Questions de société
 

"Les imprécisions de V. Pécresse", par S. Huet, blog {sciences²}, 17/11/2011

Publié le par Arnaud Welfringer (Source : SLU)

 

 "Les imprécisions de Valérie Pécresse", par Sylvestre Huet, blog {sciences²}, 17/01/2011

Cet après midi, avec Mathieu Vidart et Sophie Bécherel, nous avons interrogé Valérie Pécresse sur France-Inter lors de l'émission La tête au carré. Voici quelques remarques préliminaires, de mémoire, sur certains propos de la ministre de la recherche et de l'enseignement supérieur.

- Combien les doctorants sont-il rémunérés ? "Un peu moins de 2000 euros", a répondu la ministre. En réalité, selon le site même du ministère, les contrats doctoraux qu'il finance sont à «1684,73 euros bruts si vous effectuez uniquement de la recherche». Les  «2024,70 euros bruts» évoqués par la ministre, c'est  «si vous effectuez des activités complémentaires, par exemple de l'enseignement.» Surtout, comme le souligne la Confédération des jeunes chercheurs, si le taux de thèse financées dépasse les 90% en sciences de la vie et de la nature, il ne dépasse pas les 30% en sciences humaines et sociales. Il est utile de souligner que lors de la création de l'allocation doctorale, en 1976, il avait été jugé normal de rémunérer à 1,5 SMIC, un doctorant, recruté à bac plus cinq après une dure sélection.

- «3,5 milliards de plus dans la recherche en 2011 grâce au grand emprunt». Là, on est carrément dans la publicité mensongère. Comme les deux années qui viennent de s'écouler, les annonces de dépenses en Autorisation d'engagement, sur les emprunts et les opérations de partenariat public privé ne donnent lieu à pratiquement aucune activité réelle. Comme l'a dit le sénateur communiste Yvan Renar lors du débat budgétaire au Sénat : «La volonté du Gouvernement d'afficher des moyens en augmentation le conduit également à intégrer dans son calcul des sommes totalement virtuelles, tel les intérêts de l'opération Campus. Les sommes figurant à ce titre dans les lois de finances de 2009 et de 2010 n'ont été ni mises à disposition des universités ni capitalisées sur la dotation initiale, et les crédits figurant dans le projet de budget pour 2011 ne seront, selon toute vraisemblance, pas consommés, les projets Campus n'étant pas suffisamment avancés pour connaître un début d'exécution dès l'année prochaine. De même, il y a fort à parier que les moyens extrabudgétaires provenant des investissements d'avenir – l'ex-grand emprunt –, estimés à 3,5 milliards d'euros, ne seront pas utilisés dès 2011, compte tenu du temps nécessaire pour évaluer les projets répondant aux appels d'offres, engager les démarches administratives et consommer les crédits. L'augmentation effective de la dotation budgétaire pour la recherche publique et l'enseignement supérieur n'atteint que 0,5 % par rapport à 2010. En euros constants, les moyens des universités et des organismes de recherche seront donc en baisse. Le CNRS a vu ainsi la dotation de ses laboratoires baisser de 12 % en moyenne, une fois retranchés les crédits attachés à la masse salariale et aux grands équipement.»

 L'internaute peut trouver dans cette note quelques tableaux chiffrés sur l'évolution de l'effort de recherche en France.

- L'énergie et l'électricité. Incitée à défendre la politique nucléaire pour la production d'électricité du gouvernement, Valérie Pécresse a vanté «l'indépendance énergétique» permise par ce choix technologique. S'il est certain que le nucléaire permet une certaine maîtrise de l'approvisionnement en électricité car il est assez facile de stocker plusieurs années de besoins en uranium, il ne faut pas confondre énergie et électricité. Si l'électricité, nucléaire ou d'autre origine, peut se substituer à d'autres sources d'énergies pour certaines applications, c'est très loin d'être le cas pour la majorité des usages du pétrole (voitures, camions). L'exemple pris par Valérie Pécresse sur "les vagues de froid" était particulièrement maladroit puisque le nucléaire ne peut justement pas être utilisé pour passer les pointes de consommation électrique.

- Le crédit d'impot recherche a boosté (je ne me souvient plus du terme exact utilisé par la ministre) la recherche privée. Toujours d'Yvan Renar, cette remarque permet de rectifier le propos : «Selon la Commission européenne, les entreprises françaises ont globalement réduit leurs budgets de recherche de 4,3 % en 2009, soit bien plus que celles des autres pays de l'Union européenne. Au cours des trois dernières années, la progression de la dépense de recherche et développement de nos entreprises a été l'une des plus faibles de l'Union européenne. Ainsi, on constate que le crédit d'impôt recherche, qui coûtera à la nation plus de 5 milliards d'euros en 2011, n'a qu'un influence limitée sur l'évolution de l'effort de recherche du secteur privé. L'effet d'aubaine n'a pas disparu : si cette disposition fiscale rencontre le succès auprès des entreprises, notamment les plus grandes d'entre elles, c'est trop souvent parce qu'elle permet un allégement considérable de leur imposition. Un rapport récent de la commission fiscale du MEDEF, dont la presse a fait état ces derniers jours, le confirme.»

- «La loi sur les OGM est protectrice». J'ai comme un doute... si mes souvenirs sont bons, les décrets d'applications ne sont pas encore parus.