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Les discours de la méthode en Angleterre, XVIe-XVIIe siècles : vers un ordre moderne ?

Les discours de la méthode en Angleterre, XVIe-XVIIe siècles : vers un ordre moderne ?

Publié le par Natalie Maroun (Source : Myriam-Isabelle Ducrocq)

APPEL ÀCOMMUNICATIONS

« Les discours de la méthode en Angleterre, XVIe-XVIIesiècles :

vers un ordremoderne ? »

Vendredi 1eret samedi 2 avril 2011

Université ParisOuest Nanterre La Défense

Centre deRecherches Anglophones (CREA – EA370)

À la Renaissance, les controverses philosophiques et scientifiques,ainsi que les nombreuses traductions de Platon créent les conditions d'un débatautour de l'idée de méthode, Aristote ayant été l'autorité incontestée en lamatière jusque-là. Dès les années 1530, l'interrogation sur la méthode devientcentrale, dans le domaine de la rhétorique, puis de la dialectique. Le terme« méthode » est ainsi redéfini tout au long du XVIe siècleet continue à faire l'objet de nombreuses querelles au siècle suivant. Lapériode est propice à un tel débat, comme l'explique Philippe Desan dans sonouvrage sur la naissance de la méthode en France à la Renaissance :« Ce moment de chaos cosmologique, ontologique et téléologique où toutflotte subitement laisse entrevoir un nouveau discours autour de laméthode où il est possible de détecter les bases d'une nouvelle façon decomprendre le monde » (Naissance de la méthode, Paris, A.-G. Nizet,1987, p. 14).

Dans un contexte où les disciplines ne sont pas encore distinctes, onrecherche le plus souvent une méthode universelle qui offre une interprétationglobale et générale du monde, mais la méthode, qui permet d'accéder à la véritéou de persuader par exemple, est aussi perçue comme un outil de vulgarisationscientifique. De très nombreux titres de traités sur des sujets divers, publiésen Angleterre au XVIIe siècle, promettent une méthode simple(« a plain method »), nouvelle (« after the newestmethod ») et brève (« a plain, short and easie method »,« a compendious method »), mais la méthode est aussi garante duplaisir de la lecture et elle est elle-même agréable (« a delightfulmethod », « an exquisite method »). Ces titres révèlentégalement qu'on doit distinguer deux usages de la méthode : celui qui faitl'objet d'un débat aux XVIe et XVIIe siècles, et qui doitpermettre de rendre plus efficace la recherche en « science » et dansles arts, et un usage commun de la méthode, perçue comme un principed'organisation et d'exposition des idées. Ainsi, la méthode est à la fois unetechnique de découverte (methodus ou méthode-inférence) et la mise enordre d'un objet d'étude (ordo ou ordre-disposition) (voir G. Zabarella,De methodis, 1578).

En France, La Ramée, influencé par Pic de la Mirandole et Ficin, estconsidéré comme le premier grand théoricien de la méthode moderne : ilpropose une méthode unique censée rendre compte de l'ensemble des phénomènes.Dans Discours de la méthode et surtout dans Règles pour la directionde l'esprit, Descartes expose les différentes étapes d'une méthode qui doitpermettre de guider la raison vers la vérité. En Angleterre, Francis Bacon estquant à lui à l'origine d'une méthode qui sera reprise, modifiée et interprétéetout au long du XVIIe siècle, notamment par les Fellows de laRoyal Society tels que Robert Boyle, Joseph Glanvill et Robert Hooke.Dans Novum Organum et The Advancement of Learning, Bacon opposela méthode rationaliste de l'araignée et la méthode empiriste de la fourmi, etpropose au philosophe de la nature une alliance des deux approches, incarnéepar l'abeille, « qui tire la matière première des fleurs des champs, puis,par un art qui lui est propre, la travaille et la digère » (NovumOrganum, 1:95). Bien que le débat sur la méthode en philosophie de lanature soit particulièrement animé dans le contexte de la « Révolutionscientifique », d'autres champs du savoir, tels que la rhétorique, ledroit, la médecine, l'histoire ou la politique, cherchent à se doter d'uneméthode efficace. Ainsi, Hobbes attribue leserreurs de ses prédécesseurs à leur manque de méthode (Leviathan, chap.5, « Of Reason and Science »). Il s'inspire tour à tour de lagéométrie, de la méthode inductive de Bacon et de la méthoderésolutive-comparative de Galilée pour en appliquer les démarches respectivesau domaine de la politique. Il entend partir de l'observation objective de lanature humaine pour en déduire des principes généraux de gouvernement. Sansdoute l'étude de l'histoire des peuples acquiert-elle à cette époque un nouveaustatut dans des démarches qui privilégient une réflexion politique fondée enexpérience et en raison.

