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Notion ou concept de passage : quelle pertinence en sciences du langage ?

Notion ou concept de passage : quelle pertinence en sciences du langage ?

Publié le par Marc Escola (Source : Équipe ParLAnCES, Pierre Manen)

Colloque international

Notion ou concept de passage :

Quelle pertinence en sciences du langage ?

Université Jean Monnet (St Etienne) – 21 et 22 novembre 2014

La notion de passage demeure pré-théorique dans la littérature linguistique ; on la voit apparaître sous différents avatars selon les paradigmes : transformation en grammaire générative, transfert en pragmatique, transposition en traductologie, glissement en sémantique,  évolution en diachronie, changement en socio-linguistique …

Le seul paradigme où la notion a trouvé à se conceptualiser est celui de la linguistique interprétative de Rastier.

A titre d’exemples, voici comment peut se décliner la notion dans différents domaines :

  • En diachronie, la notion de passage tente de circonscrire les différents processus d’évolution du système linguistique tant du point de vue phonétique que morpho-syntaxique, lexical ou sémantique (évolution populaire, création savante ou analogie).
  • En morpho-syntaxe, dans le paradigme générativiste, la notion de passage est sous-jacente à la notion de transformation (« transformation grammaticale », Harris 1952) utilisée pour rendre compte de l’organisation de la phrase sur la base de son insertion textuelle. Chomsky reprend en la modifiant cette notion de transformation et lui donne une dimension syntaxique fondamentale dans sa « grammaire générative » qui n’est pas nécessairement « transforma­tionnelle ». Les transformations assurant le passage de la structure profonde à la structure de surface disparaissent des grammaires récemment proposées, notamment de l’organisation syntaxique qui résulte du programme minimaliste (The Minimalist Program, 1995) : seul subsiste, à l’issue d’un passage régulé de termes primitifs à des termes complexes, le niveau syntaxique de la structure de surface.
  • En pragmatique, la notion de passage est en particulier employée dans les développements récents renvoyant aux opérations de pragmaticalisation, c’est-à-dire les transferts cagétoriels à l’œuvre en discours (ou lorsqu’il y a passage du discours à la langue) et permettant la création de marqueurs pragmatiques (appelés diversement marqueurs discursifs, mots du discours, particules énonciatives, etc. selon les auteurs). Cette transcatégorialité est comparable à celle qui caractérise la lexicalisation et la grammaticalisation, tout en posant des problèmes spécifiques et en se positionnant différemment par rapport à certains processus, par exemple l’analogie ou l’économie des changements linguistiques (Dostie 2004).
  • En linguistique cognitive, la notion de passage est adossée à celle de métaphore que Lakoff et Johnson (Philosophy in the Flesh 1999) ont décrite comme établissant des correspondances (mappings) entre deux domaines d’expérience et que Fauconnier et Turner (The Way We Think, 2002) décrivent comme un réseau mettant en place deux espaces de données entrantes (input spaces) mis en regard et qui trouvent leur résolution dans un espace intégré, résultant, espace fusionné (blended space).
  • En sémiotique, on parle souvent de parcours (parcours narratifs, parcours figuratifs…). Le recours au mot passage permettrait alors de décrire certains moments de ces parcours. Par ailleurs, quand la théorie distingue plusieurs niveaux (comme c’est le cas pour le parcours génératif) on en arrive à parler du passage d’un niveau à un autre comme conversion. Les travaux de la sémiotique tensive tentent de montrer que toute signification est régie par des valeurs tensives qui accompagnent  chacun des moments du parcours qu’on pourrait alors désigner comme des « passages ».
  • En sociolinguistique, le passage peut être envisagé soit comme alternance de code soit comme manifestation du changement supporté par des évaluations sociales (Labov, 1972).
  • Dans le domaine de la traduction, la notion de passage est quasiment  tautologique puisque l'ensemble des études traductologiques porte précisément sur cette notion de transfert linguistique et/ou culturel (le passage d'un mot, d'une syntaxe, d'un discours, d'une langue, d'une culture à l’autre). En outre, la pratique de la traduction a recours à des techniques de transposition, de modulation, de dérivation, d'étoffement, d'emprunts ou d'équivalences qui impliquent un degré de passage différent, mais qui sont impératives au processus de traduction. Ce colloque accueillera les approches linguistiques et culturelles de la traduction, qu'elles soient syntaxiques ou sémantiques, qu'elles s'appuient sur des grammaires traditionnelles ou génératives, et pourra revenir sur la tâche du traducteur, grâce aux réflexions littéraires sur la traduction inspirées de W. Benjamin, A. Berman, J. Derrida, H. Meschonnic, V. Larbaud etc. Les exemples de traductions intralinguales, interlinguales et intersémiotiques amèneront une pluralité de points de vue nécessaire à la définition de ce que la notion de passage recouvre en traduction.
  • En linguistique textuelle, le mot renvoie à la question de l’unité textuelle. Difficile question, car on ne peut pas considérer que l’unité textuelle minimale soit la phrase. Pour Le Goffic, par exemple, il n’est pas possible de comptabiliser les phrases d’un texte : il faut même envisager l’ensemble du texte comme un « passage ». La notion de passage trouve également d’autres applications dans la sémantique interprétative, dans la recherche d’information ou la repré­sentation des connaissances. Rastier (2008) la redéfinit en s’appuyant sur la sémantique de corpus : il précise la notion de passage par l’examen des rapports de sémiosis entre son contenu et son expression, comme par l’étude des rapports contextuels au sein du passage et entre passages. Les rapports entre fonds et formes sémantiques, les transformations entre passages conduisent à préciser des phénomènes qui intéressent tant la textualité que l’intertextualité.

L’objet de ce colloque – qui s’inscrit dans le cadre de la thématique du quinquennal du laboratoire CIEREC (Centre Interdisciplinaire d’Études et de Recherches sur l’Expression Contemporaine) – est donc d’étudier les emplois de ce vocable dans les différents champs de la linguistique et de voir s’il est possible d’en proposer une définition conceptuelle complétant celle que la linguistique textuelle et la sémiotique interprétative en ont donnée ou le situant dans un rapport de simple synonymie. Il se propose de convoquer différentes recherches en linguistique : le comité scientifique ne favorisera donc aucun axe par rapport aux autres mais souhaiterait qu'une grande diversité de domaines et de cadres théoriques soit représentée. On sera donc libre de développer une ou plusieurs questions, en synchronie ou diachronie,
 à partir de la présentation qui précède dans les domaines suivants : analyse du discours, lexicologie, linguistique historique, linguistique textuelle, morpho-syntaxe, phonétique, phonologie, sémantique, sémiotique, traduction et traductologie, pragmatique, typologie des langues, etc.

Le colloque international doit permettre de dégager le matériau d’un volume consacré aux facettes de la notion de passage en sciences du langage.

Lieu du colloque

Université Jean Monnet

Campus Tréfilerie

CIEREC (EA 3068)

Maison Rhône-Alpes des Sciences Humaines (MRASH)

35 rue du 11 novembre

42023 SAINT ETIENNE cedex 2 (France)

Calendrier



  • Date-limite envoi des propositions (titre et résumé de 2500 signes, espaces compris) : 20/06/2014
  • Retour après expertise : 12/07/2014
  • Colloque : 21 et 22 novembre 2014

Langues du colloque

Français, anglais

Conditions et tarifs

Des frais d’inscription couvriront

  • la participation au colloque
  • le dossier des participants
  • les repas de midi et le « dîner de gala »
  • les pauses café

(tarifs et modalités de règlement communiqués ultérieurement)