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Littérature, Paysage et Ecologie (revue Trans-)

Littérature, Paysage et Ecologie (revue Trans-)

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Emilie Lucas-Leclin)

Littérature, Paysage et Ecologie

Si l’on considère le postulat d’Anne Cauquelin dans L’invention du paysage  (1989), notre perception du paysage est une construction, un fait de culture. Le paysage s’oppose ainsi à la nature, car il est une nature configurée par l’œil humain. Alain Corbin, dans L’homme dans le paysage (2001), rejoint cette analyse : le paysage est une manière de lire l’espace. Qu’advient-il quand cette lecture de l’espace se fait littérature ? Que le paysage soit objet de contemplation ou environnement vécu et expérimenté, il offre à l’art un champ thématique et esthétique des plus vastes.

On pourra ainsi interroger les liens entre paysage et création littéraire. En effet, Des Rêveries du promeneur solitaire de Rousseau à Walking de Henry David Thoreau, le lien entre la réflexion et le paysage fait apparaître ce dernier comme un déclencheur de la méditation philosophique ou une mise en « marche » de l’inspiration poétique. Dans Une apocalypse tranquille, Kenneth White appelle cette mise en continuité de la conscience du poète et de l’espace parcouru la « géopoétique », qui consiste à « faire surgir une pensée du paysage ».

Inséparable d’une « pratique » de l’espace, l’écriture devient alors « une manière d’explorer la géographie du monde » (G.-A. Goldschmidt), mais aussi d’arpenter le temps : car pour se dire, et se rendre visible, le temps doit parfois prendre la forme de l’espace. Le paysage peut ainsi devenir un lieu de mémoire : alors que la marche, dans les Carnets ou les romans de nombre d’écrivains arpenteurs, comme Peter Handke, ouvre à une poétique du présent comme accueil de l’instant fugitif, le paysage invite  à un voyage sur les traces du passé et de l’Histoire, dans les œuvres de Sylvie Germain ou d’Adam Bodor.   

Lieu commun de la littérature de voyage et passage obligé du roman colonial, le paysage structure des espaces familiers ou exotiques, cristallisant parfois la puissance d’un univers  fictionnel : G. Deleuze évoque ainsi les collines de Faulkner ou la steppe de Tolstoï, la lande, dans les romans de Thomas Hardy, ou encore l’océan  chez Melville. Dans ces œuvres, « le paysage voit » : « bloc de sensations », il excède le vécu et vaut pour lui-même et par lui-même, dépassant tout subjectivisme. Le paysage ouvre ainsi à une réflexion anthropologique sur la place de l’homme dans son environnement. Si pour Deleuze il s’agit de penser l’énigme héritée de Cézanne, « l’homme absent, mais tout entier dans le paysage », Rilke lisait déjà dans « la profondeur qui s’ouvre derrière Mona Lisa » une mise en question de l’anthropocentrisme : « posé parmi des choses », « dans la profondeur commune où puisent les racines de tout ce qui croît », l’homme « n’est plus celui autour duquel gravitent le soir et le matin, le proche et le lointain ».  L’effacement de la figure humaine au profit du paysage, ou d’un environnement qui ne porte plus la trace de l’homme qu’en creux, renvoie à tout un courant de l’art contemporain.

Dans le sillage des récentes réflexions sur l’écocritique (Alain Suberchicot, Littérature et environnement. Pour une écocritique comparée, 2012), domaine largement développé dans les pays anglo-saxons depuis les années quatre-vingt-dix, on pourra ainsi se demander comment la littérature prend en charge les thèmes de l’écologie, de l’environnement et du paysage. En créant de nouveaux « partages du sensible » (Rancière), la littérature est-elle capable de modeler de nouvelles manières d’habiter le monde ?