Voici quelquespistes de réflexion :

On pourra s'interroger parexemple sur les différentes acceptions du terme « méthode » au débutde l'époque moderne et sur la définition d'une « bonne méthode » en« sciences » et dans les arts, en montrant notamment quels étaientalors les moyens et les buts de la méthode. Parmi ces derniers, il semble quela vulgarisation du savoir joue un rôle majeur, pourtant on peut se demander sila méthode vise à rendre le savoir accessible à tous, ou au contraire à enfaire encore davantage le privilège d'une élite, celle qui, ayant fréquentél'Université, maîtrise la méthode. Enfin, on pourra s'intéresser auxcontraintes de la méthode et aux liens entre méthode et systématicité ourégularité : la méthode fait-elle obstacle à la diversité ?Réduit-elle nécessairement la diversité de son objet ? Mais aussi peut-ilexister plusieurs « bonnes » méthodes ?

Ce colloque pourra égalementpermettre la mise en évidence des différents champs de la connaissance danslesquels on recherche une méthode efficace aux XVIe-XVIIesiècles. Faut-il penser qu'il y a alors deux traditions différentes : uneméthode « artistique » s'inspirant de Socrate et une méthode« scientifique » s'inspirant quant à elle d'Aristote (Neal W.Gilbert, Renaissance Concepts of Method, NY, Columbia UP, 1960, p.xxiv) ? Ce questionnement conduit à s'interroger sur la contribution dudébat sur la méthode au processus de disciplinarisation qui caractérise le débutde l'époque moderne : recherche-t-on alors une méthode universelle ou biens'agit-il au contraire d'élaborer une méthode propre à chaque champ dusavoir ?

On pourra également s'interrogersur le succès ou l'échec de la méthode telle qu'elle est alors définie en« sciences » ou dans les arts. Dans le domaine de la philosophienaturelle, par exemple, l'Angleterre reçoit l'influence de la méthode proposéepar Bacon, mais aussi de celle proposée par Descartes : faut-il opposerune approche anglaise et une approche continentale ? Ces méthodes sedistinguent-elles absolument ? L'une d'elles l'emporte-t-elle finalementsur les autres ? Il pourra s'agir aussi d'évaluer l'efficacité des« nouvelles méthodes » et le lien entre méthode et innovation :les grandes découvertes scientifiques du XVIIe siècle sont-elles lerésultat de la mise en oeuvre d'une méthode nouvellement créée, ou sont-elles leplus souvent, comme dans le cas du microscope par exemple, le fruit duhasard ?

Les interventions porteront de préférence surl'Angleterre, mais les comparaisons avec d'autres pays européens seront lesbienvenues.

Les communications pourront être présentées en françaisou en anglais, et ne devront pas excéder 30 minutes. Elles seront suivies de 10minutes de discussion.

Veuillez faire parvenir un texte de présentation (500mots maximum) et un titre de communication, accompagnés d'une brève noticebiographique avant le 20 novembre 2010 à :

Myriam-Isabelle Ducrocq mducrocq@u-paris10.fr et SandrineParageau sparageau@hotmail.com




CALL FOR PAPERS

“Discourses on Method in EarlyModern England: Towards a Modern Order?”

