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Les petits aventuriers du quotidien. Bande dessinée, journal et imaginaires médiatiques (XIXe-XXIe siècles)

Les petits aventuriers du quotidien. Bande dessinée, journal et imaginaires médiatiques (XIXe-XXIe siècles)

Publié le par Emilien Sermier (Source : Alexis Lévrier)

Colloque international

Les petits aventuriers du quotidien.

Bande dessinée, journal et imaginaires médiatiques (XIXe-XXIe siècles)

Appel à communications

Organisé par l’Université de Reims, l’Université Laval et le CELSA Paris-Sorbonne

(Reims, 28-30 juin 2017)

Responsables : Alexis Lévrier (Université de Reims) et Guillaume Pinson (Université Laval)

 

Les relations entre la bande dessinée et le journalisme sont anciennes et durables. Art médiatique conciliant l’image et le texte, la bande dessinée est née au creuset du journal et de la culture périodique, exploitant dès l’origine les enjeux de l’actualité, recyclant les imaginaires médiatiques et inventant des personnages qui évoluent proches des milieux de l’information, souvent journalistes eux-mêmes. Ce colloque international souhaitera ainsi interroger l’ensemble de ces relations à partir d’une réflexion alliant une poétique de la bande dessinée et un historique de ses formes telles qu’elles se sont développées au cœur de la culture médiatique et des supports périodiques.

 

La séquence temporelle que nous envisageons pour ce colloque sera largement ouverte, du XIXe siècle à aujourd’hui. Au XIXe siècle, la « civilisation du journal » (Kalifa, Reigner, Thérenty et Vaillant 2011) a profondément renouvelé le rapport au monde et la représentation du réel. La bande dessinée émerge au sein de cette nouvelle culture du regard et de l’image, tôt théorisée par Rodolphe Töpffer (Groensteen 2014) puis pratiquée dans certains périodiques par de grands précurseurs (Nadar, Doré, Cham). Accompagnée de la floraison de la presse illustrée et satirique, le phénomène ira s’amplifiant au XXe siècle, tant sur le rythme quotidien (et des suppléments illustrés) que périodique (ainsi de la série La Famille Fenouillard de Christophe dans Le Petit Français illustré, ou encore des succès de L’Épatant lancé en 1908). La voie sera ainsi ouverte à l’âge d’or des revues pour la jeunesse (Spirou, Tintin, Pilote…) qui ont assuré depuis l’après-guerre le succès de la bande dessinée franco-belge et en ont fait une véritable « médiaculture » (Maigret et Stefanelli 2012). Depuis une quinzaine d’années enfin, le succès du reportage graphique, venu notamment des États-Unis et du travail pionnier de Joe Sacco, a trouvé un prolongement dans certaines revues d’actualités telles que XXI ou La Revue dessinée. Des revues consacrées à la bande dessinée de fiction ont également vu récemment le jour, à l’image de Pandora, lancée par Casterman presque vingt ans après l’interruption de son magazine (À suivre). Ces « mooks » s’adressent il est vrai à un public adulte, mais 2016 a marqué la naissance de plusieurs revues de BD-reportage destinées à la jeunesse : les éditions Dupuis publient depuis le mois de janvier 2016 un semestriel intitulé Groom, et La Revue dessinée lancera au mois de septembre Topo, un magazine d’actualité en bande dessinée pour les moins de 20 ans. Ces évolutions confirment la capacité de la bande dessinée à se réinventer au contact étroit de la culture médiatique, ainsi qu’un attachement au support papier qui vient s’ajouter aux expérimentations numériques.

 

Au cœur de cette histoire qui court sur près de deux siècles, notre colloque invitera les participants à proposer des interventions éclairant un aspect de la relation entre bande dessinée et culture médiatique. Nous ouvrons plus particulièrement trois axes de réflexion, qui ne seront pourtant pas exclusifs, et dans lesquels les interventions pourraient s’inscrire :

1. Les imaginaires médiatiques : la bande dessinée est friande de représentations du monde du journal (salles de rédaction, héros journalistes, petites scènes de la vie quotidienne et personnages lisant des journaux). Elle n’hésite pas en outre à mettre en abyme le support journal (présence de journaux fictifs dessinés dans les cases, enjeux narratifs et diégétiques liés à la présence d’une culture médiatique au cœur même des aventures) : on sait que des dessinateurs tels que Hergé (Les Aventures de Tintin) et Jacobs (Les Aventures de Blake et Mortimer) sont coutumiers de tels procédés. Les interventions pourront ainsi viser à penser cette construction d’imaginaires médiatiques, sans doute en phase avec l’essor d’une culture de l’information et du reportage à partir des années 1920, jusqu’aux renversements narratifs aujourd’hui opérés dans le reportage graphique.

