenttravaillent plus, sans être payés plus : les professeurs de françaisseront les premiers à en faire les frais dès la rentrée prochaine oùils verront leur nombre de classes augmenter.

Nous demandons leretrait immédiat de ce projet de réforme et nous appelons les parentsd'élèves, les syndicats, les partis à exiger, avec nous quel'enseignement du français garde une place de premier plan dans lecursus des élèves.