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Presse et scène au 19e siècle

Presse et scène au 19e siècle

Publié le par Bérenger Boulay (Source : Olivier Bara)

Presse et scène au XIXe siècle

(1791-1914)

Colloque international,

Université Paul-Valéry Montpellier 3

 du 17 au 19 juin 2010

organisé par Olivier Bara (UMR-Lire/ Lyon 2/CNRS)

 et Marie-Eve Thérenty (Rirra21/Montpellier 3/IUF)

Des travaux récents sur le théâtre au XIXe siècle (Hélène Laplace-Claverie, Sylvain Ledda, Florence Naugrette [dir.], Le Théâtre français au XIXe siècle, Anthologie de L'Avant-Scène théâtre, 2008 ; Jean-Claude Yon [dir.], Le Théâtre français à l'étranger au XIXe siècle, Nouveau Monde éditions, 2008) et sur le journal (Dominique Kalifa, Philippe Régnier, Marie-Eve Thérenty, Alain Vaillant [dir.], La Civilisation du journal. Histoire culturelle et littéraire au XIXe siècle, Nouveau monde éditions, à paraître en 2009) ont considérablement renouvelé l'historiographie de ces deux champs, mais aucune enquête d'ampleur n'a entrepris d'explorer systématiquement les relations croisées et complexes de la scène et de la presse au XIXe siècle. Pourtant bien des phénomènes sociologiques, historiques, politiques, institutionnels et poétiques imposent une mise en relation.

Presse et scène sont souvent fréquentées et alimentées par les mêmes écrivains au XIXsiècle. Car si elles n'apportent pas la même considération ou la même reconnaissance symbolique que la poésie, elles délivrent souvent des appointements beaucoup plus conséquents que la librairie. Balzac dans sa Monographie de la presse parisienne pointe ces petits journalistes « vivant de leur bien, en bourgeois » car ils « ont joint à ce métier l'exploitation du vaudeville et du mélodrame en commandite ». La bohème fourmille de journalistes qui, comme Henri Murger ou comme Henri Monnier, le créateur de Joseph Prudhomme, sont aussi des vaudevillistes très célèbres. La plupart des grands écrivains comme Balzac, Sand, Dumas ou Zola chercheront d'ailleurs aussi notoriété et revenus au théâtre et dans les journaux.

Les mêmes pratiques d'écriture, souvent méprisées par les Ecrivains qui y voient le comble de la « littérature industrielle » circulent  dans le journal et au théâtre : écriture en collaboration, production de commande et en série, reprise et dévoiement générique de personnages ayant déjà circulé comme madame Angot. Presse et scène fournissent les productions les plus éphémères liées à l'actualité la plus fugace. Le journal et le théâtre sont en fait les premiers vecteurs du développement d'une culture de masse qui développe une relation à la fois matricielle et ambiguë avec la littérature.

Politiquement, ces deux mondes sont étroitement surveillés par un pouvoir qui tout au long du XIXe siècle les censure et/ou les contrôle abondamment car il pressent leur pouvoir subversif et leur lien direct avec le public. De ces deux lieux viendront aussi des formes de contestation obliques, et quelquefois jumelles comme le prouve la circulation d'un Robert Macaire entre presse et scène.

Cette proximité explique peut-être la cruauté de ces deux mondes l'un envers l'autre comme le montre Illusions perdues de Balzac. Alors que les journaux dissèquent avec délectation les coulisses des théâtres dans les échos et le feuilleton, les pièces de théâtre font une critique ingénieuse du régime de la publicité et des journalistes à l'image d'Eugène Scribe dans Le Charlatanisme ou La Camaraderie, ou de Delphine de Girardin dans sa pièce L'Ecole des journalistes.

Mais ces deux mondes sont surtout producteurs de phénomènes textuels qu'ils s'échangent dans un cycle dialectique que rien n'arrête : scies de vaudevilles transmises par les journaux, épigrammes journalistiques resservies dans les pièces de théâtre, adaptations de pièces de théâtre sous forme de romans-feuilletons, publication de pièces réputées injouables dans les revues ou au rez-de-chaussée des quotidiens, revues de fin d'année qui reprennent toute la production journalistique de l'époque ou font paraître en scène des journaux personnifiés,  chroniques de presse transformées en pièces (Courteline). L'hybridation des procédés est sans limite comme le montrent la théâtralisation générale de l'article journalistique et la présence en fin de siècle de petites saynètes à la Capus dans tous les journaux de l'époque.

Nous souhaitons que tous ces aspects - et d'autres - soient explorés dans le colloque. Il ne s'agira cependant pas ici de s'interroger sur la critique théâtrale déjà explorée dans un colloque récent (Le Miel et le fiel, Marianne Bury, Hélène Laplace-Claverie [dir.], PUPS, coll. « Theatrum mundi », 2008), mais d'analyser les multiples relations sociologiques, poétiques, politiques que nouent ces deux mondes souvent décrits l'un et l'autre comme marginaux ou secondaires par rapport au champ littéraire. Ces deux champs désignent des genres d'écriture et des pratiques littéraires et sociales qui fonctionnent en miroir. Pourront notamment être explorées les pistes suivantes :

1/ Relais

-Carrières croisées ou parallèles : voies de la reconnaissance institutionnelle, hiérarchies des fonctions et des institutions au théâtre et dans le journal, réussites économiques ou sociales, doubles carrières et réseaux communs (directeur de théâtre et de journal, dramaturge et critique, comédien et journaliste), journaux émanant d'une salle de spectacle…

-Construction et gestion médiatique des carrières théâtrales (les débuts, les premières, les potins, les « bénéfices », les retraites, les nécrologies…).

- Rapports parallèles au pouvoir politique et jeux croisés avec le contrôle étatique.

2/ Reflets

-La presse représentée au théâtre : figures de journalistes et intrigues de journal, la salle de rédaction comme lieu théâtral, représentations satiriques de la presse et de son pouvoir…

-Constructions médiatiques (romans-feuilletons, physiologies, premiers Paris, anecdotes…) de types et de lieux emblématiques de la vie théâtrale : l'actrice, le débutant, le protecteur, le foyer, la salle de spectacle…

3/ Echanges

-Journal comme support éditorial et éventuel lieu d'invention poétique : spectacles dans un fauteuil, pièces publiées en feuilleton, texte théâtral et images de spectacle, presse illustrée spécialisée, reconstitution du spectacle visuel dans les pages du journal.

-Formes et écritures : sous-genres dramatiques nés du journal (revue, drame-chronique, mélodrame-fait divers, vaudeville anecdotique…) ; théâtralisation de l'écriture journalistique (mise en dialogue, dramatisation, procédés rhétoriques ou comiques, adaptation des romans-feuilletons à la scène…)., hybridation des procédés.

- Reprises et adaptations de figures et de textes journalistiques/dramatiques.

Le colloque se tiendra à l'université Paul-Valéry de Montpellier 3 du 17 au 19 juin 2010. Les propositions de communication composées d'un curriculum vitae succinct et d'un résumé du projet (2000 signes maximum) seront envoyées, pour validation par le comité scientifique du colloque, avant le 30 octobre 2009 à Olivier Bara (bara.olivier@wanadoo.fr) et à Marie-Eve Thérenty (met@club-internet.fr).