Essai
Nouvelle parution
Olivier Sécardin, Même heure même endroit. De la ponctualité en art.

Olivier Sécardin, Même heure même endroit. De la ponctualité en art.

Publié le par Julia Peslier (Source : Olivier Sécardin)


Olivier Sécardin,

Même heure même endroit. De la ponctualité en art,

Paris, Archibooks, 2007.



ISBN : 978-2-9156-3966-7
96 pages
32 x 23 cm ( L x H)
Couverture souple
Prix de vente : 20 euros





À l'occasion d'une exposition d'art – Même heure même endroit (28 mars - 3 septembre 2007) – organisée à l'abbaye de Maubuisson, construite au XIIIe siècle mais métamorphosée une saison en épicentre de la création la plus contemporaine, associant six artistes contemporains, Olivier Sécardin s'aventure à un exercice d'esthétique comparée. Les propositions artistiques exposées ici (vidéos, sculptures, environnements, photographies, objet, peinture…) s'attachent à décrypter l'actualité et à repenser le statut des images médiatiques qui en sont le vecteur, les frissons performatifs qui traversent l'art contemporain et ses fantômes. Qu'appelle t-on une image juste ? Et dira-t-on jamais ce qui se regarde ? L'art n'est-il qu'une sensibilité ? Ou un témoin sensible, partiel, partial, fragile – d'une sensibilité à la mesure de sa résistance – fabricant d'images qui contribuent au débat sur les processus de représentation du réel ? L'image elle-même n'est-elle qu'une représentation imaginaire (Carlos Castillo), un cliché délibérément retravaillé (Benoît Broisat), le rapprochement d'images opposées (Olga Kisseleva), des icônes qui nous ressemblent (Pascal Convert), une image vivante, liée à une expérience vécue (Seulgi Lee), une autofiction performative et poétique (Grace Ndiritu) ? Même heure, même endroit est l'exposition d'une époque d'images et d'un espace devenu mondial, nord-sud, est-ouest. Tous les projets réunis (vidéos, sculptures, environnements, photographies, objet, peinture…) s'attachent à décrypter l'actualité et à repenser le statut des images médiatiques qui en sont le vecteur. Pour rendre raison si ce n'est justice à cette « époque d'images », et pour l'expliquer dans la création des oeuvres des artistes présentés, le catalogue s'ouvre sur un cahier de 12 pages illustrant les photos de l'actualité internationale. Ces événements sont ceux qui ont conduits à la production d'une oeuvre. Puis, suite à ce premier cahier, se déroulent les prises de vues des oeuvres in situ, soit au coeur de l'abbaye. Façon de rappeler qu'il n'y a pas d'art sans mémoire ni possibilité de rendez-vous.

Rendez-vous est pris. Même lieu, même heure.

* * *
(Extrait)

« Proposer un lieu connu à des gens qui ne sont pas des inconnus redouble un désir de coïncidence, dans l'espace et dans le temps. Que fait-on lorsque l'on donne rendez-vous à quelqu'un, même lieu, même heure ? D'abord, on convient d'un délai qui équilibre la mémoire et l'au revoir par l'attente. De sorte que l'on puisse envisager un retour. Ici, on anticipe. Toute cette stratégie ne met certes pas à l'abri des retards ; du moins, elle réduit l'aléa de la prochaine rencontre par un choix continu. Même heure, même endroit se dit donc d'une fidélité portée en considération. Et cette fidélité, que seuls les vivants peuvent s'accorder entre eux, dit quelque chose d'une égale considération. Dans l'intervalle qui sépare un moment de son lendemain, elle rend possible le chemin et témoigne d'engagements réciproques. Puisse la ponctualité être au rendez-vous. Après

Je dis toujours qu'il y a plein d'images qui viennent à l'esprit.
Que l'avenir dure longtemps.
Qu'il n'y a pas de murs qui ne peuvent être abattus.
Que les illusions ne dispensent pas de regarder les choses en face.
Que la morale exige que nous nous mettions en péril aux moments précis de notre ignorance.
Que la responsabilité est irrécusable.
Que vivre est une chance d'être ému.
Et que la vie est faite de traverser des émotions.
Que moi qui parle de la mort des autres, je vais mourir.
Qu'à cet instant, rien en moi ne parlera plus.
Que seuls les endeuillés seront consolés.
Mais qu'en attendant, plusieurs futurs sont possibles, et encore davantage de retours.
Enfin, que même si rendez-vous est pris – même heure, même endroit – il y aura toujours mille et une ruses pour ajourner ponctualité, ne serait-ce que par ce que l'image est toujours un espace où se perdre.»

                                                Olivier Sécardin