2. Fictionnalisations graphiques de l’actualité : cette vogue du reportage dessinée constituera également un aspect important du colloque. Le succès actuel de la livraison graphique d’enquêtes de types journalistiques confirme la plasticité poétique de la bande dessinée. Souvent engagée, cette nouvelle « fiction d’actualité » (Thérenty 2004) accompagne les révolutions actuelles de l’information et situe la démarche enquêtrice au centre du dispositif narratif. Elle paraît ainsi accompagner activement les nouveaux regards posés sur le monde, mettant de l’avant un point de vue sensible et immergé, au cœur de l’expérience. Les interventions chercheront à comprendre l’articulation poétique du reportage graphique, sa liaison avec les grands enjeux sociaux et médiatiques, de même que ses racines historiques (notamment avec le genre du grand reportage).

3. Poétique des supports : enfin, les participants seront invités à réfléchir aux effets des supports sur la bande dessinée, afin de montrer en quoi les contraintes matérielles et médiatiques ont été hier, et demeurent aujourd’hui encore aux sources de la poétique de la bande dessinée. L’approche support permet probablement de revoir les enjeux de travail collectif (la planche de BD est souvent un élément parmi un ensemble périodique et elle engage sans doute des relations de coprésence avec les autres illustrations), de temporalité (périodicité et dynamique du feuilleton), d’effet-rubrique (la BD occupant un espace bien défini et proposant un rendez-vous régulier à ses lecteurs) ou encore de mise en recueil (passage du périodique à l’album, engageant souvent un travail d’adaptation ou de reprise). Les enjeux numériques pourraient être abordés sous cet angle.

 

Modalités de soumission

Les interventions seront de 25 minutes. Les organisateurs du colloque invitent chercheurs et étudiants à soumettre leurs propositions (250 mots + courte biographie) par courriel à Alexis Lévrier et Guillaume Pinson avant la date du 1er décembre 2016.

 

Comité scientifique

Benoît Berthou (Université Paris 13, revue Comicalités)

Jacques Dürrenmatt (Université Paris-Sorbonne)

Thierry Groensteen (Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, Angoulême)

Valérie Jeanne-Perrier (Celsa Paris-Sorbonne)

Philippe Kaenel (Université de Lausanne)

Björn Olaf-Dozo (Université de Liège)

Nathalie Preiss (Université de Reims)

Julien Schuh (Université de Reims)

 

Bibliographie indicative :

Benoît Berthou (dir.), La Bande dessinée : quelle lecture, quelle culture ?, Paris, Éditions de la BPI, collection « Études et Recherches », 2015.

Will Eisner, Les Clés de la bande dessinée, Paris, Delcourt, 2009-2011 (t. I : La Bande dessinée, art séquentiel, 2009 ; t. II : La narration, 2010 ; t. III : Les Personnages, 2011).

Thierry Groensteen, La Bande dessinée : son histoire et ses maîtres, Paris, Skira Flammarion, Angoulême, Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, 2009.

Thierry Groensteen, M. Töpffer invente la bande dessinée, Bruxelles, Les impressions nouvelles, 2014.

Thierry Groensteen, Parodies. La bande dessinée au second degré, Paris, Flammarion, 2010.

Thierry Groensteen, Système de la bande dessinée, Paris, PUF coll. « Formes sémiotiques », 1999 (vol. II : Bande dessinée et narration, Paris, PUF coll. « Formes sémiotiques », 2011).

Éric Maigret et Matteo Stefanelli (dir.), La Bande dessinée : une médiaculture, Paris, Armand Colin, coll. « Médiacultures », 2012.

Scott McCloud, L’Art invisible, Paris, Vertige Graphic, 1999.

Scott McCloud, Réinventer la bande dessinée, Paris, Vertige Graphic, 2002.

Harry Morgan, Principes des littératures dessinées, Angoulême, L’An 2, 2003.

Benoît Mouchart, De la bande dessinée en France, Paris, Les Belles lettres, 2013.

Pascal Ory, Laurent Martin, Jean-Pierre Mercier, et al. (dir.), L’Art de la bande dessinée, Paris, Citadelles & Mazenod, 2012.

Benoît Peeters, Lire la bande dessinée, Paris, Flammarion, coll. « Champs Arts », 1998, rééd. 2003.

Thierry Smolderen, Naissances de la bande dessinée : de William Hogarth à Winsor McCay, Paris, Les Impressions nouvelles, 2009.

Marie-Ève Thérenty, « L’invention de la fiction d’actualité », dans Marie-Ève Thérenty et Alain Vaillant (dir.), Presse et plumes. Journalisme et littérature au XIXe siècle, Paris, Éditions Nouveau monde, 2004, p. 415-428.

  • Responsable :
    Alexis Lévrier et Guillaume Pinson
  • Adresse :
    Université de Reims