Ce sujet n’est exclusif d’aucun genre littéraire (roman, nouvelle, théâtre, poésie, etc.), et peut ouvrir à des comparaisons avec les arts plastiques ou le cinéma : seule la perspective comparatiste est requise. Les propositions de communication (3000 signes), accompagnées d’une brève bibliographie et d’une courte présentation du rédacteur, doivent être envoyées avant le 19 avril 2013 en fichier word à l’adresse : lgcrevue@gmail.com. Les articles retenus seront à envoyer pour le 20 juin 2013. Nous rappelons que la Revue de littérature générale et comparée TRANS- accepte les articles rédigés en français, anglais et espagnol.

 

Literature, Landscape and Ecology

If we consider the statement of Anne Cauquelin in “The Invention of the Landscape” (1989), our perception of the landscape is a construct, a cultural fact. The landscape is thus opposed to nature, because it is a nature shaped by the human eye. Alain Corbin, in “Man in the Landscape” (2001), agrees with this analysis: the landscape is "a way of reading" space. What happens when this reading of space becomes literature? Whether the landscape is an object of contemplation or an environment lived and experienced, it offers art one of the largest thematic and aesthetic field.

One can thus examine the links between landscape and literary creation. Indeed, in Reveries of the Solitary Walker by Rousseau or Walking by Henry David Thoreau, the link between reflection and landscape shows the latter as a trigger for philosophical meditation or an activation of poetic inspiration. In “A Quiet Apocalypse”, Kenneth White calls "geopoetic", this continuity between the poet’s consciousness and the scenery wandered in. It consists in "making a thought emerge from the scenery."

Inseparable from a "practice" of space, writing becomes "a way of exploring the geography of the world" (G.-A. Goldschmidt), but also of traveling in time: for to call itself visible and become visible, time sometimes takes the form of space. The landscape can thus become a place of memory: while walking in travel books or novels of strider writers, as Peter Handke, leads to poetics of the present as a welcoming of the fleeting moment, the landscape invites to a journey in the footsteps of past and history in the works of Sylvie Germain or Adam Bodor.

Commonplace in travel literature and a prerequisite in colonial novels, the landscape gives structure to familiar or exotic spaces, sometimes crystallizing the power of a fictional universe: G. Deleuze evokes "the hills of Faulkner" or "the Steppes of Tolstoy", "the moor" in the novels of Thomas Hardy, or "the ocean" in Melville’s works. In these works, “the landscape sees ", "bloc of sensations," it surpasses experience and is for itself and by itself, going beyond all subjectivism. The landscape opens up to an anthropological reflection on the place of man in his environment. If for Deleuze it is necessary to think about the enigma inherited from Cézanne, "the man absent, but entirely in the landscape," Rilke already read in "the depth that unseals behind Mona Lisa" a questioning of the anthropocentrism "placed among things," "in the common depth from which the roots of everything that grows draw," man "is not anymore the one around which the morning and the evening, the near and the far revolves ". The deletion of the human figure in favor of the landscape or of an environment that now barely carries the trace of man refers to an entire movement of contemporary art.

In the wake of recent reflections on ecocriticism (Alain Suberchicot, Littérature et environnement. Pour une écocritique comparée, 2012), an area largely developed in Anglo-Saxon countries since the nineties, one can wonder how literature deals with the themes of ecology, environment and landscape. By creating new "divisions of the sensible" (Rancière), is literature able to shape new ways of inhabiting the world?

This topic, which is intentionally broad, is open to all periods and genres (novel, story, drama, poetry, etc.) and may be open to comparisons with film and other visual arts; the only requirement is that the approach be comparative. Proposals (3000 characters or 500 words), along with a brief bibliography and a short author’s statement, must be sent before April 19, 2013 in Word or RTF format to lgcrevue@gmail.com. Selected articles must be submitted by June 20, 2013. As a reminder, TRANS- accepts articles in French, English and Spanish.

