Actualité
Appels à contributions
Littérature et sacré : la tradition en question

Littérature et sacré : la tradition en question

Publié le par Emilien Sermier (Source : Litvan)

 

Littérature et sacré : la tradition en question

Date du colloque: 21 et 22 novembre 2014

 

Quand le mythe meurt, la musique devient mythique de la même façon que les œuvres d’art,

 quand la religion meurt, cessent d’être simplement belles pour devenir sacrées.

 

Lévi- Strauss

 

Ce colloque envisage une réflexion sur les liens possibles entre littérature et sacré. La notion de sacré sera comprise dans un sens large, afin de refléter son caractère ambivalent entre le religieux et le profane. Notre propos n’est donc pas de présupposer d’emblée une définition du sacré, mais d’étudier précisément les différents regards sur cette notion, voire expérience, par des écrivains dans leur propre travail d’écriture ou de lecture et d’interprétation de textes, en tant que critiques littéraires.

Qu’il s’agisse d’une perspective sociologique de la littérature sur le « pouvoir spirituel laïque de l’écrivain » dans la société moderne (Paul Benichou) et de sa conséquence, la sacralisation de l’écrivain, ou d’une approche plutôt immanente de la littérature à partir d’une analyse textuelle afin d’en dégager un prétendu contenu sacré (lecture de Martin Heidegger sur la poésie de Hölderlin), la réflexion sur les liens entre auteurs, textes et sacré dans les différents contextes portera nécessairement sur la transmission du sacré par le texte. Car, s’interroger sur le sacré en littérature pose une question préalable sur les modalités de construction d’une tradition littéraire du sacré, à savoir sur la possibilité ou l’impossibilité de sa transmission. Pour Walter Benjamin, Franz Kafka met en évidence dans ses récits la perte d’une possibilité de transmission et il parle d’« étiolement de la tradition ». Or le génie propre de Kafka, c’est précisément d’avoir fait de cet étiolement l’objet de ses récits. En effet, malgré la rupture avec une tradition religieuse, ce n’est que dans la sécularisation radicale que quelques bribes de cette tradition peuvent être sauvées. Ainsi, les personnages de Kafka ne sont pas capables de comprendre des lois qu’ils ignorent et auxquelles pourtant ils sont soumis. Kafka « renonça à la vérité pour conserver la transmissibilité », conclut Benjamin.

D’autres auteurs contemporains plus proches dans notre temps ont été intéressés par cette question. Ainsi, Frédéric Boyer a eu l’initiative d’entreprendre une nouvelle traduction collective de La Bible (Bayard, 2001), œuvre conjointe de biblistes et écrivains, pour la rapprocher des lecteurs contemporains et la faire revivre dans la langue française actuelle. Il explique que « la tradition isolée et prise au mot n’interroge plus le monde qu’elle entend éclairer. […] Conservation de la lettre des textes et transmigration de cette lettre dans les écritures du monde. Sans ce double mouvement, cette puissance paradoxale, il n’y eut pas de Bible. » Mais il s’agit moins d’une question de traduction que d’une question d’écriture. Car, explique-t-il : « Comment le monde écrit-il les Écritures ? C’est la question biblique par excellence. La question de la tradition biblique posée à chaque grande culture. » Interroger la transmission du sacré par les écrivains est donc une question concomitante à sa compréhension. 

Les différentes interventions pourront se déployer dans l’une des thématiques suivantes :

·      la sacralisation du rôle d’un écrivain, d’une œuvre ou d’un courant littéraire déterminé à un moment précis de l’histoire (ou sa récupération en vue de la construction d’un canon littéraire) ;

·      l’exclusion (le sacrifice ?) d’un auteur, œuvre ou courant littéraire ;

·      l’expérience de l’écriture comme expérience sacrée ;

·      le statut sacré du texte, voire du livre ;

·      le sacré en tant que source originelle et/ou sa possibilité de renouvellement.

Afin de répondre à l’interdisciplinarité qui caractérise le laboratoire Écritures et d’établir des ponts entre ses axes, on donnera priorité à toute approche théorique et comparatiste entre différents champs culturels et diverses périodes.

 

          Les propositions ainsi qu’une fiche bio-bibliographique sont à envoyer avant le 10 avril 2014 à : elena.di-pede@univ-lorraine.fr et valentinalitvan@gmail.com

Une publication des actes est prévue dans la collection « Littérature et Spiritualités » chez Peter Lang.