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Appels à contributions
Les Cahiers Max Jacob

Les Cahiers Max Jacob

Publié le par Université de Lausanne (Source : Patricia Sustrac)

Appel à contributions

Les Cahiers Max Jacob

Centenaire de la parution du Cornet à dés

 

Alors que la guerre semble devoir durer, Max Jacob se décide à réunir parmi un millier d’anciens manuscrits « 300 poèmes chéris [qu’il a copiés] pour qu’il soient publiés [s’il] meur[t] » (à Daniel-Henri Kahnweiler, 22 septembre 1914). La publication va s’avérer délicate : perte de la gravure de Picasso destinée aux exemplaires de luxe d’abord, grève des typographes ensuite et la guerre elle-même qui désordonne plus généralement la vie en France. Le recueil paraîtra finalement en novembre 1917 à compte d’auteur. Jacob y adjoindra deux préfaces : la première sera antidatée de 1906 pour contrer l’antériorité de la parution de Poèmes en prose de Reverdy en octobre 1915 ; la seconde - datée de 1916 - est considérée, aujourd’hui comme hier, comme l’esthétique d’une refondation du poème en prose.  « Cette préface importante » (Ibid.) - à valeur de manifeste - expose les conceptions esthétiques de Jacob et introduit dans une étonnante gravité pleine de légèreté, des poèmes mêlant la vie quotidienne, les faits divers, le roman-feuilleton, les rêves de la nuit, les calembours, l’angoisse de la guerre. Détournant les genres poétiques, le recours à la parodie, au pastiche, à la réécriture a souvent dérouté par son anti-conformisme, ses décalages soudains, ses paradoxes, son onirisme ; mais un ordre rigoureux gouverne une apparente discontinuité. Si le poète s’en remet au hasard - ce que le titre laisserait suggérer -, il transcrit plutôt un réel ouvert à ses jeux internes, ses tensions, et à ses multiples contradictions. Le poème, pour Jacob, doit éloigner du connu pour créer « un nouveau noyau dans l’univers » (préface, Cornet).  À la manière du cubisme, - Le Cornet en est pour Jacob « le plus parfait exemple » (à Prudence Jacob, 4 juin 1927) -, le poète étudie la composition d’un ensemble et non pas la reproduction d’une image. « [Dans] Le poème en prose, (…) le sujet n’a pas d’importance et le pittoresque non plus. On y est préoccupé que du poème lui-même c’est-à-dire de l’accord des mots, des images et de leur appel mutuel et constant » (Art Poétique, Quarto, p. 1375). Constamment, Jacob insistera sur l’espace de silence qui doit entourer le poème, cette « marge » qui le sépare de la terre et le conduit « à être éloigné du sujet » (préface, Cornet). Rejetant toute imitation du réel, cette poétique résiste à la connivence avec le lecteur qu’il ne s’agit pas de « surprendre » mais de perturber par une instabilité constante -. Jacob pense le poème « contre » Baudelaire – dont la théorie de la surprise lui paraît « un peu grosse » (préface, Cornet) : Jacob veut « transplanter » le lecteur dans un univers où seuls priment la composition et le matériau des mots. Cet horizon d’une pureté poétique ouvre la voie de la poésie moderne. Laissant là les variations ornementales, Jacob invite « à considérer que la situation d’un poème et son style font sa force poétique, que la marge qu’il saura créer entre l’univers poétique et l’univers de la communication courante [feront] qu’il s’affirmera poétique et non par le respect d’une forme convenue au préalable » (Andreucci, Poésie et religion dans l’œuvre de Max Jacob, p. 345). Le Cornet à dés, chef d’œuvre de Max Jacob – « mon [recueil] le plus célèbre » (à Max Renvoyer, mars 1939) - demeure son livre le plus lu, le plus aimé, le plus souvent réédité. Ce recueil confirmera et amplifiera sa position de Magister dans la République des Lettres ; de nombreux jeunes poètes, aujourd’hui, comme hier, en France ou à l’étranger, viendront à lui comme à un maître grâce à ce livre singulier emblématique de l’Esprit nouveau.

