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Les mondes des bergers (XIIe-XVe s.)

Les mondes des bergers (XIIe-XVe s.)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Maxime Kamin)

Appel à communication

Les mondes des bergers (XIIème-XVème siècles)

Université Grenoble-Alpes

18 octobre 2018

 

Bergers et bergères sont des personnages récurrents de la littérature médiévale. Du XIIème siècle à la fin du XVème siècle, le motif pastoral s’épanouit dans le paysage littéraire et artistique et devient peu à peu incontournable. Il se rencontre de plus en plus fréquemment dans les poèmes, textes narratifs et pièces de théâtre, mais également dans les écrits scientifiques tels que les traités agronomiques dont notamment le Bon berger de Jean de Brie, qui aurait été rédigé à la suite d'une commande du roi Charles V.

Toutefois, la figure du berger n’est pas univoque : certains mènent une existence paisible dans un cadre éloigné du reste du monde, des rituels de cour comme du chaos des champs de bataille. Telle la « pastoure » du Dit de Christine de Pizan qui cherche à s’isoler, à « seulete estre[1] », les bergers se montrent parfois indifférents à toute préoccupation politique, morale ou religieuse, vivent proches de la nature, au rythme de journées qui se ressemblent toutes, entrecoupées de fêtes, de danses, de festins improvisés à l’ombre des arbres. Rien ne semble, en apparence, pouvoir menacer l’harmonie de leur univers, ni la faim, ni la maladie, ni la mort. Pourtant, tel le célèbre « Et in Arcadia ego » qui connaîtra un grand succès en peinture aux XVIème et XVIIème siècles, certains détails font surgir le souvenir d’une violence implicite.

Pour d’autres, cette dernière se fait au contraire explicite : les viols sont très présents dans les pastourelles françaises, de même que la guerre, dans le Pastoralet de Bucarius, par exemple, ou dans les bergeries, ces pièces destinées aux entrées princières. Les pâtres abandonnent leur réserve pour y exposer un jugement parfois virulent sur les affaires de leur temps : entre les guerres et les pillages, l’âge d’or semble bien lointain.

L’univers pastoral se révèle ainsi un lieu de tensions et d’affrontements, entre nature et civilisation, monde paysan et monde courtois, gouvernants et gouvernés. Il peut constituer l'un de ces " mondes possibles " dont parle par exemple Françoise Lavocat[2], lieu d'une réalité alternative, parfois utopique, se faisant le miroir critique ou flatteur de la réalité. Il soulève donc également des enjeux politiques et polémiques qui invitent à interroger la place de la littérature pastorale au sein des enjeux et conflits de la société.  

Cet appel à communication s’inscrit donc dans une perspective diachronique. Il offre un point de rencontre entre les divers éléments qui composent un univers pluriel et participent au dynamisme d’une forme littéraire hybride, narrative et dialoguée, qui ressortit à la fois au registre « aristocratisant » et « popularisant » selon les termes de Pierre Bec[3], recouvre le domaine de la poésie lyrique, mais répond aussi aux nécessités de la scène théâtrale.

Afin d’orienter les débats, nous mettons ici une liste possible de thèmes qui pourraient être abordés :

- Quels rapports l’univers pastoral dessine-t-il entre nature et culture ?

- Comment représenter la violence et la sexualité ?

- Dans quelle mesure le motif pastoral est-il caractérisé par sa transgénéricité ? Comment se traduit le passage d’un genre ou d’une forme à l’autre ? Quels liens peut-on par exemple établir entre les pastourelles et d’autres formes de lyrique non pastorale, ou entre les bergeries et d’autres formes dramatiques ? 

- Comment la littérature pastorale s’inscrit-elle dans une dynamique de réécriture ? Existe-t-il des sources antiques ou médio-latines du corpus médiéval ?

Cet appel à communication est ouvert aux jeunes chercheurs de toutes les disciplines. La journée d’étude sera introduite par Mme Fleur Vigneron, Maître de conférences en langue et littérature française du Moyen Âge à l’université Grenoble-Alpes, et donnera lieu à une conférence plénière de M. Denis Huë, Professeur de langue et de littérature française du Moyen Âge à l’université Rennes II. Elle se tiendra le jeudi 18 octobre 2018 à l’université Grenoble-Alpes et sera suivie d’une publication sur la plate-forme L’Ouvroir Litt&Arts de l’université Grenoble-Alpes.

Les propositions de communication (250 mots max.) devront être rédigées en français, et accompagnées d’un C.V académique. Elles devront être retournées conjointement aux trois organisateurs : Marielle Devlaeminck (marielle.devlaeminck@gmail.com), Charlotte Guiot (charlotte.guiot@ens-lyon.fr), ou Maxime Kamin (maxime.kamin@univ-grenoble-alpes.fr) au plus tard le 20 juillet 2018, date limite de soumission des dossiers.

 

[1]Christine de Pizan, Le Dit de la Pastoure (1403), édition Maurice Roy, OEuvres poétiques de Christine de Pizan, Didot et Cie (Firmin) / Marchessou fils, Paris / Le Puy, 1891, p.236.

[2] Françoise Lavocat, La théorie littéraire des mondes possibles, CNRS Ẻditions, Paris, 2010. Françoise Lavocat, Fait et fiction : pour une frontière, Paris, Ẻditions du Seuil, 2016.

[3]Pierre Bec, La lyrique française au Moyen Âge (XIIè-XIIIè siècles). Contribution à une typologie des genres poétiques médiévaux : études et textes, Paris, Picard, 1977, t. I, p. 131.