 

Literatura, Paisaje y Ecología

Si se toma en cuenta lo que postula Anne Cauquelin en L’invention du paysage  (1989), nuestra percepción es una construcción, un acto cultural. El paisaje se opone a la naturaleza, pues es una naturaleza configurada por el ojo humano. En L’homme dans le paysage (2001), Alain Corbin se une a esta postura: el paisaje es « una forma de leer » el espacio. ¿Qué sucede cuando tal lectura del espacio se vuelve un acto literario? El paisaje, objeto de contemplación o entorno vivido y experimentado, ofrece al arte uno de los campos temáticos y estéticos más vastos.

De tal modo, se podrían cuestionar lo que une al paisaje con la creación literaria. De los Ensueños del paseante solitario de Rousseau, al Walking de Henry David Thoreau, el vínculo entre la reflexión y el paisaje hace que este último aparezca como un disparador de la meditación filosófica o una “activación” de la inspiración poética. En Un tranquilo apocalipsis, Kenneth White nombra a la continuidad de la consciencia del poeta y del espacio recorrido “una geopoética”, la cual consiste en “hacer surgir un pensamiento del paisaje”.

Inseparable de una “práctica” espacial, la escritura se convierte en “una forma de explorar la geografía del mundo” (G.-A. Goldschmidt), aunque también de recorrer el tiempo: pues para ser dicho, y hacerlo visible, el tiempo a veces cobra la forma del espacio. El paisaje se puede convertir de eso modo en un lugar para la memoria: mientras que en algunos cuadernos o novelas de numerosos escritores caminantes, como Peter Handke, el andar desemboca en una poética del presente en el que se acoge el instante fugitivo, en las obras de Sylvie Germain o de Adam Bodor, el paisaje invita a viajar por las huellas del pasado y de la Historia.

Lugar común de la literatura de viaje y pasaje obligado de la novela colonial, el paisaje estructura espacios familiares o exóticos, cristalizando a veces el poder de un universo fictional: G. Deleuze evoca de este modo “las colinas de Faulkner” o “la estepa de Tolstoi”, la “estepa” en las novelas de Thomas Hardy, o incluso “el océano” en Melville. En estas obras “el paisaje se ve”: “bloque de sensaciones”, excede lo vivido y vale por y para sí mismo, rebasando cualquier subjetivismo. EL paisaje se abre de esta forma a una reflexión antropológica sobre el lugar del hombre en su entorno. Si para Deleuze se trata de pensar el enigma heredado de Cézanne, “el hombre ausente pero de cuerpo entero en el paisaje”, Rilke leía ya en “la profundidad que se abre detrás de Mona Lisa” una interrogación del antropocentrismo: “colocado entre otras cosas”, “en la profundidad común en donde se nutren las raíces de todo lo que crece”, el hombre “ya no es aquel en torno a quien gravitan la noche y la mañana, lo cercano y lo distante”. El desvanecimiento de la figura humana en provecho del paisaje, o del entorno que ya no conserva la huella impresa del hombre, remiten a toda una corriente del arte contemporáneo.

Por ende, en la misma línea de las reflexiones recientes que se han hecho sobre la ecocrítica (Alain Suberchicot, Littérature et environnement. Pour une écocritique comparée, 2012), campo desarrollado ampliamente desde los años noventa en los países anglosajones, sería pertinente interrogarse sobre cómo la literatura integra los temas de la ecología, el entorno y el paisaje. Al crear nuevas “formas de compartir lo sensible” (Rancière), ¿la literatura es capaz de modelar nuevas formas de habitar el mundo?

Este tema pretende ser lo más amplio posible, sin exclusión de forma, época o género, teniendo siempre en cuenta la perspectiva comparatista de la publicación. Las propuestas de artículo (3000 signos, 500 palabras) acompañadas de una breve bibliografía y de una corta presentación del redactor, deben ser enviadas antes del 29 de abril de 2013 en documento word o RTF a la dirección: lgcrevue@gmail.com siguiendo las pautas de redacción de la revista: http://trans.univ-paris3.fr/spip.php?article72. Los artículos seleccionados deberán enviarse antes del 20 de junio del 2013. Recordamos que la revista TRANS- acepta los artículos redactados en francés, inglés y español.