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Littérature et espaces

Littérature et espaces

Publié le par Irène Langlet

XXXe Congrès de la SFLGC : « Littérature et espaces »
(Université de Limoges, EA Espaces humains
et Interactions culturelles,
20-22 septembre 2001)

« Rupture épistémologique », « changement de paradigme », « révolution copernicienne » : les termes ne font pas défaut pour qualifier le développement dune nouvelle vision scientifique. Les comparatistes ne manquent pas aujourdhui de participer au débat épistémologique qui tente de redéfinir le fondement des études littéraires, de les situer au sein des sciences humaines. De toutes les intersections envisageables, il en est néanmoins qui sont privilégiées. Lun des points de focalisation les plus intenses (voir la thématique proposée par quelques-uns des derniers congrès de la SFLGC et de lAILC) concerne les relations entre littérature et espaces.

Cest quaujourdhui la notion despace repose la question du sujet dans une « épistémè » traditionnellement centrée sur la « présence » dun objet fixe, observable en laboratoire. La relation de lhomme à son espace nous entraîne dans les sciences du virtuel, de linachevé, de la complexité, de lémergence où les phénomènes ne sont pas déterminés. La pensée créatrice, lémergence de la parole, le sentiment du sacré, le mythe, la littérature semblent être autant dobjets improbables ou impossibles pour les sciences expérimentales. En prétendant que lespace nexiste pas en dehors de la langue et de la parole qui le créent, le disposent, en changent sans cesse les contours, la pensée contemporaine souvre sur de nouveaux horizons.

Dès lors, dinnombrables pistes se dégagent. En voici quelques-unes.

Philosophie, sémiologie, imagologie et géocritique. La complexité croissante de la perception et des représentations littéraires des espaces à partir des années soixante, en particulier, a poussé la théorie à se doter dinstruments susceptibles de rendre compte de cette multiplicité (ou de cet éclatement). Il est et a été question de poétique de lespace ou de la ville (G. Bachelard et P. Sansot), dimagologie ou de géopoétique (K. White) ; à Limoges, nous parlons même de géocritique. La philosophie, elle aussi, a fourni des repères importants : les notions de territorialisation, de dé- et de reterritorialisation (G. Deleuze et F. Guattari) sont-elles utiles dans un champ comparatiste ? ou encore la géo-philosophie dun Massimo Cacciari ? Quant à la sémiologie, par la voix de Y. Lotman, elle nous propose la sémiosphère, après que M. Bakhtine eut défini le chronotope. En quoi les études littéraires peuvent-elles tirer parti de ces apports ? En quoi, inversement, la littérature peut-elle contribuer à enrichir lépistémologie des espaces ?

Géographie et littérature. De toutes les diciplines connexes, en matière despaces, celle qui recoupe le plus nettement la littérature est la géographie. Certains géographes se livrent à des études littéraires (M. Brosseau), tandis que des comparatistes de renom dessinent des croquis pour suivre litinéraire de tel personnage dans Paris ou Londres (F. Moretti). La littérature comparée peut-elle et doit-elle occuper ce type dintersection ?

Histoire, littérature et espaces. Il nest pas que la géographie qui soit concernée. Depuis quelques années (1992 ?), les essais dhistoire littéraire européenne se multiplient. Est-ce que la spécificité comparatiste sexprime à travers une spatialisation de lhistoire littéraire ? En corollaire, létude des espaces est-elle le propre de certaines périodes littéraires ou de certains mouvements littéraires ?

Sciences, littérature et espaces. Les sciences dites « dures » peuvent-elles enrichir la théorie littéraire dans ses rapports aux espaces (physique nucléaire, physique quantique, thermodynamique, informatique,...) ?

Emergence de nouveaux espaces et dialogue des phonies. Labondance indique clairement que les espaces se multiplient en rapport avec les systèmes de représentation. Quel est aujourdhui le statut des littératures qui se trouvaient à distance du centre : les littératures des espaces qui furent colonisés, les littératures émanant de cultures géographiques dites « périphériques » : au niveau du pays, au niveau de la région ? En quoi la décolonisation a-t-elle accéléré le processus de morcellement / diversification des espaces ?

Thèmes et espaces. Les études thématologiques de lespace prennent elles aussi en compte cette grande variété. Quels sont aujourdhui les thèmes privilégiés de lespace ?

Mythes et espaces. Tout mythe sinscrit dans lespace. Mais est-il des mythes qui racontent la formation des espaces ? De ces mythes, lesquels ont aujourdhui la préséance ? À mi-chemin entre le thème et le mythe, il est des agrégats mythoïdes qui élèvent au rang de mythe des espaces concrets : Venise en est-elle le seul exemple ?

Le référent spatial. Quelles sont les relations entre lespace représenté, littérarisé, et son référent (le « réalème », selon L. Dolezel) ? Quel est le statut de lutopie dans le discours sur les espaces ? La littérature peut-elle « inventer » des espaces, et devenir elle-même un référent (Illiers-Combray,...) ?

Nomenclature des espaces. En littérature, comme en philosophie, lespace alimente bien des métaphores. La lexicographie sen réjouit, qui les recueille. Quelles seraient aujourdhui les figures de la spatialité les plus prestigieuses ? Léclatement de lespace nourrit-il la représentation métaphorique ? En outre, quel est aujourdhui le statut de la description ?

Éthique et espaces. Y a-t-il une perception éthique des espaces (Dante et sa Comédie tripartite, les camps, les colonies pénitentiaires, et, inversement, les utopies,...) ? Est-ce que cette perception-là serait la seule figée, où est ce quon assiste là aussi à une évolution ?

Psychanalyse et espaces. Lespace décrit précédemment est perçu sous un angle essentiellement macroscopique. Quant est-il de la projection du corps dans lespace ? Est-il aujourdhui une topologie de lintime ?

Arts et espaces. Les sytèmes de représentations sont-ils spécifiques à un vecteur particulier (littérature, cinéma, peinture, photographie, musique,...) ? Existe-t-il une forme commune à lensemble des disciplines ? Au sein de la littérature considérée stricto sensu, quel est limpact des grands genres (théâtre, roman, ...) sur la représentation des espaces ?

Le travail précis de réflexion collective sur la spatialité en littérature sera réparti en ateliers. Les pistes indiquées ci-dessus pourraient correspondre aux futurs ateliers. Mais, bien entendu, ce ne sont que des pistes : les suggestions datelier seront reçues avec le plus grand intérêt jusquau 15 octobre 2000. Linventaire des propositions de communication permettra ensuite de constituer des problématiques spécifiques qui seront étudiées par latelier correspondant. Les propositions, accompagnées dun résumé dune dizaine de lignes, devront impérativement nous parvenir avant le 15 février 2001. Le comité de sélection encourage les participants à situer leur projet dans une perspective théorique.

En outre, un groupe de discussion sur la problématique du congrès pourra permettre aux spécialistes du monde entier déchanger par le biais dInternet, des opinions, des informations et des questions. À partir du 15 avril 2000, ils pourront se connecter sur le serveur du Dictionnaire International des Termes littéraires (DITL) / Encyclopédie Electronique de la Science Littéraire (ENESLit) pour linformation et sur CYBERLit Portail de littérature générale pour le groupe de discussion à cette adresse : http://www-ditl.unilim.fr

Comité dorganisation :
Jean-Marie Grassin, Juliette Vion-Dury, Bertrand Westphal.