Comment se jouent les rapports entre le texte et l’image dans les éditions illustrées du Cornet ? Comment s’est organisée la publication, la réception de cette œuvre majeure du vivant de l’auteur ? Quelles sont les questions esthétiques que Jacob énonce pour refonder l’esthétique du poème en prose ? Quelles sont les sources poétiques auxquelles il se rallie ou qu’il rejette ? Quelles sont les constructions de l’écriture onirique des poèmes du Cornet ? Cent ans après sa parution, il importe, aujourd’hui d’évaluer la portée actuelle de cette oeuvre, à travers ses nombreuses éditions, ses variations, ses prolongements ; à travers les oeuvres qui en ont subi la marque, l’École de Rochefort ou de nombreux poètes contemporains français ou étrangers

Le Cornet à dés a déjà été l’objet d’études, mais, une recherche conjuguant les méthodes et les questionnements doit permettre d’aborder ce livre-monde dans ses multiples aspects historiques et théoriques. Le prochain numéro des Cahiers Max Jacob qui sera consacré au recueil proposera une exploration selon quatre axes principaux :  

1. les stratégies textuelles : théorie poétique : rôle et étude des préfaces de 1906 et de 1916 ; questions énonciatives, rhétoriques et stylistiques (anecdotes, paraboles, aphorismes, métaphores, calembours, effets rythmiques), ironie, satire, parodie ; présence du religieux ; l’écriture du rêve, l’art du doute ;

2. archéologie du Cornet à dés : histoire matérielle et éditoriale du recueil (structurations de l’ouvrage, les reliures d’art, les éditions illustrés, les dédicaces...). Les éditions du Cornet à dés : parutions en revues, les orientations éditoriales des éditions du vivant de l’auteur (1917, 1922, 1923) ; Le Cornet à dés dans la correspondance de Max Jacob : enjeux énonciatifs en fonction du destinataire, réception du recueil par l’auteur lui-même ;

3. les cadres pragmatiques : les situations de communication diverses, les visées discursives, la réception du Cornet à dés ; éditer en temps de guerre : rejet de la diabolisation de l’ennemi, tensions et terreurs, écriture de la menace, informations et rumeurs ;

4. l’inscription de Max Jacob dans l’histoire du genre du poème en prose : la formation intellectuelle de Max Jacob (Le Cornet et l’héritage du Chat Noir, Alphonse Allais, les journaux satiriques et humoristiques) ; Le Cornet et les genres littéraires : l’hybridité, les contradictions et les interactions des genres littéraires dans le poème en prose de Max Jacob, les modèles de référence : l’opposition à Rimbaud, à Baudelaire, le modèle mallarméen ; les transformations du poème en prose dans l’oeuvre poétique de Max Jacob ; l’influence du Cornet à dés sur les poètes de l’Esprit nouveau, le surréalisme, l’École de Rochefort, en Europe et aux USA (le New York School et la poésie postmoderne américaine) : les héritiers et les épigones.

Le centenaire de la publication du Cornet à dés est inscrit au calendrier des Célébrations nationales 2017.

 

PROPOSITION DE CONTRIBUTION : en langue française, 1'500 signes, accompagnée d’une notice bio-bibliographique, à envoyer avant le 1er juillet 2016 à :

Alexander DICKOW, ard@vt.edu

Assistant Prof. of French, Virginia Tech (USA), directeur scientifique des  Cahiers Max Jacob.

ARTICLE FINAL : 30 000 signes, résumé de l’article : 10 lignes

REMISE DE L’ARTICLE FINAL : 1er février 2017

PUBLICATION : LES CAHIERS MAX JACOB, publication bisannuelle des Amis de Max Jacob, revue à comité scientifique (http://cahiersmaxjacob.org).

DATE DE PARUTION : 1er octobre 2017

DIRECTRICE DE PUBLICATION:

Patricia SUSTRAC, associationmax-jacob@wanadoo.fr

présidente de l’Association des Amis de Max Jacob