Questions de société

"Les options au bac sont trop coûteuses" (Le Figaro, 18/4/8).

Publié le par Marc Escola

Sur le site du Figaro, ces réflexions assez instructives quant à l'avenir des "langues rares" :

Le ministre veut s'attaquer aux langues rares, qui permettent de gagner des points mais coûtent cher (Anne Sérès).


"Incroyable et… vrai ! Les lycéens peuvent opter pour 59 langues vivantes et régionales au bac : de l'haoussa (une langue nigériane) au tamoul en passant par le corse et le catalan. Trente-neuf d'entre elles peuvent être suivies au lycée, les autres sont «passées» devant un enseignant le jour de l'examen mais n'ont pas forcément fait l'objet de cours, tellement elles concernent un nombre limité d'élèves. Toujours plus surprenant et au-delà des langues : le surf, l'escalade, le rugby ou encore la planche à voile ou la danse contemporaine ont aussi leurs lettres de noblesse. La liste a des airs d'inventaire à la Prévert. Sans compter la grande diversité des filières et des options de l'enseignement technologique.

Or, cette avalanche d'options ne concerne finalement que peu d'élèves : près de 22 % des élèves de terminale choisissent une option facultative qui peut rapporter des points le jour «J». Seul 1,3 % des lycéens choisissent deux options. Le ministère chiffre à 8,34 % la proportion d'heures de cours donnés dans le secondaire devant des groupes de moins de 10 élèves. Une proportion qui atteint 18,61 % pour les lycées professionnels. Cet indicateur est suivi de près par Bercy qui veut faire des économies.

Désormais, cette diversité, Xavier Darcos ne s'en cache pas, est en ligne de mire dans la réforme du lycée qu'il veut mettre en oeuvre. Car les chiffres sont là : un jeune Français de 15 ans suit au total 1 147 heures de cours par an, contre 968 heures pour la moyenne des pays de l'OCDE et aux yeux du ministre, il coûte désormais trop cher à la collectivité. Il est temps de rationaliser. Quelques exemples : seuls deux élèves de Terminale ont choisi l'an dernier l'option «arts du cirque». Sur l'ensemble du territoire, seuls 300 élèves étudient le polonais. Sans compter les petits groupes de chinois ou de russe. Dans les académies urbaines, pour faire des économies, les enseignements sont parfois dispensés dans un seul lycée. Ailleurs des initiatives via des visioconférences sont proposées. Dans l'Académie de Toulouse, une quarantaine d'élèves suivent un enseignement de russe à distance.

Pour des langues plus rares encore (persan, arménien, laotien et peule), des formations via le Cned sont organisées, une formule moins onéreuse qui devrait être intensifiée. Autre souci : cette liberté de choix est un casse-tête et un coût pour l'organisation des épreuves. Alors que 8 lycéens ont choisi l'option langue des signes dans l'académie d'Aix-Marseille pour la prochaine session du bac, l'examinateur viendra tout droit… de la région parisienne. Même déplacements coûteux pour le passage des épreuves en bambara, tamoul ou malgache. À Lyon, le problème s'est aussi posé l'an dernier pour la centaine de lycéens qui avaient choisi de passer turc comme option au bac.

Les enseignants de langues vivantes ont bien compris que le ministre voulait s'attaquer au système. Ils tirent la sonnette d'alarme. «Ce serait dommage de fermer la porte à un espace de liberté des élèves», explique Sylvestre Vanuxhem, président de l'Association des Professeurs de Langues vivantes (APLV). Mais la machine semble en marche.

Économiser 3 000 postes
Xavier Darcos, qui se garde bien de dire comment il va s'y prendre et combien d'options il pourrait envisager de supprimer, a pourtant bien l'intention de réformer le système en profondeur. D'autant qu'un rapport de l'Inspection Générale des Finances et de l'Inspection de l'Éducation nationale consacré à la grille horaire des lycées a déjà dressé plusieurs pistes fin 2006.

Principale recommandation : «l'allègement des effectifs de classes de langues en première et en terminale ne pourra progresser qu'au rythme de la suppression des groupes inférieurs à 15 élèves». Autrement dit : exit les cours quasi particuliers ! Une économie déjà chiffrée à 3 000 postes d'enseignants. Et les auteurs du rapport de poursuivre : «la mission recommande de diminuer de moitié le nombre d'options de détermination de classes de seconde». De quoi mettre quelques milliers de nouveaux lycéens dans la rue."