Agenda
Événements & colloques
Lieux communs du voyage

Lieux communs du voyage

Publié le par Bérenger Boulay (Source : Weber Anne-Gaëlle)

« Les Lieux communs du voyage (1750-1900) » Journée d'études du 6 juin 2008 Université de Paris I (Centre Malher, s. 107, 9 rue Malher) organisée par Sylvain Venayre et Anne-Gaëlle Weber

Genre sans loi, genre plastique, se revendiquant comme tel ou se dissimulant dans les replis d'autres genres (le roman, l'autobiographie, le feuilleton, etc.), le récit de voyage abonde en lieux communs. Qu'il s'agisse de lieux au sens rhétorique du terme (les topoï) ou au sens géographique, ils sont dénoncés avec constance depuis, au moins, le début du XIXe siècle. Toute une littérature, jusqu'à aujourd'hui, s'en est ainsi pris à ces lieux communs accusés d'affadir le récit de voyage, de simplifier le réel, de renoncer à l'impératif de connaissance qui, selon une logique issue de la Renaissance et renouvelée par les Lumières, constituait la principale des vertus du voyage. Le célèbre incipit de Tristes tropiques, « je hais les voyages et les explorateurs », les visait tout particulièrement.

Les grands voyages de circumnavigation de la fin du XVIIIe siècle ont aiguisé cette critique, sans doute plus ancienne, dans la mesure où il semblait que, après Cook, Bougainville et La Pérouse, les voyageurs étaient de plus en plus condamnés à marcher sur les traces de leurs prédécesseurs. La codification du récit de voyage romantique au début du siècle, l'assomption de la mystique de l'aventure à la fin, furent deux réactions, parmi d'autres, à ce qui était ressenti comme un état de fait.

On se propose ici de considérer les lieux communs sous leur double logique : une logique géographique, qui limite les thèmes à aborder et le type de description à utiliser, ainsi que l'équilibre entre la narration et la description, en fonction de l'espace visité ; et une logique discursive, qui régit l'art et la manière de dire en fonction des attentes supposées du lecteur et des modèles du récit. L'une et l'autre de ces logiques sont paradoxalement ce qui garantit la scientificité du texte, sa référentialité, et ce qui la met en péril en conduisant le voyageur à emprunter, à redire plutôt qu'à dire.

On entend donc étudier ces lieux communs à la fois sous la forme rhétorique des maxima sententia, mais aussi sous la forme de constantes thématiques dénoncées comme trop communes. L'idéal, sans doute, serait de partir des constantes stylistiques ou thématiques qui ont été explicitement érigées, par des voyageurs ou par des lecteurs, dès le XIXe siècle en lieux communs. On ne saurait toutefois se limiter à cela et il paraît indispensable de s'adosser, également, à l'immense catalogue de lieux communs élaboré par la littérature de voyage, souvent sous une forme ironique, à partir des années 1930 – la difficulté consistant ici à éviter de simplement répéter ce catalogue, mais à confirmer ces lieux communs, à repérer le processus de leur émergence, à évaluer leur force et la force des réactions qu'ils suscitèrent, dès le XIXe siècle.

Pour ce faire, on refusera la détermination géographique, sociologique ou générique. On ne se proposera pas d'étudier un lieu commun, dans le cadre d'un type d'espace (l'Italie), d'un type de voyageurs (les missionnaires) ou d'un type de récit (le récit d'aventures). Au contraire, l'objectif est de reconstruire ces catégories – de les retrouver, éventuellement – à partir d'un questionnement portant sur tel ou tel lieu commun étudié dans le cadre du discours sur le voyage en général, ce dernier pouvant être supporté tout autant par le récit de voyage, sous sa forme la plus classique, que par le roman, la presse, la correspondance privée, les instructions, les guides ou tout autre type de textes centré sur la notion de voyage.

Pari impossible, bien évidemment, dans la mesure où personne ne peut prétendre mesurer l'intégralité du discours tenu sur le voyage au XIXe siècle, notre projet se veut d'abord un effort en direction de cette mesure – effort que sont susceptibles d'accomplir tous ceux qui, chercheurs ayant travaillé sur l'un ou l'autre de ces espaces, de ces voyageurs ou de ces genres, acceptent de tenter d'élargir le domaine de leurs interprétations, pour chaque lieu commun identifié, jusqu'à l'horizon inaccessible de la culture du voyage qui fut celle du XIXe siècle.

MATIN Sous la présidence de Jean-Marc Besse (CNRS) 9h « Introduction aux clichés, stéréotypes et lieux communs du voyage », Anne-Gaëlle Weber (Université d'Artois) 9h15 « Grottes et voyages dans le temps : un lieu commun renouvelé au XIXe siècle ? », Nathalie Richard (Université de Paris I) 9h45 « Á pied, à cheval ou en train : écriture et déplacement », Philippe Antoine (IUFM d'Amiens) 10h15 « L'impression : un lieu commun du voyage au XIXe siècle ? », Sylvain Venayre (Université de Paris I) 10h45 -12h Discussion, Table ronde 12h-14h : Déjeuner APRÈS-MIDI Sous la présidence d'Antoine Lilti (ENS Ulm) 14h « Egypte : espace et lieux communs » Lucile Haguet (Université de Paris IV) 14h30 « Voyageurs à Paris et à Londres (1750-1810) : la quête de la cité idéale », Simona Gîrleanu (Université de Lille 3) 15h -17h Discussion, Table ronde en présence  de Sarga Moussa (CNRS) d'Isabelle Surun (Université de Lille 3), de Jean-Marc Besse (CNRS) et d'Anne-Gaëlle Weber (Université d'Artois)