Édition
Nouvelle parution
N. Fernandez de Moratin, L'Art des putains (1770).

N. Fernandez de Moratin, L'Art des putains (1770).

Publié le par Marc Escola

L'art des putains
Nicolas Fernandez de Moratin

Paru le : 20/08/2008
Editeur : Dilecta
Collection : Bibliothèque des curieux

EAN : 9782916275376

Prix éditeur : 13,00€


Madrid est une fête pour qui sait s'y prendre ! Sous prétexte d'offrir au jeune apprenti libertin un guide pratique des plus fringantes prostituées de la ville, Nicolas F. de Moratin (1737-1780) brosse une facétieuse galerie de portraits féminins, assortie d'ingénieuses combines de chasse. Dans une capitale animée de fêtes, de corridas ou de théâtres, célèbre pour le caractère et la beauté de ses femmes, il est indispensable d'être le plus malin, afin de déjouer les ruses des putains et de leurs maquerelles. L'Art des putains - écrit entre 1767 et 1772 - est une oeuvre maîtresse de la littérature libertine espagnole, traduite ici en français pour la première fois.

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Dans Le Monde des livres daté du 19/9/8, on pouvait lire un article de P. Kéchichian consacré à cet ouvrage:

"Les libertins françaisont souvent manqué de fantaisie. Comme Sade, ils sont même parfoisdevenus carrément funèbres. Ou, comme les protagonistes des Liaisons dangereuses,froids, calculateurs, témoins cyniques de l'épuisement du plaisir. Plussouvent, tout occupé à échauffer le lecteur, l'écrivain libertin aindéfiniment répété les mêmes figures et postures, mimé les mêmessoupirs et pâmoisons, saturant puis endormant l'attention qu'on auraitvoulu prêter aux situations les plus piquantes.

empty.gifUn peu guindé etconformiste, l'esprit français n'aurait sans doute jamais accouché decette petite perle aux étranges reflets qui a pour titre El Arte de las putas.Datant des années 1770 et signé par Nicolás Fernández de Moratín(1737-1780), notable et dramaturge espagnol appartenant à ce qui futnommé le "premier romantisme", ce petit traité en quatre chants et enhendécasyllabes, propose un éloge parodique et enjoué de l'amourphysique. Assez loin des figures de prostituées que l'on croise dans lalittérature française ou anglaise, la putain, ici, joue autrement dusavoir pratique sur la jouissance dont elle est la garante. Quant aucommerce qu'elle fait d'elle-même, il est parfaitement licite. Comme ilest licite pour le client d'obtenir, par la tromperie, par la ruse oupar les compliments, plus de faveurs que celles qu'on voulait bien luiaccorder.

Dans la préface de cette première traduction de L'Art des putains (une édition de 1830 a pour titre El Arte de putear... "L'Art de putaner" pourrait-on dire en français), Jean M. Goulemot analyse cet écrit. "Texte carnavalesque", dit-il, dont "il faut souligner (les) aspects parodiques multiples et divers". Quant à la forme que l'auteur a donnée à "ce long défilé des putains et de leurs vertus", il "n'est pas sans rappeler l'évocation des héros propre au discours antique ou les formes litaniques de l'hagiographie populaire". Moratín va parfois jusqu'au "délire verbal" afin d'imiter "l'animalité de la geste amoureuse".

Hommedes Lumières, Moratín partage les idées de son temps sur la sexualité.Comme Diderot, il considère l'activité sexuelle comme un fait de naturequi ne relève ni de la morale ni de la religion... Tout "le bataillon de Vénus" s'offre aux "fiers gaillards de Madrid"... "Ah ! méprisables auteurs !, s'écrie Moratín, vous fondez la vertu sur l'abstinence d'une chose essentielle et nullement redoutable..."

Latraduction de Frédéric Prot, autant que l'on puisse en juger, estexcellente quant à sa langue et à son rythme. De belles gravures deThomas Verny, en noir et blanc, comme chez Félix Vallotton, agrémententcette édition."