April 1-2, 2011

University of Paris Ouest,Nanterre La Défense, 200 av. de la République 92001 Nanterre

Centre de Recherches Anglophones(CREA – EA370)

Submission deadline : November 20, 2010

In early modern Europe philosophicaland scientific controversies as well as the numerous translations of Plato'sworks led to debates aboutthe idea of “method”. As early as the 1530s, method was thoroughly examined inthe field of rhetoric and dialectics. The term came to be constantly redefinedthroughout the 16th century and was still much debated in thefollowing century. So intense was the debate in the seventeenth century thatPhilippe Desan thus described the situation in France: “This moment ofcosmological, ontological and teleological chaos, when nothing was certainanymore, reveals a new discourse about method, in which it is possibleto trace the foundations of a new way of understanding the world.” (Naissancede la méthode, 1987, p. 14).

Since disciplines were not as yetdistinct in early modern England, people sought a universal method that allowedfor a more global interpretation of the world. But method was also deemed amedium to reach a wider audience. Many 17th-century treatisespublished in England promised “a plain, short and easie” method. Moreover,it was often described as a new and “delightful” method which gave pleasure tothe reader. This suggests that there were two uses of “method”: method bothfacilitated research in arts and “science”, and, more commonly perhaps, enabledthe organiszation and presentation ofideas. Thus method was both a technique of discovery (methodus) and theordering of an object of study (ordo), as Zabarella put it in his De methodis of1578.

In France, Ramus, who was influencedby Pico della Mirandola and Marsilio Ficino, is considered as the firsttheoretician of modern method: he proposed a single method that aimed at accounting for all phenomena. In Discourseon Method and Rules for the Direction of the Mind, Descartesexpounded the various stages of a method which would guide reason on her way totruth. In England, Francis Bacon was the author of a method which was taken up,modified and interpreted throughout the seventeenth century, notably by Fellowsof the Royal Society such as Robert Boyle, Joseph Glanvill, and Robert Hooke.In Novum Organum and The Advancement of Learning, Bacon opposedthe rationalist method of the spider to the empirical method of the ant. Hesuggested that the natural philosopher adopt a synthesis of the two embodied bythe bee which “gathers its material from the flowers of the garden and of thefield, but transforms and digests it by a power of its own” (Novum Organum,1:95). It comes as no surprise that there was a lively debate on method innatural philosophy during the “Scientific Revolution”, but this debate alsoextended to other fields of knowledge, such as rhetoric, the law, medicine,history and politics. Thus, Hobbes ascribed his predecessors' errors todefective method (Leviathan, chapter 5 “Of Reason and Science”). Heconsidered applying the rules of geometry, Bacon's inductive method andGalileo's comparative-resolutive method to the field of politics in order toderive general principles of government from the objective observation of Man.The study of history undoubtedly acquired a new status as a prominent role wasgiven to experience and reason.

We propose to explore:

  • The various definitions of the term “method” that were given in the early modern era and the definition of “a good method” in arts and “science”. The goals and means of method : if reaching a wider audience seems to have been the goal, one can wonder whether method really aimed at making knowledge accessible to all, or if it contributed to making it even more the privilege of an elite, who by having attended University could master method. One could also examine the links between method and regularity: is method an obstacle to diversity? Does it necessarily reduce the diversity of its object? Can there be more than one “good” method?

  • The various fields of knowledge in which an efficient method was developed in the 16th and 17th centuries. Can we say that there were two distinct traditions : an « artistic » one inspired by Socrates and a « scientific » one inspired by Aristotle (Neal W. Gilbert, Renaissance Concepts of Method, 1960, p. xxiv) ? This raises another related question : to what extent the debate on method contributed to the shaping of disciplines; was there one universal method or were there several specific methods adapted to every field of knowledge?

  • The success or failure of method. In the field of natural philosophy for example, England received the influence of Bacon but also that of Descartes: should we therefore oppose an English approach and a Continental one? Did one prevail? The link between method and innovation is another interesting direction: were the great discoveries the result of the application of a newly created method or, as was the case for the microscope, were they chance discoveries?

Papers will primarily focus on England but comparisonswith other European countries will be most welcome. They should not exceed 30minutes and will be followed by a ten-minute debating session.

Please send yourproposals (a 500-word abstract with a title) as well as a biographical note to Myriam-IsabelleDucrocq mducrocq@u-paris10.fr andSandrine Parageau sparageau@hotmail.com